Régulièrement, la question des 35 heures revient sur le tapis de l’actualité, pour très peu de temps d’ailleurs. Cette fois, c’est le nouveau ministre de l’économie qui a évoqué l’idée d’une remise en cause. A gauche, pourtant, il en reste pour rêver de lutter contre le chômage par une nouvelle et forte réduction du temps de travail.
La revue Sciences Humaines consacre son dernier « grands dossiers » au changement du travail, avec « 20 pistes pour améliorer la qualité de vie au travail ». Les deux derniers contributeurs, le journaliste Denis Clerc et la sociologue Dominique Meda ont ainsi l’occasion de prôner la réduction du temps de travail, une idée assez ancienne chez tous les deux. Sur le papier, cela semble assez simple, pour arriver à une baisse de 6 heures par mois pour le premier et un passage à 32 heures « pour tous » pour la seconde.
Ailleurs, l’un des fondateurs de Nouvelle Donne, le petit parti qui prétend prendre la place du PS, Pierre Larrouturou, prône lui aussi la réduction du temps de travail comme moyen de réduire le chômage. Il est vrai qu’il le dit depuis plus de 15 ans…
Ce qui m’étonne toujours, c’est que l’on puisse imaginer des solutions aussi globales (même si Denis Clerc fait un effort pour penser l’adaptation terrain) dans un domaine où les situations sont très variables d’une entreprise et les demandes et besoins des salariés également !
On peut cependant rappeler les principaux problèmes rencontrés lors des 35 heures :
D’abord les difficultés rencontrés dans les métiers en tension, en faitr essentiellement dans le secteur de la santé où l’on constate toujours, 15 ans après, une pénurie de médecins et d’infirmières, qui conduit à multiplier les heures supplémentaires.
Ensuite, le problème à mon avis le plus grave, l’impact sur l’emploi des moins qualifiés. Dans les années 80, les études des économistes ont montré que le ratio entre le SMIC et les salaires médian ou moyen était particulièrement élevé en France et que cette situation avait un impact très négatif sur le taux d’emploi des moins qualifiés. Dans les années 90, la droite et la gauche ont baissé les cotisations patronales sur les plus bas salaires (jusque 1.3 fois le SMIC je crois), avec un effet sans contexte sur l’emploi non qualifié qui s’est mis à croitre pour la première fois depuis des décennies : en quelques années, on a créé environ 300 000 emplois.
Malheureusement, pour éviter que les 35 heures se traduisent par un affaiblissement du pouvoir d’achat chez les plus bas salaires ou des faillites des entreprises les plus fragiles, le gouvernement Jospin a promis pour les plus bas salaires « 35h payées 39 » et a compenser le surcoût pour les entreprises par une baisse des charges sur les salaires jusqu’à 1.6 SMIC. La baisse des charges utilisées pour les 35 heures n’a pas pu l’être pour l’emploi des moins qualifiés. Par ailleurs, il bien fallu augmenter le SMIC horaire de plus de 11%, augmentant ainsi le ratio avec le salaire médian.
Contrairement aux deux problèmes ci-dessus qui sont très bien documentés, le troisième problème est plus un soupçon de ma part : la passage aux 35 heures a contribué à l’inflation (même si celle si est restée limitée) et a mis fin à la politique de désinflation compétitive. Dans ce sens, elles ont participé à la perte de compétitivité de notre pays vis-à-vis de l’Allemagne.
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