Décider de faire une dépense donnée, c’est en même temps choisir de ne pas affecter ailleurs la somme nécessaire. C’est vrai pour un particulier, pour une entre prise ou une collectivité. Que de raisonnements comme si ce principe de base n’existait pas ! Et pourtant, d’une certaine manière on peut le contourner.
Pour un petit enfant confronté à un parent qui refuse un achat sous prétexte qu’il n’a pas assez d’argent pour cela, la solution est simple : il suffit d’aller au distributeur. En vieillissant, on découvre que les choses sont un peu plus compliquées, et que l’argent dépensé au parc d’attraction voisin n’est plus disponible pour acheter une boîte de chocolat.
On découvre ainsi la base de l’économie, qui se préoccupe de la manière dont on utilise des ressources limitées.
Si j’achète cette voiture, je n’aurais pas les moyens de payer le réaménagement de ma cuisine. Si je m’endette à la limite du supportable pour acheter un logement, je ne pourrais plus faire d’extra pendant plusieurs années.
Pour une entreprise c’est pareil : les sommes consacrées à des augmentations de salaire ou à la distribution de dividendes ne le sont plus pour des investissements (et vice versa). Une entreprise bien organisée va arbitrer entre plusieurs investissements possibles, car elle n’a pas les moyens de les faire tous. Les offices HLM font des études de leur patrimoine et des gros travaux d’entretiens à prévoir pour les planifier sur 5 ou 10 ans. Il faut les étaler dans le temps, pour étaler les dépenses, mais aussi parce que les équipes compétentes en interne pour gérer ces travaux sont aussi en effectif limité et ne peuvent tout faire en même temps.
Une collectivité publique est confrontée aux mêmes contraintes. Un CHU ne réalisera pas toutes ses rénovations en même temps, là aussi pour des questions de moyens en finances et en compétences.
L’Etat, on l’oublie trop souvent, est soumis aux mêmes contraintes et c’est pourquoi un parlementaire ne peut proposer une nouvelle dépense sans en prévoir le financement. C’est pour cette raison qu’il y a (ou qu’il devrait y avoir) une exigence d’utilisation rationnelle des moyens utilisés. Si les biens publics doivent être gérés avec parcimonie, ce n’est pas pour une prétendue rentabilité (terme méprisant pour certains qui généralement ne savent pas bien ce qu’il recouvre), mais tout simplement parce que l’argent utilisé pour une opération donnée ne l’est pas ailleurs.
Notre monde extrêmement sophistiqué nous a cependant donné un moyen d’échapper à la contrainte que je viens de décrire, grâce aux organisations financières, qui me permettent d’emprunter les sommes qui me manquent et donc d’augmenter pour un temps mes ressources. Les banques peuvent me prêter, parce que dans le même temps, d’autres personnes, morales ou réelles, se retrouvent dans une situation où elles n’ont pas l’usage immédiat de toutes leurs ressources.
Certains ont cru que Keynes nous avait sorti de la logique « un sou est un sou ».D’un seul coup, être dépensier n’était plus un défaut mais une qualité ! En réalité,ceux qui font cette lecture n’ont pas vraiment tout compris, et en particulier qu’il faut distinguer le contexte conjoncturel
Dans les périodes de récession, une partie de ces ressources limitées dont il est question plus haut sont inutilisées. La dépense publique supplémentaire permet de les utiliser ;
Dans les périodes de croissance au contraire les ressources limitées sont utilisées et l’appareil de production tourne à plein. Il y a peut être des goulots d’étranglement dans certains appareils de production ou pour certaines compétences. Diminuer la dépense publique peut desserrer ces goulots et permettre à la croissance de continuer. C’est par ailleurs un moyen pour l’Etat de se désendetter et de se donner des marges de manœuvre pour le retournement de cycle.
Finalement, même pour l’Etat, un sou est un sou !
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