La Cour des Comptes a publié en janvier un rapport sur les coûts de la filière nucléaire qui donnait des indications précieuses sur les différentes composantes du coût du KW/h nucléaire et sur les incertitudes pesant sur une partie de ces coûts. Le rapport montrait que ces incertitudes avaient finalement un impact faible sur le total et pointait la question de la durée des réacteurs.
La Cour des Comptes estime que le coût complet du nucléaire a représenté un total de 20 milliards d’euros en 2010, ce qui pour une production de plus de 400 TW/h donne un coût de production d’un peu moins de 50 € par MW/h. A ce rythme de coûts annuels, les 50 ou 60 milliards envisagés pour prolonger de 20 ans la durée de vie des centrales n’ont rien d’extraordinaire, contrairement à ce qu’on imagine spontanément en découvrant les chiffres…ou ce que veulent nous faire croire les opposants au nucléaire.
Il faut imaginer ce que pourrait représenter le coût d ’une énergie fabriquée presque uniquement à partir d’éolien ou de solaire, partiellement stockée avec des moyens à la fois coûteux et provoquant une déperdition importante. 20 milliards d'euros, c'est 1% du PIB. Une énergie qui coûterait deux fois plus cher consommerait donc 1 point de PIB supllémentaire, qui n'irait pas ailleurs.
La Cour insiste avec raison sur le fait que les estimations de certaines dépenses futures pour le stockage des déchets ou le démantèlement des centrales sont chargées d’incertitudes et elle observe que les évaluations faites par EDF sont plutôt dans le bas de la fourchette de ce que proposent les industriels de différents pays. Elle note qu’une évaluation plus forte n’aurait cependant qu’un impact assez faible sur le coût de l’électricité. Il est probable que l’Etat, pour tenir le prix de l’électricité, et encouragé par les ingénieurs pro nucléaire du ministère de l’Industrie, a poussé l’exploitant à des choix comptables minorant les coûts les plus mal connus. Aujourd’hui EDF se bat pour faire accepter par les autorités de régulation européennes de vendre à ses concurrents (GDF Suez par exemple)son nucléaire à plus de 40 € le MW/H, quand le cout comptable cité par la Cour des Comptes est de 33.4 €/ MW/h.
Le point le plus nouveau de l’analyse de la Cour porte sur le choix qualifié d’implicite de prolonger les réacteurs nucléaires : aujourd’hui, mettre en place une autre solution (que ce soit construire de nouvelle centrales ou miser sur les économies d’énergies ou le développement du renouvelable ne serait plus possible dans les temps.
Le fait qu’EDF veuille prolonger ses centrales jusqu’à 60 ans n’est pas une surprise : cet objectif est connu depuis longtemps. La Cour note cependant que cette prolongation est suspendue à des autorisations décennales de l’ASN, et que rien ne garantit que l’état des cuves le permette. Le rapport cite très rapidement le débat technique en cours sur le sujet, mais n’entre évidemment pas dedans.
La Cour n’analyse par contre pas l’impact sur les coûts d’un prolongement réussi de la durée de vie des centrales à 60 ans : l’opération fera évidement baisser les coûts du MW/H, dans une proportion cependant limitée (10% ?)
Le ministère a donc cru bon de signifier sa volonté de prolonger à 60 ans la durée de vie, sous réserve de l’autorisation de l’ASN, qui se jouera un réacteur par un. Le Monde en a tiré un de ces articles avec une faute de chiffres énorme comme il en a le secret : d’après l’article « sur les 58 réacteurs du parc actuel, 24 atteindront d’ici à 2050 la limite des 40 ans. On peut rassurer Pierre le Hir, auteur de l’article : tous les réacteurs ayant été construits avant 2000 atteindront les 40 ans avant 2050, même s’il s’agit de durée d’exploitation (il faut donc déduire les arrêts).
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