Le lancement officiel de la campagne du président sortant montre une fois de plus à quel point il sait mener campagne et imposer ses thèmes, que ce soit sur le travail ou sa politique fiscale. Il semble avoir creusé l’écart avec Marine Le Pen mais reste largement derrière le candidat socialiste dans les sondages du deuxième tour.
Le Monde daté de ce vendredi consacrait deux demi-colonnes de sa page 2 à « Nicolas Sarkozy à table ». On y apprenait que le président n’était pas plus fana que cela des plaisirs de la table, que la soirée au Fouchet avait été morose malgré la victoire, en raison de l’absence de Cécilia. Surtout, le journaliste rappelait en conclusion que François Mitterrand avait ses habitudes au Fouquet’s (il y avait toujours la même table) « sans que personne ne lui en ait jamais fait grief ». Pourquoi le Monde sort il cet article maintenant ? Mystère !
Si la soirée au Fouquet’s a toujours été présentée par l’opposition de gauche comme symbolique d’un président allié des riches, les principales attaques sur le sujet portaient sur les cadeaux fiscaux « faits aux plus riches ». L’opinion a été convaincue que la plus grande partie des cadeaux de la loi TEPA, chiffrés à 15 milliards par an profitaient aux plus riches, à travers le bouclier fiscal : le feuilleton Liliane Bettencourt, les chèques de remboursement de trop perçu aux montants faramineux ont conforté une idée largement exagérée : le bouclier fiscal représentait largement moins de 10% de la loi TEPA. Sur le sujet, la droite s’était toujours montrée incapable de riposter efficacement.
En accusant François Hollande de mensonge, le président candidat profite d’une maladresse de son adversaire et de ses soutiens : ceux-ci ont fait un amalgame entre les réductions fiscales du quinquennat, généreusement chiffrées à 75 milliards d’euros sur 5 ans, et les avantages accordés « aux 1% les plus riches ».
La droite se garde bien de chiffrer ce qui dans ces 70 ou 75 milliards a profité directement à ces 1% les plus riches : elle fait simplement remarquer qu’ils regroupent aussi bien les déductions pour les heures supplémentaires « qui ont bénéficié à 9.2 millions de salariés », la réduction de la TVA sur la restauration, la diminution de la taxe professionnelle ou les déductions d’intérêts pour les nouveaux propriétaires.
Il est possible que les plus avantagés soient plutôt parmi les classes les plus favorisées, mais cela va très largement au-delà des 1% les plus riches. François Hollande s’est bien gardé de rentrer dans la polémique en arguant qu’il ne veut pas se mettre sur le registre des insultes, mais une autre raison est certainement que son dossier n’est pas solide sur le sujet. L’avenir dira si l’attaque de la droite aura réussi à entamer une opinion très ancrée dans la population. Probablement seulement à la marge, mais la taille des marges est un point clé au moment des élections…
Autre thème qui semble avoir plu aux militants UMP, celui portant sur l’opposition entre la valeur travail et les dérives supposées de ceux qui sont assistés. Mon expérience personnelle récente me fait penser que le président a bien choisi son sujet, non pas pour son importance réelle (c’est un autre sujet) mais parce qu’il rencontre une opinion assez répandue.
Comme je l’ai déjà écrit, je travaille actuellement sur les questions d’absentéisme à l’hôpital. Nous avons interrogé quelques petits groupes de 3 ou 4 salariés selon une logique métier. Or, dans tous les groupes, que ce soit ceux des ASH, des aides-soignantes, des infirmières ou des cadres de soin (en fait ce sont les médecins qui ont fait exception), est revenue (parmi d’autres) l’idée que certains abusent du système et du statut de fonctionnaire. Il est probable qu’une même enquête à propos des chômeurs donnerait des résultats semblables, et que ce n’est pas un hasard si le candidat UMP a choisi cet axe de campagne !
Le même numéro du Monde présentait une analyse fouillée pour expliquer que l’écart augmentait nettement dans les sondages entre Nicolas Sarkozy et Marine le Pen. Au-delà des chiffres, un article explique que la candidate se positionne plus que son père, comme une personnalité respectable, ce qui a pu l’aider à atteindre très tôt des prévisions élevées dans les sondages. Mais maintenant qu’elle s’est présentée ainsi, certains la jugent sur sa capacité à gouverner et le résultat ne lui est pas favorable, ce qui explique un début d’effritement.
On entre dans une période où le décompte des temps de parole par le CSA va mettre en lumière d’autres candidats que les deux favoris. Est-ce que cela va permettre à certains de monter dans les sondages ? L’avenir le dira !
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