Le nombre de seniors en activité a augmenté de près d’un million, mais 100 000 d’entre eux sont au chômage : ces quelques mots que j’ai lu rapidement sur un gratuit au cours de cette semaine m’ont intrigué et j’ai voulu aller voir sur quel intervalle s’était faite cette augmentation et si l’augmentation du chômage s’expliquait par la disparition de la dispense de recherche d’emploi.
Comme je pouvais m’en douter, le gratuit n’avait pas tiré l’information de son chapeau, mais de la publication du numéro 1415 d’INSEE première, intitulé « Une photographie du marché du travail en 2011 ». Le « TABLEAU DE BORD TRIMESTRIEL ACTIVITE DES SENIORS ET POLITIQUES D’EMPLOI » publié par la DARES en mars 2012 va nous donner des renseignements complémentaires, notamment sur l’évolution des dispenses de recherche d’emploi.
Depuis 2005, la population active a augmenté d’un peu plus d’un million de personnes. L’INSEE insiste sur le fait que cette évolution concerne plus les femmes ( + 680 000 actives en 6 ans, contre +340 000 pour les hommes mais note tout de suite après que les actifs de 50 à 64 ans ont augmenté de 970 000. Une petite part de cette croissance est due au papy boom (les personnes de 64 ans en 2005 était nées en 1941, avant le baby boom) mais l'essentiel doit surtout à l’augmentation du taux d’activité des seniors.
Le graphique 1 de notre tableau trimestriel montre en effet que ce que la DARES appelle le taux d’emploi sous-jacent (calculé pour effacer l’impact des fortes évolutions du nombre de naissances dans les années 40) connait une nette augmentation depuis 2006 (elle était plus faible avant). Il est remarquable que la croissance de ce taux n’a pas changé malgré la crise : le point bas du chômage observé en 2008 n’a pas d’impact sur cette courbe, qui est le résultat des politiques visant à augmenter ce taux, notamment à travers les diverses lois et autres mesures concernant les retraites. Au total, le taux d’emploi des 55/64 ans aura augmenté de 8% sur 5 ans. Il devrait continuer à augmenter les prochaines années.
Ce n’est pas sur le taux d’activité que la conjoncture a un effet, mais bien sur le taux de chômage (les chômeurs sont comptés comme des actifs). En 2011, le taux de chômage atteint 464 000 seniors (de 50 ans ou plus) soit 6.3% des actifs de cette catégorie (contre un taux de 9.2% pour l’ensemble des actifs).
Un encart du numéro d’INSEE première est titré « Depuis 2008, une hausse inédite du chômage chez les plus âgés ». On y apprend que le taux de chômage des 55/64 ans est passé de 4.6% en 2008 à 6.5% en 2011, tout en restant plus faible que celui de l’ensemble. Il note qu’eune des raisons de l’augmentation du taux d’activité est le durcissement des conditions de dispense de recherche d’emploi.
La dispense de recherche d’emploi permettait à des chômeurs d’au moins 57 ans de ne plus chercher un nouvel emploi, mais du coup diminuait d’autant les statistiques du chômage. Et pas qu’un peu : comme je le notais dans un article de juin 2007, cela concernait 412 300 personnes soit environ 20% des 57/59 ans ! Supprimer cette dispense, c’était courir théoriquement le risque d’une augmentation de 400 000 du nombre de chômeurs !
Le tableau 4 du tableau trimestriel, nous apprend que sur 865 300 chômeurs de plus de 50 ans, dans les 3 catégories A, B et C (donc incluant notamment des salariés à temps partiel souhaitant travailler plus)il s’en trouve 460 500 de plus de 55 ans, donc un peu plus de la moitié.
Mais c’est au graphique 10 qu’il faut s’intéresser : il montre l’évolution de la dispense de recherche d’emploi : près de 160 000 en 2007. Cette année-là le stock se situait donc à un peu au-dessus de 400 000, donc les bénéficiaires y restent en moyenne un peu plus de 2.5 ans. En 2008, il y a encore près de 120 000 entrées, mais seulement 80 000 en 2009, 60 000 en 2010 et 30 000 en 2011. Au total, le tableau 1 nous apprend qu’il y en a un « stock » de 160 690 en 2011. Soit 250 000 de moins qu’en 2007. A comparer à une augmentation de 100 000 du nombre de chômeurs âgés, et pendant une période de forte hausse du chômage global. Qui aurait parié sur un tel résultat au moment de la suppression (progressive) de la mesure en 2008 ?
On lira avec intérêt l’ensemble des deux documents, par exemple pour y apprendre que 2 hommes sur 3 et 7 femmes sur 8 travaillent dans le tertiaire !
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