Le CEVIPOF a publié cette semaine son troisième baromètre de la confiance politique et le Monde en a repris quelques extraits sous le titre « la défiance envers les dirigeants politiques croit », ce qui ne reflète pas vraiment les résultats mais met l’accent sur une réalité qui n’est pas nouvelle : la faible confiance des Français envers les responsables politiques.
Quand on interroge les Français sur leur état d’esprit actuel, les mots qui recueillent le plus de suffrages sont lassitude(35%), méfiance(34%) et morosité(30%), bien avant sérénité(20%), bien-être(18%), confiance(15%) et enthousiasme(12%), le mot peur recueillant 12% des suffrages.
Et pourtant, on découvre un peu plus loin que 81% des Français considèrent qu’ils sont plutôt heureux, la perception de l’avenir étant plus partagée, 42% étant optimistes et 24% ne l’étant pas, ce qui suppose que 34% ne se prononcent pas, ce qui est un score très élevé.
Il faut dire qu’il y a une différence radicale entre la sphère privée et la sphère publique, que la question de la confiance donnée aux autres illustre : 73% des Français font « tout à fait » confiance à leur famille, et 56% aux gens qu’ils connaissent personnellement, mais le taux tombe à 25% pour leurs voisins.
Ils sont 4% à faire « pas beaucoup » ou « pas du tout » confiance à leur famille. Ce total est de 3% quand il s’agit de gens qu’ils connaissent personnellement, 20% pour leurs voisins, 26% pour des personnes d’une autre religion que la leur, 29% pour ceux d’une autre nationalité et 55% pour les personnes rencontrées la première fois !
Les totaux « tout à fait" et "plutôt" avaient baissés assez nettement entre décembre 2009 et décembre 2010, en particulier à propos des gens d’une autre nationalité (de 72% à 64%). Cette fois ci, il n’y a guère de baisse, sauf pour les gens rencontrés pour la première fois (de 45 à 39%). La plus forte évolution s’était faite lors de la deuxième enquête, quand le jugement « les gens cherchent plutôt à tirer profit de vous » (opposé à l’opinion « ils font leur possible pour se conduire correctement ») était passé de 26% à 38%
Dans ce contexte général de méfiance, il aurait été curieux que les politiques bénéficient d’une bonne opinion. Là aussi, la plus forte chute a eu lieu entre le premier et le deuxième baromètre. Il est frappant de noter l’opprobre dont soufre Nicolas Sarkozy à qui seulement 27% des français font plutôt ou tout à fait confiance. Par contre, il n’y a guère de changement entre décembre 2010 et aujourd’hui, alors que les réponses à propos de l’affaire DSK pourraient laisser penser le contraire.
Si une majorité des Français pensent que la démocratie ne fonctionne pas bien, ou ne fait confiance ni à la droite ni à la gauche pour gouverner le pays, la confiance envers la gauche est en hausse continue et atteint 27% contre 15% lors de la première enquête, il y a moins de deux ans !
On regardera avec curiosité les notes obtenues par les différents candidats à la présidence. Mais on observera avec le Monde que les Français sont de plus en plus nombreux à souhaiter une fermeture accrue vis-à-vis du monde extérieur. Pascal Lamy , directeur général de l’OMC interrogé à la radio cette semaine, notait qu’il s’agissait d’une spécificité française.
Le plus grave est à mon avis la réponse à une des dernières questions : 69% des Français pensent que les élus et dirigeants politiques français sont plutôt corrompus.
Que conclure, sinon qu’il faut relire une nouvelle fois l’ouvrage de Algan et Cahuc, « la société de défiance » ?
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