J’avoue être assez hermétique aux charmes de l’art abstrait. Mais suis-je vraiment le seul, y compris parmi ceux qui font profession de s’y intéresser, et qui sont donc amenés à prétendre le comprendre ? On peut parfois en douter.
Une de mes amies a passé son bac au milieu des années 70. Bien que peu douée pour le dessin, elle a décidé de prendre cette matière en option au bac. Il est vrai que cela ne pouvait que lui rapporter des points.
C’est sa sœur aînée, devenue depuis professeur d’arts plastiques, qui l’a poussée à faire son choix et qui lui a proposé une méthode de travail. L’idée était de produire une œuvre (à l’époque, c’est en cela que consistait l’épreuve), en choisissant de passer par une œuvre abstraite.
Le principe était simple : sur les conseils de sa sœur, mon amie a appris à réaliser une seule œuvre particulière avec l’idée de la réaliser quelque soit le sujet proposé lors de l’épreuve, en faisant confiance au correcteur pour trouver un lien entre le dessin et le thème choisi...
On admettra que cette méthode reposait sur l’idée que les correcteurs étaient prêts à accepter n’importe quoi et de le juger bon si l’adjectif abstrait pouvait s’appuyer sur le dessin produit.
Mon amie a eu 15 en dessin : le pari était donc largement gagnant.
Il est vrai que l’exemple venait de loin. En 1910, il y a donc cent ans, le Salon des indépendants expose une toile intitulée « Coucher de soleil sur l’Adriatique », de Joachim Raphaël Boronali. Les critiques d’art s’intéressent au tableau (sans pour autant tomber dans l’enthousiasme), jusqu’à ce qu’on apprenne qu’il est en fait l’œuvre de l’âne du propriétaire du café Le lapin agile, à Montmartre. L’écrivain Roland Dorgelès, spécialiste es canulars, avait attaché un pinceau à la queue de l’âne.
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