Recevant une délégation du DAL qui venait de manifester, Cécile Duflot « n'a pas exclut » d’appliquer la loi de réquisition de logements vacants. Le DAL parle de près de 2.5 millions de logements laissés vacants « très souvent pour des raisons de spéculation ». En fait, la hausse du nombre de logements vacants est le résultat d’une bonne nouvelle : la parc a augmenté plus vite que la population depuis 10 ans.
L’idée que les logements sont laissés vacants essentiellement pour cause de spéculation est évidemment un mythe, mis en avant par pure idéologie, mais qui ne résiste pas à l’observation des faits et à la lecture de toutes les notes de l’INSEE sur le sujet. On devrait d’ailleurs s'en douter quand on sait que le parc HLM connait aussi une vacance non négligeable, mais très variable selon le taux de rotation des logements, leur état …et la qualité de la gestion ! Mais pour le DAL, sans doute n’existe-t-il pas de logements vides entre le moment de la sortie d’un occupant et l’arrivée du suivant, ni de travaux importants à réaliser pour remise à niveau !
Comme je l’avais déjà expliqué de manière détaillée dans deux articles parus en janvier 2007 et qui s’appuyaient notamment sur une étude d’un ministère du logement parue en 2006, le parc de logements vacants se réparti à peu près à part égale entre une vacance frictionnelle, liée au temps de passage d’un propriétaire ou d’un locataire à un autre (durée estimée à 3.7 mois environ à l’époque) et une vacance structurelle, liée au besoin de réaliser des travaux ou à un problème familial (par exemple une personne âgée partie en maison de santé sans qu’on sache si c’est définitif ou une question de succession).
L’étude signalait aussi des vacances sans raisons précises. Il faut citer tout le paragraphe : « Enfin, peut exister une vacance correspondant à un désintérêt économique : propriétaires à hauts revenus ou faible valeur économique du bien, désintérêt pour s’occuper du logement et pas de souhait de l’occuper soi-même (par exemple logements reçus en héritage). Cette dernière vacance de « désintérêt économique » est assez limitée ».
Désintérêt économique : on est loin de la spéculation citée par le DAL !
Dans le portrait social de la France en 2011, l’INSEE a publié un tableau de l’évolution du parc de logements de 2001 à 2011. Sur la période, le parc total en milliers est passé de 29 329 à 32 877 (mais une autre publication de l’INSEE donne un total de 33.7 millions de logements…), soit une hausse de 3,5 millions de logements, ou de 12%. Comme, dans le même temps, le nombre d’habitants a augmenté d’environ 6%, le nombre de logements par habitant est en hausse. Ce qui permet aussi de répondre à la tendance structurelle de diminution de la taille des ménages.
Le même portrait social nous apprend en effet que la taille moyenne du logement est passée de 77 m2 en 1978 à 91 m2 en 2006, avec des ménages dont la taille est passée de 2.7 en 1984 à 2.3 en 2006. Les logements qui n’ont pas eau chaude, WC intérieurs et douche ou baignoire sont passés de 15% du total en 1984 à 1% en 2006
Au sein de ce parc, le nombre de résidences secondaires est passé, toujours en millier, de 2931 à 3137, soit une hausse de 7%. Le nombre de logements vacants, en diminution jusque 2005, est passé de 1977 à 2304 milliers, une hausse de plus de 16%.
Au début de cette année, l’INSEE a publié une étude faisant l’observation d’une « baisse significative de la vacance en Ile de France, la première depuis des décennies ». L’étude a analysé les évolutions par commune (et par arrondissements pour Paris), mettant en évidence de fortes disparités, qu’elle explique essentiellement par les caractéristiques locales de mobilité mais aussi de vétusté. Les écarts par rapport à cette explication générale permettent d’identifier des situations locales particulières, notamment liées à des opérations de construction.
L’étude portait sur la période 1999/ 2006 et notait que la baisse du nombre de logements vacants (passés de 409 500 à 329 000) était la conséquence des tensions sur le marché : entre 1999 et 2006, l’accroissement du parc de logements dans la région a été relativement faible (+ 4,5 %). Il a été deux fois moins élevé qu’en province et, pour la première fois depuis 40 ans, il a été inférieur à celui de la population (+ 5,3 %).
L’étude montrait en effet que la construction est en recul en Ile de France : 40 000 logements par an mis en chantier de 1982 à 1990, 37 000 de 1990 à 1999, 33 000 de 1999 à 2006. Soit une évolution inverse de ce qui se passe dans le reste du pays. Il est donc probable que le taux de vacance soit encore en diminution aujourd’hui en Ile de France, au rebours de ce qui se passe en France.
Cette situation particulière de l’Ile de France est notamment liée à un déficit de terrains à bâtir disponible. Pour contourner ce problème de foncier, le gouvernement avait décidé d’augmenter unilatéralement le coefficient d’occupation du sol autorisé. Le gouvernement actuel est revenu sur cette mesure et propose d’utiliser des terrains appartenant à l’Etat, aux collectivités territoriales ou à des entreprises publiques comme la SNCF.
Il existe une troisième solution, initiée également par le gouvernement précédent mais dans une perspective à long terme : dans le cadre du projet du Grand Paris en effet, il est prévu une densification forte de l’habitat à proximité des 72 nouvelles gares du futur métro périphérique.
Autre sujet d’inquiétude plus conjoncturel : j’ai entendu à la radio que le nombre de prêts accordés pour l’achat de logement a baissé de 30% par rapport à l’année dernière. Il n’est pas sûr que l’effort demandé au logement social (monter à 150 000 constructions par an), ne compense cette baisse.
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