L’Eglise de France a relancé le diaconat permanent depuis le concile Vatican II. Il y en a aujourd’hui environ 2500 dans notre pays. L’arrivée à la retraite de nombre d’entre eux, dans un contexte de réduction rapide du nombre de prêtres de moins de 65 ans, repose la question de la mission qui leur est confiée.
Vatican II a rétabli un rôle qui avait disparu depuis un millénaire environ, celui des diacres permanents. Le terme de permanent fait opposition à la situation de séminaristes pour qui le diaconat est un état dans lequel ils sont ordonnés (ils restent toujours diacres) et ce quelques mois avant une nouvelle ordination en tant que prêtre. Le rôle de diacre apparaît aux tous premiers temps de l’Eglise : dans les Actes des apôtres, on voit ceux-ci désigner au sein de la communauté sept hommes «de bonne réputation, remplis de l’Esprit et de sagesse» pour prendre en charge les questions pratiques et les décharger des taches matérielles, et à qui ils confièrent pour mission le soutien des pauvres
Le diaconat s’est implanté progressivement ces dernières décennies, comme me l’a expliqué un de mes amis, diacre dans le diocèse d’Arras. Dans la région Nord, on vient de célébrer l’ordination du premier diacre il y a 40 ans. La pratique s’est ensuite développée dans les années 80. Aujourd’hui, dans le diocèse d’Arras, il y a 48 diacres. Ils ont 60 ans en moyenne et sont ordonnés toujours en moyenne depuis 12 ans. Dans le même diocèse, les prêtres qui étaient environ 450 il y a dix ans, ne sont plus que 250, dont près de 60% ont plus de 75 ans. Parmi les moins de 65 ans, on compte aujourd’hui 48 prêtres et 40 diacres.
Les diacres sont des hommes (à quand le retour des diaconesses, comme dans certaines églises protestantes ?). Sauf s’ils sont célibataires et s’engagent à le rester, ils doivent avoir au moins 35 ans et dix ans de mariage : ils sont choisis parmi des adultes confirmés, qui ont déjà pris des responsabilités d’une manière ou d’une autre au sein de l’Eglise ou dans leur environnement personnel.
La pratique dominante est de leur confier une mission de présence d’Eglise dans un milieu particulier, généralement leur milieu de travail. Ils peuvent célébrer les mariages et les baptêmes, et le font normalement pour répondre à une demande de leur entourage de mission (donc généralement professionnel) ou familial. Parfois cependant, ils ont une mission liturgique, par exemple dans une paroisse.
Le diocèse de Paris fait un peu exception dans le paysage, avec des cas de diacres non seulement permanents dans le sens qu’il ne s’agit pas d’une étape de parcours vers la prêtrise, mais permanent dans le sens de salariés à plein temps par l’Eglise : dans le cas le plus fréquent, le diacre est un bénévole au sein de l’Eglise, comme des centaines de milliers de laïcs. Il existe quelques évêques assez réticents face au développement du diaconat, mais il s’agit d’exceptions au sein de l’Eglise de France.
Le profil des diacres est extrêmement divers, que ce soit en âge, en parcours, en engagement personnel ou en activité professionnelle. Parmi les diacres on peut trouver aussi bien un professeur d’université qu’un ouvrier métallo ou un médecin. Le choix de la mission confiée au moment de l’ordination reflète d’ailleurs cette diversité des activités, des parcours et des centres d’intérêt.
Ces hommes qui interviennent dans leur milieu professionnel finissent par prendre leur retraite un jour, comme tous leurs collègues. La moitié des diacres du diocèse d’Arras, sont des (jeunes) retraités. Le passage à la retraite peut remettre en cause leur mission pour deux raisons : d’une part, ils n’ont plus la présence dans leur monde professionnel qui leur assurait des contacts journaliers dans ce milieu, d’autre part ils deviennent beaucoup plus disponibles, avec la fin de leurs 35 heures professionnelles hebdomadaires.
Avec la diminution du nombre de prêtres, la tentation est bien sûr forte de leur faire assumer non plus une présence d’Eglise dans leur milieu, mais un rôle centré sur la liturgie. Deux exemples pris parmi les proches de mon ami illustrent ce propos.
Le premier est en charge des enterrements dans sa paroisse. Il s’agit d’un rôle que tiennent aujourd’hui le plus souvent des laïcs. Sa mission consiste en une présence auprès de familles en deuil. Elle est de fait adaptée à son statut de retraité (la préparation et la réalisation de la cérémonie d’enterrement se réalise généralement aux heures de travail), mais rien ne la distingue de ce que fait un laïc.
Le second était surveillant de prison. Le règlement de l’administration pénitentiaire ne permet pas à un surveillant retraité d’entrer dans un établissement pénitentiaire, même comme visiteur de détenu. Il, fallait donc qu’il, change complètement sa mission. Il se trouve qu’il avait un intérêt particulier pour les aspects liturgiques. Il a donc pris en charge aujourd’hui une mission clairement liturgique « faisant le travail de trois curés » (mais il ne peut pas célébrer l’eucharistie).
Comme on le voit, les choix réalisés par les évêques pour la mission des diacres se font beaucoup au cas par cas. Il n’empêche qu’une évolution est en cours pour des raisons démographiques, mais que le sens de cette évolution est peut-être autant le résultat d’une multitude de choix pragmatiques que d’une orientation volontariste de la conférence des évêques
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