Les récentes élections professionnelles à la SNCF viennent montrer comment les règles sur la représentativité bousculent le monde syndical et le dialogue social. La progression de l’UNSA et de la CFDT y modifie profondément les contraintes du jeu social. A la direction de montrer maintenant qu’elle s’en sert intelligemment.
En gagnant respectivement 3.41% et 2.17% de voix par rapport à 2009, l’UNSA et la CFDT sont certes les deux centrales qui ont le mieux réussi cette élection, mais le plus important est qu’à elles deux, elles représentent désormais plus de 30% des salariés ayant voté (plus de 70% de participation). Hier elles étaient juste en dessous (avec un total de 29.64%), aujourd’hui, elles ont ensemble 35.1% (respectivement 21.4 et 13.7), soit largement ce qu’il faut pour qu’un accord signé par les deux puissent être considéré comme représentatif (sauf opposition majoritaire, donc nécessitant une signature de la CGT et de Sud réunis)
Pour la direction de la SNCF, cela signifie la possibilité d’une autre stratégie que celle de trouver un compromis avec la CGT, jusqu’à présent la seule solution pour elle (une alliance UNSA CFDT SUD contre la CGT étant peu probable).
Cela ne signifie évidemment pas que la direction peut négliger la CGT ; celle-ci pèse encore lourd (37.37%), et la situation est forcément variable selon les 27 établissements de la SNCF. Mais elle peut passer outre et n’a plus besoin que d’une certaine « neutralité » CGT si elle trouve un terrain d’accord avec les deux syndicats réformistes. A elle de montrer qu’un dialogue social qui n’est pas basé sur la seule confrontation peut amener des progrès réels pour l’entreprise et pour le salariés.
Le communiqué de l’AFP parle d’une percée des syndicats réformistes. En réalité, si l’on distingue des syndicats contestataires (la CGT et SUD) et des syndicats réformistes (tous les autres), les syndicats contestataires ont perdu 2.22% pour se retrouver au total à 56.97%. Mais à cette avancée globale modérée des syndicats réformistes, c’est ajouté en faveur de l’UNSA et de la CFDT l’effondrement de la CFTC, passée de 5.40% à 1.03%, à la suite d’une scission interne.
Quelques soient les raisons spécifiques au recul de la CFTC de la SNCF, la logique de la représentativité menace sérieusement les centrales trop minoritaires, celle qui n’atteignent pas les 10% nécessaires pour être représentatif et pour avoir des moyens (délégué syndical). FO, qui a échoué à 8.58% à atteindre les 10%, malgré une avancée de 0.6%, n’est plus représentative que dans 8 comités sur 27. A terme, c’est son existence à la SNCF qui sera menacée
Est il d’ailleurs nécessaire d’avoir 4 ou 5 syndicats réformistes, alors que l’UNSA offre une alternative relativement « neutre » à une CFDT aux fortes convictions, avec les avantages et inconvénients que cela représente ?
La loi sur la représentativité est de fait en train de faire du ménage dans les entreprises, en stoppant la tendance à multiplier les organisations (on était passé de 5 à 7 avec l’arrivée de l’UNSA et de SUD) et en obligeant les syndicalistes à s’intéresser plus aux problèmes de leur mandants et moins à leurs questions institutionnelles
Mais évidemment, tout cela prend un peu de temps. On pourra faire un premier bilan au niveau des branches après 4 ans d’élections, pour que les renouvellements de CE aient eu lieu partout.
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