Les plans de relance décidés par les Etats les uns après les autres, alignent les milliards par centaines, les taux d’intérêts à court terme sont quasiment nuls. La récente réunion du G20 a pourtant abordé de nombreuses autres questions, preuve s’il en est que la crise économique qui secoue la monde ne peut être réglée uniquement par les seuls instruments budgétaires et monétaires.
Le G20 a donc abordé la question des outils de régulation : lutte contre les paradis fiscaux, contrôle des produits financiers les plus spéculatifs, normes de fonds propres des banques, normes comptables, renforcement des institutions financières internationales et en particulier du FMI.
Tout cela est sans doute bel et bon mais cela n’aura guère d’impacts sur la sortie de crise : le but est plutôt d’empêcher le renouvellement d’une crise semblable. Seul le renforcement des moyens du FMI contribuera à la sortie de crise par le soutien qu’il permettra aux pays les plus fragilisés.
La déclaration finale, après avoir chiffré à 5000 milliards de dollars (environ 800 dollars par habitant de la planète) le montant cumulé des plans de relance précise dans son point 8 :
« Nos actions pour restaurer la croissance ne peuvent être efficaces tant que nous n’aurons pas rétabli les crédits domestiques et les flux internationaux de capitaux ». L’aide massive apportée aux banques choque beaucoup de citoyens qui la comparent avec ce qui est fait dans le domaine social par exemple. Il faut dire et répéter que si elle n’avait pas lieu, ce serait tout le système qui s’effondrerait avec les besoins en aide sociale correspondants. Rappelons aussi au passage que le « rien n’ait fait dans le domaine social » est un raccourci pour « rien de nouveau ». Les différentes caisses de Sécurité Sociale et les allocations chômage représentent « seulement » 20% du PIB dans notre pays !
Au delà du système bancaire dont la crise a considérablement aggravé la récession en cours, il faut se demander si les mesures prises ne sont pas de nature à alimenter la crise suivante, en augmentant encore le montant des dettes cumulées et des liquidités à placer. Ce souci a conduit au point 11 : « nous sommes résolus à assurer une viabilité des finances publiques, une stabilité des prix, et nous mettrons en place des stratégies de sortie de crise crédibles ».
En clair : il n’est pas question de laisser filer de manière durable les déficits ni de pratiquer de manière permanente une politique monétaire laxiste. Cette position vient certainement de l’Union Européenne et surtout de l’Allemagne mais il est probable que la France l’a appuyée.
Les allemands ont encore en souvenir l’hyper inflation des années 20 (les collectionneurs connaissent les timbres de l’époque, en millions de marks). Ils ont pratiqué avec la Bundesbank et imposé dans le traité de Maastricht des politiques prudentes en matière de déficit budgétaire et de création monétaire. Cette conception se voit dans le plan de relance adopté aujourd’hui en Allemagne mais aussi en France.
Le risque serait en effet d’augmenter la dépense publique d’une manière qui ne permettrait pas de revenir en arrière une fois la crise passée. L’exemple typique d’une telle augmentation serait l’embauche massive de fonctionnaires : ceux ci sont là pour 40 ans, et le budget de l’Etat doit encore ensuite payer leurs retraites ! D’où l’idée de la prime à la casse qui peut être supprimée sans délai et qui de plus conduit les ménages à augmenter leurs dépenses. D’où les coups de pouce à l’investissement, si possible productif, mais surtout non renouvelable par nature.
Le gouvernement a pris une autre mesure, que je n’avais pas remarquée, mais dont j’ai vu l’application pratique chez un de mes clients : il a incité les décideurs publics à avancer leurs dépenses 2009 à budget égal. En clair, l’idée est de réaliser les achats prévus pour 2009 en avril plutôt qu’en novembre, en juillet plutôt qu’en janvier ou février 2010. Comme on le voit, il ne s’agit pas de dépenser plus, pour ne pas accroître les déficits, mais à dépenser plus tôt, pour contrebalancer les anticipations négatives des autres acteurs.
Cette action, assez typique me semble t-il de la politique de relance du gouvernement, répond bien aux remarques faites à l’encontre des plans de relance du passé, dont on a remarqué qu’ils étaient de fait mis en œuvre trop tard, qu’ils arrivaient en quelque sorte après la bataille, quand la reprise était déjà là.
On voit bien par contre le pari sur lequel elle repose : une reprise qui prend corps courant 2009 ou à la rigueur au tout début 2010. C’était le point de vue de l’INSEE dans sa note de conjoncture de décembre 2008, qui voyait la reprise s’amorcer au deuxième trimestre 2009 ou au deuxième semestre. Il est vrai que cette note sous estimait fortement la récession, et que la note de mars 2009 l’a corrigée sur ce point.
Justifier une relance plus vigoureuse avec des dépenses plus importantes, quitte à risquer une dérive durable des dépenses publiques, par l’idée que la reprise n’aura pas lieu en 2009 mais plus tard, pêche cependant par un point : si la reprise ne s’amorce pas d’ici fin 2009, malgré les milliards mis en œuvre et le niveau extrêmement faible des taux d’intérêt, ce sera parce qu’il y a autre chose qui bloque cette reprise, par exemple du coté des établissements bancaires (comme cela s’est passé au Japon). Dans ce cas, l’action a mener ne réside pas dans le volume des dépenses publiques mais dans les mesures visant à faire sauter ces points de blocage. On notera qu’il est d’usage d’estimer à 18 mois le temps pour qu’une baisse des taux d’intérêts donne tout ces effets (je souligne le « tout »)
Mais on peut aller plus loin et se demander si la relance décidée par les USA, qui se monte à 800 milliards de dollars environ, est bien adaptée ! Si le dollar n’était pas la monnaie réserve du monde, il y a longtemps que les USA auraient du faire appel au FMI et présenter un plan de redressement de leur balance commerciale et de réduction de leur déficit budgétaire. On peut estimer que le déséquilibre commercial entre la Chine et les USA est une des causes de la crise en cours. L’idéal serait que ce soit la Chine qui relance massivement ses dépenses pour participer au rééquilibrage nécessaire. On peut en dire autant d’autres pays émergents, qui financent de fait les dépenses des riches des pays développés !
A cette aune, la meilleure nouvelle pour l’économie mondiale est la relance massive décidée par le gouvernement chinois, relance dont on ne sait dans quelle mesure elle est vraiment mis en œuvre . Mais la Chine a aussi à faire des efforts considérables pour mieux utiliser ses ressources : on sait l’impact qu’a sa croissance sur le prix des matières premières et sur la pollution dans le pays
Tout cela fonctionne comme un système, où tout réagit sur tout : c’est ce qui fait que c’est compliqué !
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