Le dernier classement PISA publié en 2013 montre non seulement que le classement de la France au sein de la communauté internationale est médiocre au regard de son niveau de richesse, mais aussi que son niveau serait en train de baisser en valeur absolue. Une partie des élèves n’aurait tout simplement pas les compétences de base pour leur assurer demain un avenir professionnel.
Cela fait au moins 10 ans que je pense qu’il y a un problème (je suis loin d’être le seul), notamment en raison de ce que je peux observer du taux de chômage sur les peu qualifiés. On peut certes réduire ce chômage en baissant la valeur relative du SMIC, mais il faut bien sûr dans un même temps réduire la part des non qualifiés.
Le Monde a publié au début du mois une série d’articles sur le sujet, par exemple le 4 février en abordant la question de l’illettrisme et de l’enseignement de la lecture, et le 5 en abordant cette fois l’enseignement des mathématiques. De ces deux articles, il ressort qu’il n’y a pas de fatalité aux mauvais résultats (dont le journal souligne qu’ils affectent directement les enfants issus des milieux les moins favorisés). Il existe des solutions (le fait que des pays fassent mieux que nous pouvait le laisser supposer), le journal en donne des exemples, et c’est beaucoup plus une question de méthode que de moyens.
Il n’est pas sûr que ce diagnostic soit partagé, en premier lieu par les premiers concernés, ceux qui ont et auront à changer leur organisation et leur pratique, le personnel de l’éducation national, quelle que soit la bonne volonté voire le dévouement dont ils peuvent faire preuve.
Il se trouve que j’ai parmi mes proches un inspecteur général de l’Education Nationale, issu de la filière technique, et qui m’a toujours paru excellent dans son domaine. J’ai souvent discuté de ces sujets avec lui , et encore il y a quelques jours.
Alors que mon sentiment est que l’échec scolaire se joue en primaire, lui pense qu’il se joue au moment du passage du primaire au collège (les deux ne sont pas incompatibles), le passage d’un seul professeur à une dizaine désorientant fortement les élèves, en particulier ceux en déjà en difficulté ou manquant de soutien familial. Il regrette le choix qui a été fait à la fin des années soixante, quand le passage à la scolarité obligatoire à 16 ans a obligé à revoir le système pour arriver à la création du collège unique. Au départ, ce collège devait être le prolongement évolué du primaire, avec le corps de PEGC issus du primaire et qui devaient enseigner deux matières, ce qui limitait le nombre de professeurs pour une même classe. L’orientation s’est faite sur un modèle copié du lycée (notamment pour des raisons de pure lutte interne entre les courants syndicaux au sein de la FEN) qui n’était adapté que pour les meilleurs élèves.
Il pense par ailleurs que le corps des responsables d’établissements est malheureusement d’une qualité très insuffisante (il y a aussi des très bons évidemment). Le pire est que même les incapables peuvent faire de belles carrières et finir par piloter des établissements prestigieux, à condition de savoir jouer les bonnes cartes (notamment syndicales). Et pourtant les compétences s’observent facilement, notamment avec les résultats : il ne faut pas longtemps pour dégrader un établissement (heureusement également pour le redresser).
Je suis convaincu que notre pays doit remettre en cause la part prépondérante qu’il donne à l’enseignement vertical (c’est-à-dire descendant de l’enseignant vers l’élève qui est prié d’écouter et de retenir) au détriment d’un enseignement plus horizontal (qui fait intervenir les élèves seuls ou à plusieurs), solution pratiquée par presque tous les autres pays dans le monde. A l’heure des réseaux sociaux, quand la vie professionnelle fait de plus en plus appel à des compétences relationnelles, organisationnelles ou comportementales, il est urgent de changer notre système. Sa réponse ne conduit pas à l’optimisme : les enseignants bloquent et la plupart des inspecteurs généraux hors enseignement technique sont contre.
Tout cela ne rend pas très optimiste sur le sujet : jusqu’à quel niveau de dégradation faudra-t-il aller pour qu’il y ait enfin une prise de conscience partagée ?
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