En proposant de donner aux victimes un droit d'appel pour les décisions des cours d'assises, pour la détention provisoire et l'exécution des peines, le président sortant a franchi la ligne rouge, sa proposition faisant fi des bases de l’Etat de droit, qui substitue l’Etat à la victime pour poursuivre les faits et substitue la sanction et/ ou la réparation à la notion de vengeance.
Une première base de l’Etat de droit est en effet que l’Etat considère que le crime ou le délit va non seulement contre la victime mais aussi contre la société : c’est donc au nom de la société et non au nom des victimes que le procureur demandera telle sanction et c’est au nom de la société que les magistrats prononceront la sanction.
Pour tous ceux qui ont découvert avec René Girard la notion de violence réciproque, il est facile de comprendre que cette conception est la seule qui permette de stopper le cycle infernal de la vendetta. A partir du moment où c’est l’Etat qui juge au nom de la société et non de la victime, le condamné tournera contre la société et non contre les plaignants son éventuel désir de vengeance. Cette pratique est donc aussi une protection des plaignants.
Une deuxième base de l’Etat de droit consiste à définir des règles universelles, un système qui fait dépendre la sanction de la gravité des faits accomplis mais pas du niveau de colère ou de la capacité de pardon de la victime. Quand Hammourabi défini le premier code pénal, quand Israël pose les bases de la loi du talion, ils ne font pas dépendre la peine de la volonté de la victime ni même de son statut.
J’ai déjà écrit qu’aucune des promesses faites à partir de la semaine dernière n’a vocation à être mise en œuvre, cette idée du droit d’appel de la victime pas plus qu’une autre. J’imagine qu’elle ne tiendrait pas la route face au conseil constitutionnel ou à la cour européenne. Mais le candidat UMP ne se grandit pas en sortant à ce point des règles de base de la démocratie.
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