Défendre une cause légitime ne justifie pas en soi d’utiliser des moyens illégitimes, par exemple au détriment de la présomption d’innocence : les étudiants en droit de Cambridge qui manifestent contre la venue de DSK pour une conférence devraient le savoir. Mais l’actualité donne d’autres exemples de volonté d’imposer le « tribunal du peuple ».
L'association estudiantine de l'université de Cambridge a invité l'ancien patron du FMI à venir exposer ses vues sur "l'état de l'économie mondiale". Si la soirée semble avoir fait le plein, elle a aussi suscité la colère de certains étudiants et provoqué la venue de Douglas Wigdor, avocat de la femme de chambre Nafissatou Diallo.
Celui-ci a déclaré aux nombreux journalistes présents : "Pourquoi la 'Cambridge Union' ouvrirait-elle ses portes à un homme qui a été accusé d'utiliser ses pouvoirs d'ancien chef du FMI pour agresser sexuellement une femme et qui est maintenant impliqué dans un scandale lié à la prostitution. Qu'on lui donne ici une tribune pour s'exprimer est un affront à toutes les victimes d'agression sexuelle".
L’avocat fait ici fi de la présomption d’innocence comme de la force de la chose jugée. Quoi qu’on pense de l’ex favori de la présidentielle, les poursuites contre lui ont été abandonnées aussi bien dans la procédure pénale à New York que dans l’affaire Tristane Banon à Paris. Je n’avais d’ailleurs pas compris que DSK avait utilisé " ses pouvoirs d'ancien chef du FMI dans l’affaire de New York. En fait l’avocat essaie simplement de faire flèche de tous bois !
Les étudiantes qui se sont opposées à sa venue ont voulue défendre la cause féminine : fallait-il le faire au détriment de la présomption d’innocence ou de la force de la chose jugée ?
L’actualité, c’est aussi l’affaire AZF. Dans ce dossier, on n’a en réalité toujours pas compris ce qui s’était passé et la cause réelle de la catastrophe. Mais l’opinion publique ne peut admettre que ceux qu’elle juge responsables (les patrons et propriétaires de l’usine ne soient pas condamnés. Alors l’avocat général défend une motion mi-figue mi-raisin qui ne satisfera de toutes manières personne. La défense demande la relaxe en arguant de l’impossibilité de l’hypothèse chimique.
J’ai déjà dit que cette histoire me ramenait plus de 30 ans en arrière, à la catastrophe de Liévin qui fit 43 morts parmi les mineurs du 27 décembre 1974. A l’époque, il n’avait pas été possible d’identifier d’où venait l’énergie qui avait fait exploser le grisou. Quelques années plus tard, un accident survenu au siège 3 de Courrières a montré que le démarrage des trolleys dans les galeries principales générait des courants vagabonds qui pouvaient provoquer des étincelles à des kilomètres de là. Il a alors été observé que plusieurs catastrophes précédentes inexpliquées avaient eu lieu en début de poste, au moment du démarrage des trolleys.
Le procès de la catastrophe de Liévin avait eu lieu entretemps. La condamnation de la direction était nécessaire pour que les ayants droits des mineurs décédés puissent bénéficier de dédommagements importants. Un autre enjeu était bien sûr le « plus jamais çà » mais je ne suis pas sûr que le procès d’AZF contribuera à éviter une nouvelle catastrophe…
C’était ma journée « défense des grands patrons » au nom du droit applicable à tous !
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