Juste avant Noël, la négociation triennale sur l’assurance chômage s’est close avec un projet d’accord présenté par le Médef, que les syndicats réformistes hésitent encore à signer, la décision étant prise début janvier
François Chérèque a déclaré pour la CFDT qu’il ne signerait pas seul. En cela, il est cohérent avec la nouvelle règle sur la représentativité des accords, que son syndicat a beaucoup poussé, et qui demande que les signataires représentent au moins 30% des salariés.
Avant de voir ce qui peut pousser les syndicats à signer ou non, il faut rappeler ce qu’est l’assurance chômage. Celle ci est financée par les salariés et employeurs du privé et verse des allocations aux salariés du privé ayant perdu un emploi. L’ensemble des chômeurs ne touchent pas d’allocation, ce qui est logique avec la définition précédente.
On pourrait en effet concevoir un système financé par l’ensemble des actifs, qui verseraient une allocation à ceux qui sont sans travail et sans ressources. Le RMI est typiquement une allocation de ce genre.
L’UNEDIC n’est financé ni par les fonctionnaires, ni par les travailleurs indépendants : il n’est donc logiquement pas un organisme finançant toutes les personnes sans travail.
L’UNEDIC est au contraire un organisme de type assurantiel, qui verse des allocations aux salariés du privé qui ont perdu leur emploi, en utilisant les cotisations versées par ceux qui en ont encore un. Ce qui explique que les allocations versées soient proportionnelles au salaire précédent. Ce qui explique aussi que la durée d’allocations ne soit pas sans limite et qu’elle puisse dépendre de la durée de cotisations précédentes .
Dans ces conditions, les négociations triennales portent régulièrement sur les mêmes sujets : montant des cotisations, durée des allocations et lien avec la durée de cotisations, cas particuliers. C’est ainsi que la durée minimale de cotisation pour bénéficier des allocations est passée il y a quelques temps de 4 à 6 mois et qu’il est prévu de la faire revenir à 4 mois en 2009.
Pour illustrer la complexité des questions, on peut prendre l’exemple du travail saisonnier. Dans certaines villes touristiques, l’activité est saisonnière. Le moniteur de ski de Val d’Isère, s’il n’est pas travailleur indépendant, a du travail l’hiver et pas l’été. Le rôle de l’UNEDIC est il de financer le fonctionnement estival de Val d’Isère ? Lors de la précédente négociation, il avait été prévu qu’un tel travailleur saisonnier ne pouvait bénéficier de telles allocations que pendant 3 saisons maximum. Cette règle, qui devait de fait commencer à produire ses effets en 2009 a disparu de la nouvelle convention et ne sera donc pas appliquée.
En 1991, les partenaires sociaux gérants de l’UNEDIC ont décidé de continuer à fournir une allocation aux chômeurs qui retrouvaient un travail à temps partiel. Cette allocation a bénéficié à 440 000 personnes en juin 2007 , soit 11 fois plus qu’en 1991 ! Une étude récente permet d’analyser le population concernée. Comme il s’y trouve à la fois des gens très satisfaits de cette solution et d’autres qui le sont beaucoup moins, chacun y trouvera les arguments pour expliquer tout le bien ou tout le mal qu’il pense de la mesure.
Si l’on compare le nombre d’allocataires des Assedic (page 11) et le nombre de demandeurs d’emplois de catégories 1 (c'est-à-dire en recherche d’un emploi à temps complet, on peut réaliser le tableau suivant (en millions)
année |
1990 |
1993 |
1996 |
1998 |
2000 |
2002 |
2004 |
2006 |
|
3.1 |
3.1 |
3.0 |
2.3 |
2.3 |
2.5 |
2.2 |
|
Affiliés |
14 |
13.5 |
13.8 |
14.3 |
15.5 |
15.8 |
15.9 |
16.2 |
bénéficiaires |
1.3 |
2.0 |
1.8 |
1.8 |
1.6 |
2.0 |
2.2 |
1.7 |
Rapport3/1 |
|
0.65 |
0.6 |
0.6 |
0.7 |
0.85 |
0.85 |
0.75 |
Le nombre de chômeurs est au 30 septembre de l’année considérée et le nombre de bénéficiaires au 4ème trimestre environ
Le rapport entre le nombre d’allocataires et le nombre de chômeurs est le résultat d’un calcul : il ne reflète pas la part des chômeurs qui touchent une allocation puisqu’il y a des allocataires qui ne sont pas dans la catégorie 1 (ils cherchent un travail à temps partiel par exemple). Mais on voit d’une part que ce ratio est très loin de 1, d’autre part qu’il évolue dans le temps.
Cette fois ci, il y avait donc des débats sur les règles d’indemnisation (donc les dépenses) et un débat sur les cotisations (donc les recettes). Les cotisations représentent 6.4% des salaires bruts du privé, 2.4% à la charge du salarié et 4.0 à celle de l’employeur.
Avec l’augmentation du nombre de cotisants à partir de 1997, on a amélioré le ratio allocataires / Chômeurs catégorie 1 et les employeurs ont souhaité baisser les cotisations. Le retournement de la situation économique en 2001 a pris de court les gestionnaires et conduit à un gros déficit de 2002 à 2005. Les déficits annuels représentaient environ 15% des dépenses et le déficit cumulé a dépassé la moitié des cotisations annuelles.
Depuis 2006, c’est le contraire : le régime (page 10) est bénéficiaire ce qui a permis d’améliorer la situation financière , passée de – 13 milliards environ fin 2005 à – 5 milliards prévus fin 2008, avec un excédent annuel en 2008 de plus de 4 milliards. A comparer à un budget annuel de l’ordre de 30 milliards.
Les employeurs étaient fondés à réclamer une baisse de cotisations pour deux raisons : d’une part l’Etat leur a imposé une hausse des cotisations retraite de 0.3% en proposant explicitement de compenser cette hausse par une baisse sur le chômage. D’autre part, la part de l’entreprise dans la valeur ajoutée est descendue à son plus bas niveau sur 15 ans.
Les syndicats auraient préféré améliorer les conditions de cotisations, et il était également importent de ne pas déraper dans les comptes alors que tout laisse à penser que le chômage va augmenter fortement en 12009.
Au final, les conditions d’indemnisation ont évolué de manière à profiter à plus de personnes (entre 100 000 et 300 000 selon les scénarios) sans qu’il apparaisse pour le néophyte qui sont les gagnants et les perdants. La règle générale est que la durée d’indemnisation ne peut excéder la durée de cotisation. Le taux de cotisation baissera au second semestre si l’équilibre des comptes le permet. L’accord ne vau que pour deux ans, cette durée réduite reflétant probablement l’incertitude actuelle sur la date d’une reprise économique.
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