Plusieurs personnalités politiques ont publié l’état de leur patrimoine à la suite de l’affaire Cahuzac, qui n’est pourtant pas une affaire de publication du patrimoine mais de dissimulation d’une partie de celui-ci au fisc. Les premières déclarations montrent l’attrait prioritaire pour la pierre et la prudence des plus riches qui ne se sont pas exprimés pour l’instant.
Si Jérôme Cahuzac avait publié son patrimoine dans la presse au moment où il a été nommé ministre, on aurait certainement appris qu’il avait un patrimoine confortable, mais pas qu’il avait un compte secret en Suisse, ce qui est pourtant ce qui l’a fait tomber : publier les patrimoines ne va rien changer au problème de fraude fiscale.
Par contre, cela risque de révéler qu’une partie non négligeable de nos élus est suffisamment riche pour être assujetti à l’ISF, y compris dans les rangs de la gauche. Dans un contexte économique et social très difficile pour les Français, cela ne peut que renforcer une méfiance déjà très forte vis-à-vis du personnel politique. Mais peut-être faut-il passer par là : après tout, c’est le moment de la révélation qui est difficile, dans 5 ou 10 ans cela ne sera plus une question.
L’indemnité des députés étant calculée en référence à la rémunération des plus hauts fonctionnaires(la moyenne du traitement le plus bas et du traitement le plus haut des fonctionnaires de la catégorie « hors échelle »), il n’est pas surprenant que des députés de longue date aient un patrimoine relativement important. Comme il s’agit pour la plupart de personnes ayant fait des études supérieures longues, ils ont pu bénéficier de revenus assez élevés avant d’être députés.
Pour savoir si on a affaire à des paniers percés, des personnes pour qui « un sou est un sou » ou s’étonner du montant élevé atteint, le mieux est d’essayer d’estimer à quel patrimoine on devrait s’attendre en moyenne.
Un député bénéficie de plusieurs indemnités (base, résidence et fonction). Après retenues (cotisations sociales) le total donne en net 5148.77€ par mois. S’il cumule sa fonction avec des mandats locaux (le cas le plus fréquent, en particulier pour les principaux leaders), les indemnités correspondantes sont écrêtées au maximum de 2 757,34 € par mois. Enfin, les cotisations à la caisse des pensions ne sont versées que pendant les 15 premières années de mandats : au-delà, les députés économisent 1299 € de cotisations. Nous ne prendrons pas en compte ici l’indemnité représentative de frais de mandat. Au 1er janvier 2013, le montant mensuel de cette indemnité est de 5 770 € brut.
Le taux d’épargne des Français se situe selon les années entre 15 % et 18 %, dont la plus grande partie va à l’achat de la résidence principale et à l’assurance vie. Pour des revenus nettement plus élevé que la moyenne, on pourra s’attendre à une épargne de 20 %.
Pour un revenu annuel de 7906 € par 12 soit 94 872 €, cela fait donc une épargne de 18 974 € par an.
Au bout de 20 ans, un homme politique ayant un mandat de député et des mandats locaux avec indemnités plafonnées aurait épargné en moyenne 379 480 €
Ce montant est l’un des constitutifs de son patrimoine : il peut avoir hérité de ses parents (Alain Juppé a ainsi une maison familiale), il peut avoir eu un revenu supérieur avant que le cumul ne soit plafonné. S’il a acheté un logement avant la fin des années 90, celui-ci aura pris de la valeur (doublement voire triplement selon les régions). Son patrimoine dépend aussi du revenu de son conjoint et du nombre de personnes à charge.
François Fillon qui déclare un patrimoine de 750 000 € environ minore probablement la valeur de son logement qu’il voit avoir gagné seulement 50% en 20 ans (il est vrai qu’il y a eu une baisse de 1992 à 1997). Mais ses 5 enfants peuvent expliquer qu’il ait eu un taux d’épargne plus faible que la moyenne. On peut cependant se demander ce qu’il a fait de ses revenus depuis 20 ans dont une dizaine comme ministre.
Pour chaque personne, en fonction de son âge et de patrimoine déclaré, on pourra ainsi estimer s’il est plutôt économe…ou pas !
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