La politique gouvernementale concernant le SMIC a un impact direct sur la négociation de branche des salaires minimaux. Après les revalorisations liées aux 35 heures, le gouvernement a incité les branches à reprendre les négociations tout en cessant la politique des coups de pouce au SMIC. Mais les salaires minimaux ouvriers sont encore au niveau du SMIC dans 150 branches sur 254.
Les conventions collectives sont le résultat de la négociation paritaire au sein des branches professionnelles. Elles traitent de nombreux points dans le cadre du droit du travail, les modalités choisies ne pouvant être plus défavorables aux salariés que ce qui est prévu par le droit du travail.
Les systèmes de classification définissent une hiérarchie des emplois au sein de la branche. A chaque niveau de classification correspond un niveau de rémunération, qui fonctionnera dans la branche comme minimum conventionnel pour les salariés de ce niveau de classification, comme le SMIC fonctionne comme minimum pour tous les salariés.
Si les systèmes de classification sont normalement assez durables (il est prévu de les réexaminer tous les cinq ans), les minima conventionnels doivent être revus régulièrement pour tenir compte de l’évolution de l’inflation et du SMIC. Actuellement, le niveau assez bas de l’inflation permet en pratique une réévaluation annuelle.
L’évolution du SMIC depuis le début des années 70 a affecté les négociations, le SMIC se rapprochant progressivement du minimum de la plus basse classification de chaque branche. Dans la dernière publication de la DARES, qui fait un « panorama des salaires conventionnels sur la période 2003 2009 », on note que le minima de branche le plus élevé se trouve en 2009 à 1.10 SMIC
On trouve dans une étude de la direction du travail de 2007 un schéma (voir page 12) de l’évolution du ratio du SMIC par le salaire médian, qui montre que ce ratio est passé d’un point bas à 43% en 1967 (ce qui a pu contribuer aux événements de 68) à un maximum de 64% en 1984. Après une période de baisse qui le ramène autour de 58% en 1993, il est reparti à la hausse pour dépasser 67% en 2005.
A partir de 2005,la droite au pouvoir essaie de réduire ce ratio en ne donnant plus de coup de pouce au SMIC. En parallèle, elle presse les branches à revoir leurs grilles de rémunérations, en particulier toutes celles qui se retrouvent en dessous du SMIC, parfois largement. En 2007, la présentation de la direction du travail citée plus haut montre qu’après la revalorisation du SMIC du 1er juillet 2007, près de la moitié des minima conventionnels se retrouvent sous le niveau du SMIC.
C’est dans ce contexte général qu’il faut lire l’étude de la DARES qui vient de paraître. Elle constate que la négociation conventionnelle a été relancée à partir de 2005. Le tableau 1a montre que les minima ouvriers de branche se situent massivement dans une très forte proximité du SMIC, puisque 150 branches sur 234 ont un minima compris entre 0.99 et 1.01 SMIC, et qu’entre le 1er décile et le 9ème on passe de 0.99 à 1.04 SMIC ! La situation est pratiquement la même pour les employés.
Il faut noter que la branche qui a le plus bas minimum, celle des ports autonomes, négocie régulièrement d’après la DARES. Il est possible que ce minimum (0.84 SMICV) corresponde à un niveau de classification où il n’y a plus personne (mais que l’on veut conserver, peut-être pour que ceux qui ont le plus bas niveau réellement utilisé ne se sentent pas au plus bas de l’échelle).
Ceci dit, le tableau 1b nous montre qu’il existe quelques (rares) branches dont le plus haut niveau de qualification ouvrier (ou employé) est au niveau du SMIC !
Une petite remarque pour ceux qui lisent le document, les branches demandent en général que leur accord soit étendu, ce que seul peut faire l’Etat. Il s’impose alors à toute la branche, que l’entreprise adhère ou pas (dans la branche, il est vrai un peu spéciale, des OPH que je connais mieux, il y a un ou deux non adhérents parmi les 230 OPH).
La fin du document nous montre l’évolution depuis 2003. Au début, sous l’effet de la poussée du SMIC liée au passage aux 35 heures, la hiérarchie salariale s’est rétrécie au sien des catégories « ouvriers » et « employés ». Depuis, la situation s’est stabilisé au niveau atteint en 2005 « en 2003, le salaire du plus haut niveau de qualification des employés était en moyenne égal à 1,17 fois celui du plus faible niveau contre 1,12 fois en 2009 (respectivement 1,22 et 1,17 pour les ouvriers) ».
La logique de la politique actuelle d’absence de coup de pouce pour le SMIC est de rouvrir un peu la hiérarchie salariale et de permettre qu’une partie au moins des branches décollent du SMIC pour leur minima. Il faudrait pour cela que le ratio SMIC/ salaire médian descende en dessous du 06, voire 0.55. Cela demandera du temps et surtout une période de croissance forte (similaire à celle de 1997/2001 par exemple). C’est pourtant une des conditions pour que le chômage des non qualifiés diminue durablement et que les titulaires d’une qualification intermédiaire (disons du BEP au BTS) ne se sentent pas déclassés.
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