Le gouvernement supprime les bourses au mérite, instituées par Lionel Jospin et réservées aux boursiers ayant eu mention très bien au bac. Geneviève Fioraso justifie cette décision parce que, si le nombre de mentions très bien a augmenté fortement en quinze ans, la part de boursiers n’a pas bougé et donc « que cette bourse n’a pas eu d’effet levier ».
Je n’ai pas vraiment d’avis sur l’existence de cette bourse créée par la gauche et que certains à droite veulent maintenant défendre becs et ongles. J’en ai par contre sur l’argument de la secrétaire d’Etat, qui correspond à une idée très fréquente chez les patrons : je trouve qu’il renvoie à une illusion sur les ressorts de la motivation au travail.
Dans le cas de la bourse au mérite, versée pendant les années d’études supérieures si les résultats sont bons, je pensais naïvement qu’elle avait pour objectif de multiplier les chances de réussite pour les élèves mesurés par les épreuves du bac comme les meilleurs. Apparemment, pour Geneviève Fioraso (relayée par le Monde), l’objectif était de donner envie aux élèves de lycée de bien travailler pour atteindre le 16 de moyenne qui donne aujourd’hui la mention très bien à 12% des bacheliers (contre 3% au moment de la création de la bourse). Dans mon hypothèse, je vois bien pourquoi elle est réservée aux boursiers, dans la sienne, je ne vois plus !
Dans le monde de l’entreprise, le salaire variable est très à la mode, au moins pour les cadres. Les directions consacrent beaucoup d’énergie à la fixation des critères d’attribution de ces variables, l’idée générale est que cela permet d’orienter les efforts des cadres concernés. Je suis extrêmement sceptique sur l’efficacité de cette volonté de pilotage des efforts, qui renvoie çà une vision très simpliste des sources de motivation. Je constate par contre au quotidien deux effets pervers de ce genre de dispositif : d’abord la démotivation de ceux qui n’ont pas eu tout ou partie de leur variable et pensent (à tort ou raison) que leur non atteinte des objectifs fixés ne vient pas d’eux (les objectifs étaient inatteignables depuis le début, les produits n’étaient pas bons, le contexte économique n’était pas favorable…. Ensuite, les objectifs individuels sont facteurs de non coopération au sein de l’entreprise, si on ne met pas en place des contre feux (ce que je vois rarement).
En réalité, le versement d’un variable n’est pas un moyen de « piloter » les salariés comme s’ils étaient des moutons, mais un moyen de reconnaître les efforts et les réussites. Il n’y a aucun doute sur le fait que la reconnaissance (pas seulement financière d’ailleurs) est un élément essentiel de motivation : de nombreuses études l’ont montré.
Il en est de même pour les élèves : reconnaître les efforts (par une mention ou par une bourse) est un moyen (parmi plein d’autres !) pour renforcer la motivation. Cette reconnaissance peut être un objectif pour certains, mais généralement pour ceux qui ont déjà été récompensés dans une étape précédente : la promesse n’est crédible que si on a fait la preuve précédemment qu’elle était tenue.
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