La situation des femmes fait l’objet de beaucoup de discussions : d’après le 7ème rapport du COR, on observe fin 2004 un revenu mensuel moyen de 1617 € pour les hommes et 782 € pour les femmes (1011 € en comptant les pensions de réversion), donc une différence très importante
Pourtant, les règles devaient normalement prendre en compte les situations féminines particulières et elles l’ont fait de deux façons. D’une part, avec les pensions de réversion, qui permettent à une veuve de toucher une partie de la pension de son ex mari. L’existence de ces pensions reflète la situation dominante au moment de la création du système, à savoir un taux d’activité féminin bas (ou non déclaré chez nombre de commerçants, artisans ou agriculteurs), qui se conjuguait à de longues périodes de veuvage, du fait de la plus grande espérance de vie des femmes et du faut que la femme était souvent plus jeune que son mari.
La deuxième manière de prendre en compte la situation particulière des femmes concerne les périodes de maternité. Comme les périodes de chômage, elles donnent droit à des trimestres validés bien que non cotisés. Mais la règle va plus loin puisqu’il est attribué gratuitement 8 trimestres supplémentaires pour chaque enfant élevé. Cette règle permet de compenser en partie les carrières incomplètes.
Ces règles se voient dans les résultats calculés par le COR. En effet, si on calcule le rapport inter décile (pages 31 et 32 du 7ème rapport du COR), on trouve qu’il est de 3.9 sur les salaires féminins (une femme située juste aux 10% des mieux payées gagne 3.9 fois plus que celle qui est à la limite des 10% les moins bien payées, souvent des femmes à temps partiel). Si on ne prend plus le salaire moyen mais l’ensemble des salaires perçus pendant la carrière, ce rapport passe à 9.3 (du fait de femmes ayant des carrières incomplètes). Grâce aux mécanismes de redistribution, le rapport inter décile sur les retraites est au final de 5.3 : il compense en partie, mais en partie seulement, le caractère incomplet de certaines carrières féminines.
Les lignes qui précédent ont mis en évidence une des causes des retraites plus faibles pour les femmes : les carrières incomplètes. Celles-ci peuvent être dues au congé parental (mais c’est ce qu’essaie de couvrir de fait la règle des 8 trimestres validés), mais elles renvoient plus fondamentalement à un modèle maintenant ancien, où les femmes restaient au foyer pour élever leurs enfants, et n’avaient donc que quelques années de travail avant leur mariage et parfois une fois les enfants partis. Les retraitées actuelles sont évidemment nombreuses à être dans ce cas, ou dans celui du travail avec le conjoint non déclaré.
Pour les femmes qui arrivent à l’âge de la retraite, et encore plus pour celles qui le feront dans 10 ou 20 ans, la norme a au contraire été celle de l’activité. Le gouvernement met donc en avant l’idée que la question est dernière nous.
Il faut noter qu’il y a dans les mères isolées non ou peu qualifiées, une pratique de la non activité ou du temps très partiel, ces femmes vivant des minima sociaux. Même si les femmes concernées se remettent au travail une fois les enfants partis, leur retraite risque d’être faibles et elles seront concernées par l’ASPA.
Les femmes qui aujourd’hui travaillent jusqu’à 65 ans pour cause de retraite incomplète (pour avoir une retraite à temps plein ou pour bénéficier de l’ASPA vont subir le décalage à 67 ans comme les salariés très formés qui ont démarré leur carrière assez tard. C’est une des raisons de l’opposition de la CFDT au passage de 65 ans à 67 ans.
Les débats autour de la réforme ont conduit à la réparation d’une injustice ! si les congés maternité donnent droit à des trimestres validés, les indemnités versées ne sont pas comptés dans le calcul du salaire annuel qui entre dans la moyenne des meilleures années, ce qui contribue à baisser le niveau des pensions. Le projet en loi en cours devrait remédier à cet état de fait.
Reste la dernière cause de pension plus faible pour les femmes : les salaires plus bas. Il parait difficile de mettre en oeuvre un mécanisme compensatoire (sinon, pourquoi ne pas compenser le fait que les hommes ont une plus faible espérance de vie ?), mais il y a évidemment ici un problème de justice sociale dont le débat sur les retraites n’est qu’un révélateur : les femmes gagnent en moyenne 20 à 25% de moins que les hommes, pour différentes raisons, dont celles de leur orientation vers des métiers mal payés (ou du fait que les métiers très féminins sont mal payés).
Un petit mot pour la pension de réversion, qui peut aussi bien concerner les hommes que les femmes. Son montant est de 54% de la pension du conjoint décédé sous condition que les ressources du demandeur ne dépassent pas 18 428,80 euros par an pour une personne seule. Les syndicats demandent depuis longtemps une augmentation du taux de 54% (ils ont déjà obtenu un passage de 50 à 54%). Si le conjoint survivant est sans aucune ressource, ce taux correspond en effet à une baisse de son niveau de vie, mais ce n’est généralement pas le cas s’il bénéficie déjà d’une retraite, même relativement faible : le système n’est donc pas pleinement satisfaisant.
Pour conclure, le système des retraites se veut à la base un système socialement juste, si on admet qu’il est socialement juste que les retraites soient proportionnels aux cotisations versées, elle-même proportionnelles aux salaires perçus. Il est pour 20% corrigé par des éléments distributifs, en faveur des chômeurs et des femmes notamment.
Il comporte pourtant des défauts importants en matière de justice sociale. Les deux plus importants sont :
La grande diversité des régimes qui se traduit en partie par des inégalités entre régimes et par une opacité (liée à la complexité plus qu’au secret) malsaine pour le vivre ensemble de la société française
L’importance donnée à l’âge plutôt qu’aux années de cotisation dans la détermination de l’âge de départ, qui permet de dire en raccourci que les ouvriers cotisent pour payer la retraite des cadres.
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