Après avoir fait le tour des 12 engagements du programme de François Hollande que j’approuve peu ou prou, et en délaissant comme promis tous ceux pour lesquels je n’ai pas un avis tranché, voici donc la liste des 14 que je désapprouve, en essayant d’expliquer pourquoi, et en commençant par ceux qui je rejette le plus.
Pour simplifier le raisonnement, je me permettrais dans certains cas de regrouper certains engagements qui procèdent pour moi de la même critique
Engagement 18 : Les retraites. Le candidat veut revenir sur la dernière réforme des retraites. Il a beau, sur ce sujet, être parmi les plus raisonnables des socialistes, il ouvre la porte à une dérive supplémentaire des dépenses
Engagement 19 : Hôpital public. Le candidat souhaite considérer l’hôpital public "comme un service public et non une entreprise" et réformer la tarification, actuellement égale pour le public et le privé. C’est la réponse à une demande de ne plus chercher à maîtriser les dépenses, sous le prétexte que « l’hôpital n’a pas à être rentable »
D'après l'INSEE, les prestations sociales représentaient en 2009 597 572 millions d’euros (dont 272 218 M€ pour les retraites), à comparer à un PIB qui avoisine les 1.88 milliards d’euros : ces dépenses représentaient donc cette année-là 31.8% du PIB, soit plus que les dépenses réunies de l’Etat et des collectivités territoriales. Décider de laisser filer ces dépenses, dont on sait qu’elles augmentent naturellement plus vite que le PIB depuis la création de la Sécurité sociale en 1945, c’est absolument irresponsable et incohérent avec la volonté affichée de parvenir à l’équilibre global des finances publiques en 2017.
Engagement 1 : Banque publique d’investissement. L’idée est d’avoir une banque publique tournée vers le financement des secteurs économiques jugés prioritaires, et de permettre aux régions de prendre des participations dans des entreprises stratégiques.
Engagement 7 : Les banques. L’idée est d’empêcher les banques de faire ce que la gauche considère comme mal ou nuisible : opérations spéculatives, produits financiers toxiques, bonus, stocks options, paradis fiscaux. Au passage on propose de sur taxer les bénéfices des banques de 15%.
Ces deux propositions sont le résultat d’un mauvais diagnostic de la crise (« c’est la faute des banques qui ont spéculé », alors qu’elles sont malades d’avoir trop prêté aux Etats européens) mélangé avec un jugement moral. On en arrive à vouloir à la fois sur taxer les banques (alors qu’elles manquent de fonds propres) et à en créer une autre pour pouvoir prêter à l’économie (puisqu’elles n’ont pas assez d’argent pour le faire !)
Engagement 3 : L’emploi en France. Le candidat propose de relocaliser les activités de production en France et de récompenser ceux qui exportent et investissent. On ne voit pas le rapport avec l’idée de moduler l’impôt sur les bénéfices en fonction de la taille des entreprises.
Engagement 22 : Logement. La proposition de produire 2.5 millions de logements sociaux sur 5 ans « soit 300 000 de plus qu’avec le gouvernement précédent », prouve surtout que quelqu’un s’est mélangé les pinceaux dans les chiffres. Encadrer les loyers par la loi montre une nouvelle fois la tentation de tourner le réel, avec le risque évident du retour de bâton (la diminution de la construction)
Engagement 42 : Tarification de l’énergie. Il s’agit de tarifier l’eau le gaz et l’électricité de façon progressive « pour garantir à tous l’accès à ces services essentiels » et d’inciter à « une consommation responsable.
Dans les trois cas, il s’agit de mesures bureaucratiques pour s’émanciper de la simple logique du marché. Rien ne prouve que les résultats attendus seront atteints (le riche continuera à consommer beaucoup d’électricité d’eau ou de gaz s’il en a envie et les pauvres pourront en gaspiller !). Le besoin de notre pays est plutôt de simplifier et déréguler le système économique que le contraire !
Je n’ai pas fait l’effort de classer les suivants, tant ils sont dans des domaines différents.
Engagement 6 : Agriculture et pêche. « Défendre un budget européen ambitieux pour l’avenir de l’agriculture » quand on sait que celle-ci représente déjà une proportion aberrante du budget de l’UE ! Et vouloir redonner à une pêche dont on sait qu'elle est excessive « les moyens de sa modernisation » ne se justifie que par un souci de ratisser large, y compris dans des circonscriptions tenues par des socialistes. Mais le réalisme dans tout cela ?
Engagement 21 : Euthanasie. Pour justifier de remettre en cause une loi Léonetti pourtant reconnue comme bonne, il nous est dit qu’elle n’est pas appliquée correctement. On préfère organiser l’assassinat légal, en sachant très bien qu’il y aura des dérives largement au-delà des quelques cas emblématiques de gens qui supplient que l’on mette fin à leurs jours. Une société qui veut se débarrasser de ses vieux est bien malade.
Engagement 33 : Emploi des jeunes. Martine Aubry avait clairement expliqué que le contrat de génération était une erreur profonde, qui coûtera cher et ne servira pas à grand-chose, si ce n’est des effets d’aubaine et de la bureaucratie.
Engagement 34 : Emploi des jeunes. 150 000 « emplois d’avenir » pour insérer les jeunes dans des « emplois » dont la plupart se révéleront peu « insérant ». Là aussi, on sait d’expérience que cela coûte cher pour un résultat peu convaincant.
Engagement 41 : Nucléaire. Fermer la centrale de Fessenheim sous prétexte que les Verts n’en veulent pas et affirment du haut de leur « expérience » qu’elle est dangereuse. Donnons à l’ASN les moyens de faire son travail correctement et le contrôle du nucléaire à des experts plutôt qu’aux politiques (comme en URSS) ou aux financiers (comme au Japon)
Engagement 50 : Droit de vote des étrangers. J’ai déjà donné mon avis (négatif) sur cette question.
Engagement 54 : Décentralisation. Certes la réforme instituant le conseiller territorial est mal faite, et c’est contre elle que les élus des collectivités locales ont donné le Sénat à la gauche. Il n’empêche que le mille-feuilles administratif coûte cher et que les élus locaux font de plus en plus n’importe quoi.
Pour conclure, le programme de François Hollande ne m'incite vraiment pas à voter pour lui, y compris au deuxième tour. Heureusement pour lui, celui du président sortant ne vaut guère mieux, certes pour des raisons différentes. Probablement faut il se demander lequel est le moins dangereux pour notre pays. Ceci dit, il y a peu d'incertitudes sur le résultat de l'élection !
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