Sauver des emplois c’est apparemment bien, mais raisonner en emplois sauvés a-t-il un sens dans une économie qui fonctionne comme un système ? Une action menée ici pour sauver tel emploi ne conduit elle pas à en détruire d’autres à côté ? Pourquoi l’emploi diminue ou augmente-t-il ?
Un de mes professeurs expliquait que la France a massivement subventionné la marine à voile concurrencée par l’arrivée de la marine à vapeur. Deux siècles plus tard, cela parait stupide, mais ne faisons-nous pas la même chose tous les jours ?
11 250 emplois dans 91 entreprises sauvés par les services de l’Etat sur quelques mois, cela parait très peu au regard des 500 000 entrées mensuelles à Pôle emploi ou des 8 millions de sorties annuelles de l’emploi dans le seul secteur concurrentiel (hors société d’intérim).
Le discours médiatique se focalise sur les licenciements économiques qui ne représentent pourtant qu’entre 1 et 3% des sorties de l’emploi selon qu’on se fie à l’enquête sur les mouvements de main d’œuvre ou aux statistiques de Pôle emploi. Et encore, ce sont les plans dans les entreprises grandes ou moyennes qui font la une de l’actualité, alors que le taux de licenciement économique pour cent salariés est quatre fois plus élevé dans les entreprises de moins de 10 salariés que dans les entreprises de plus de 50 salariés !
La fermeture des hauts fourneaux de Florange est-elle la conséquence d’une mauvaise gestion de la part du gouvernement actuel ou du précédent, celle de la vente au groupe Mittal, ou ne peut-on pas y voir une lointaine conséquence des investissements de Fos et de Dunkerque, quand il paraissait plus judicieux d’investir près des ports d’importation du charbon et du fer que dans une Lorraine dont les gisements de fer et de charbon étaient en train de s’épuiser ?
Il y a quelques jours, j’entendais une jeune femme spécialiste des liens entre droit et économie, affirmer qu’il n’y aurait pas en France d’équivalent de Google ou Micro soft sans changement de la loi qui favorise les actionnaires par rapport aux créanciers en cas de difficultés et incite donc les banques â être très prudentes dans leurs prêts.
Christian Blanc a expliqué dans « l’écosystème de la croissance » qu’il fallait, pour doper la croissance, permettre aux entreprises et aux milieux de la recherche de travailler ensemble grâce à une forte proximité géographique.
Toutes les études de l’OCDE montrent que le fonctionnement du marché du travail est un élément clé de la création nette d’emploi. On connaît aussi les conséquences négatives des mesures protectionnistes sur l’emploi dans des professions réglementées comme les chauffeurs de taxi par exemple. On sait aussi que le niveau élevé du SMIC par rapport au salaire médian explique en partie le chômage élevé chez les non ou peu qualifiés.
J’alertais il y a quelques semaines sur les conséquences potentiellement dramatiques pour la survie ou l’investissement des entreprises du niveau actuel du partage de la valeur ajoutée : il semble que le rapport Gallois envisage un « choc de compétitivité « de 30 milliards d’euros par an en faveur des entreprises.
Le gouvernement s’apprête à regroupe des organismes existants (comme OSEO) dans une banque publique d’investissement au capital de plus de 40 milliards, dont tout le monde craint qu’ils ne soient utiliser à mauvaise escient et dans une logique court-termiste, sous la pression des politiques locaux : comment garantir qu’on ne l’engloutira pas dans des entreprises condamnées par les réalités du marché, comme Pétroplus par exemple ?
L’économie et le marché du travail fonctionnent dans une logique systémique quand la plupart des Français raisonnent sur le sujet dans une logique cause effet et sans prendre en compte la multiplicité des conséquences en cascade d’une décision. Ce que je constatais il y a quelques jours sur l’évolution du taux d’activité des seniors va à l’encontre de toutes les idées reçues sur l’emploi, idées que malheureusement beaucoup de responsables politiques encouragent, et probablement partagent !
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