Le gouvernement s’apprête à modifier le texte de la loi pénitentiaire en cours de discussion avec le parlement, sur deux sujets importants : le régime de substitution des peines et celui de l’encellulement individuel. Deux sujets sur lesquels l’idéologie s’en donne à cœur joie mais où les considérations utilitaristes et conjoncturelles pèsent également lourd.
Les aménagements de peine comprennent plusieurs mesures autres que la libération conditionnelle ou pure et simple. Si les placements en semi liberté et les placements extérieurs restent limités et évoluent peu (respectivement 5928 et 2608 en 2008), les permissions de sortie sont passés en 5 ans de 33113 à 53201 et les placements sous surveillance électronique de 130 à 11259.
Le développement de cette dernière mesure a deux raisons très à ras de terre : cela coûte moins cher qu’un placement en prison, et il n’y a pas assez de place dans nos prisons pour gérer les conséquences du durcissement des lois, notamment sur la récidive.
Il se trouve une association de victimes citée par le Monde pour déclarer que ces mesures constituent un risque pour les citoyens, les détenus en questions étant susceptibles de commettre des délits ou crimes. Si l’on va jusqu’au bout de la logique ainsi exprimée, il ne faudrait jamais libérer les détenus et les enfermer à vie !
Il y a d’ailleurs un peu de cela dans les idées du gouvernement qui veut exclure du système de substitution de peine les récidivistes et les délinquants sexuels. Pour les premiers, l’idée est manifestement qu’il ne comprendront qu’il faut qu’ils changent de comportement que par une peine de prison dure, pour les seconds, l’idée manifeste est qu’ils ne peuvent se corriger, leurs pulsions dépassant leur volonté propre.
La position des juges d’application des peines est beaucoup trop pragmatique pour les idéologues de tout poils, ceux qui ne croient qu’à la répression comme ceux qui ne croient qu’à la prévention. Il s’agit de se donner les moyens de juger au cas par cas, et d’adopter les aménagements de peine en fonction des efforts du détenu et de la stabilisation de son comportement. Traiter les détenus comme des personnes humaines, chacune différente des autres et non comme des numéros interchangeables en quelque sorte. Utopique, forcément utopique !
Autre sujet, celui de l’encellulement individuel, et cette fois ci, se sont ceux qui veulent imposer cette seule solution qui donnent de la voix. Pourtant, l’un des témoignages de détenu cité par le Monde finit en disant « 80% des détenus préfèrent rester seuls en prison ». Ils restent 20% des détenus qui sont pour la solution contraire. Pourquoi ne pas laisser un vrai choix, c'est-à-dire un nombre de cellules collectives nettement plus limitées qu’aujourd’hui, et aussi plus spacieuses ?
L’administration pénitentiaire défend la possibilité de l’encellulement collectif, et pas seulement parce qu’elle serait bien en peine de faire autrement, au moins dans les maisons d’arrêt, où se trouve l’essentiel de ola surpopulation carcérale. Aujourd’hui, c’est de fait un moyen de lutter contre les états dépressifs et donc les suicides (l’homme est un être social, contrairement à ce que peut imaginer Rousseau !).
L’Espagne, qui a un taux de suicide en prison beaucoup plus faible que le notre, a aussi une organisation pénitentiaire très différente : les détenus vivent en pratique ensemble pendant la journée. Ce n’est donc pas seulement sur l’encellulement collectif ou individuel qu’il faudrait réfléchir, c’est sur l’organisation générale toute entière !
En attendant, entre les arguments idéologiques et les questions de gestion des flux, il est peu probable qu’on assiste à des débats de qualité !
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