La fin de la récession envisagée pour le quatrième trimestre 2009 signifie t’elle sortie de crise ou étape provisoire vers une nouvelle rechute ? La réponse de Michel Rocard dans une tribune parue dans le Monde du 7 juillet est assez pessimiste. L’ancien premier ministre considère que les raisons qui entraînent les pays développés dans une croissance anémiée depuis 30 ans n’ont pas changé.
Après avoir constaté que grâce aux bonnes réactions des puissances publiques la crise financière est dernière nous, l’ancien premier ministre observe que les banquiers ont déjà repris leurs jeux comme si rien ne s’était passé et refusent tout ce qu’on voudrait leur imposer comme régulation contrôle et limites.
Il est vrai que la finance avait pris dans l’économie mondialisée une part insensée, avec un montant (lu où ?) de 8% du PIB, record historique qui aurait dû alerter : la finance non plus comme moyen de faire fonctionner la machine économique, mais rêvée comme un voire le moyen de créer de la richesse ! Rocard dénonce ce qu’il considère comme un choix des classes supérieures de « chercher la fortune par la finance plutôt que l’aisance par le travail ».
Il voit dans la montée de la précarité (qu’il chiffre entre 15 et 25%) la cause principale de la faiblesse de la croissance depuis 30 ans. Il fait ainsi semblant d’oublier que les 4,5 à 5 % de croissance des 30 glorieuses dans le monde développé s’expliquaient essentiellement par une logique de rattrapage en Europe et au Japon, logique qui explique les progrès ultérieurs rapides des 4 dragons puis de la Chine et maintenant de l’Inde.
Il reste aussi dans la croyance que c’est la consommation qui tire la croissance, quand bien même les précaires dont il parle ne représentent qu’une faible partie de cette consommation, quand bien même la consommation française n’a jamais faibli et quand bien même il déclare que c’est par l’investissement que le cycle vertueux doit être réamorcé.
Je partage d’autant plus cette dernière remarque que la chute du PIB s’explique en grande partie par celle de l’investissement et par un déstockage massif. Ceci dit, les anticipations de croissance limitée ne peuvent tirer l’investissement de capacité : c’est l’investissement d’innovation qui doit tirer l’économie, ce qui suppose des efforts massifs dans la recherche et le développement. On le dit depuis presque 10 ans avec la stratégie de Lisbonne, peut être serait il temps de s’y mettre !
A noter aussi que la faible croissance des 30 dernières années s’explique aussi par de faibles progrès de productivité, malgré ceux importants dans l’industrie. Il est vrai que les gains de productivité dans les services sont à priori moins rapides. Mais on notera que les camarades de Michel Rocard ont tout fait pour empêcher les gains de productivité dans la fonction publique, qui représente aujourd’hui une part importante du PIB. On ne peut lui faire ce reproche : c’est un partisan déclaré de la modernisation de l’Etat.
Au final, l’ancien premier ministre nous annonce une reprise timide et une rechute dans quelques années, les mêmes causes produisant les mêmes effets. J’espère bien sûr qu’il se trompe. Je ne crois guère cependant la social démocratie à jour pour proposer une alternative efficace : je m’en suis déjà expliqué, déjà en réaction à un papier de celui qui reste pour moi un des meilleurs penseurs politiques, un des rares qui semble prendre le temps de réfléchir.
A long terme, il me semble cependant que les évolutions démographiques sur le vieux continent ne sont guère compatibles avec une croissance dynamique.
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