On commence enfin à lire des interventions qui posent les bonnes questions à partir du projet de loi sur le mariage pour tous, non pour le refuser, mais pour s’interroger sur le sujet que traitait jusqu’il y a peu le mariage, celui de la filiation. Ce week-end c’était Sylviane Agacinski qui s’exprimait dans le Monde sur ce thème.
La philosophe et compagne de Lionel Jospin distingue ce qu’elle appelle l’ancien mariage et le mariage moderne. On ne dira jamais assez que ceux qui s’opposent au mariage pour tous, s’ils ont tout à fait le droit d’être attachés à la conception ancienne du mariage, ont le tort de ne pas voir que celui-ci n’est plus la norme dans la société quand 56 % des enfants naissent hors mariage
Comme Nathalie Heinich la semaine passée, Sylviane Agacinski met au cœur du problème la question de la filiation. Elle note que le principal effet de ce qu’elle appelle l’ancien mariage, était la présomption de paternité de l’époux. Présomption qui n’a pas de sens pour un couple du même sexe.
On peut contester le slogan des manifestants du 13 janvier prétendant que pour éduquer un enfant, il faut un père et une mère, mais la réalité biologique reste que pour engendrer un enfant, il faut un ovocyte provenant d’une femme et un spermatozoïde provenant d’un homme. Il faut aussi un utérus féminin, réalité qui sépare radicalement la situation des couples homosexuels féminins des couples homosexuels masculins.
En titrant sa tribune « Deux mères = un père ? », la philosophe attire l’attention sur la même question que la sociologue, celle du risque de déni de la différence sexuelle et des principes de la génération sexuée. Rappelons que la génération sexuée, à l’inverse du système de la parthénogenèse, fait que l’enfant n’est pas la reproduction exacte de son ancêtre, mais une combinaison nouvelle des caractères hérités des deux parents. La philosophe rappelle ce que disait déjà la sociologue, à savoir ce besoin de chaque personne de savoir d’où elle vient.
Les évolutions de la société font que beaucoup d’adultes se retrouvent avec un rôle éducatif vis-à-vis d’un enfant de leur conjoint, enfant qui n’est pas biologiquement le leur. Ce rôle n’est pas officiellement reconnu, ce qui pose des problèmes pratiques, auxquels il serait bon de trouver une solution, sans pour autant attenter aux droits et devoirs du parent biologique. Cette question se pose dans les familles recomposées, indépendamment du fait que le nouveau couple soit homo ou hétéro sexuel. On doit pouvoir y trouver une réponse sans pour autant entrer dans le déni de ce qui a permis d’engendrer l’enfant ou de la différenciation sexuelle, dont la philosophe rappelle justement qu’il s’agit d’une tentation de certains militants de la cause homosexuelle.
Ma fille a une collègue lesbienne, vivant avec une femme d’origine antillaise si j’ai bien compris, laquelle a déjà un enfant qui se trouve être métis, le père étant blanc. La collègue de ma fille souhaite profiter d’une PMA et a demandé le sperme d’un homme de couleur noire. On voit bien le souhait d’élever ensemble des enfants qui se ressemblent. J’ose espérer que ce désir légitime ne cache pas un désir (peut-être seulement inconscient) de faire croire à l’enfant qu’il a été engendré, au moins symboliquement, par les deux femmes. Il est vrai qu’aucune loi ne pourra jamais faire que des couples aient ou non un comportement raisonnable !
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