Au-delà des questions d’actualité sur l’offre valable d’emploi la fusion de l’ANPE et de l’UNEDIC est l’occasion de s’interroger sur la manière dont doit fonctionner un service de l’emploi moderne. La comparaison avec ce qui se fait chez nos voisins peut nous aider à identifier ce qui marche et ce qui ne marche pas, ainsi que les choix possibles. M’appuyant sur une étude récente sur le sujet, je vais me lancer de nouveau dans une série, les sujets à aborder étant assez nombreux.
L'étude constate que la plupart des SPE (service public de l’emploi) se sont donné comme objectif un retour rapide dans l'emploi. Dans ce cadre il est possible d'examiner l'efficacité relative des différentes actions mises en œuvre:
La formation,
L’accompagnement,
L’organisation tournée vers la qualité du service au bénéficiaire: marketing de la demande
L’organisation tournée vers l'objectif global de l'institution: marketing de l'offre et outils modernes de ciblage et de profilage
Le lien entre indemnisation et recherche d’emploi : si
on doit parler d'OVE, c'est dans ce cadre là !
Et pour conclure, politique globale
Avant d'aborder ces différents sujets dans les prochains articles, il faut bien sûr revenir à ce qui est dit sur l'objectif, en l'occurrence le retour rapide à l'emploi et à la notion même de SPE
Historiquement, la France a développé deux institutions:
D’une part l'UNEDIC, émanation des partenaires sociaux, chargée d'indemniser les chômeurs, à condition qu'ils aient des droits pour cela
D’autre part. l'ANPE, service de l'Etat chargé d'aider les chômeurs à retrouver du travail (et aussi de comptabiliser les chômeurs ce qui peut conduire à un regard particulier sur la notion même de chômage)
Avec le temps se développent d'autres services ciblés vers une population donnée, comme par exemple les missions locales, ce qui a conduit à créer récemment les Maisons de l'Emploi comme lieu de coopération de toutes ces structures.
Il a été décidé par le gouvernement actuel de fusionner l'ANPE et l'UNEDIC, malgré leur rattachement différent, pour faire un SPE unifié, à l'image de nombreux pays européens. On verra à propos de la qualité du service et du lien entre indemnisation et recherche d'emploi certaines implications de cette fusion.
La montée vers un chômage de masse a paru inéluctable à la fin des années 70 et surtout au début des années 80, quand les mesures adoptées par la gauche n'ont pas interrompu le phénomène. Il s'est installé l'idée que l'emploi était un gâteau limité, qu'il fallait se battre pour empêcher sa diminution (les plans de licenciements), diminuer le nombre de convives (par le congé parental ou le retour au pays, déjà sous Giscard, massivement par les préretraites ensuite) ou répartir la pénurie (RTT). Le retour de la création d'emplois en fin 1985, conséquence du plan Delors, et la trop courte embellie 88/90 n'ont pas remis en cause cette idée.
Dans ce contexte, l'idée qu'il n'y a pas d'emplois pour tout le monde ne pousse guère à demander à l'ANPE de réaliser l'impossible. On va plutôt se soucier de l'indemnisation des chômeurs et du cas des jeunes, avec les emplois aidés et les stages parking.
L'amélioration significative de la situation depuis 1997 rend aujourd'hui plus audibles les pratiques de nombreux pays qui ont des meilleurs résultats que la France dans le domaine de l'emploi (la France est mal classée dans ce domaine en Europe).
L'idée dominante est que le retour à l'emploi doit être rapide
La première raison est explicite dans le rapport : plus long est la durée de chômage, plus difficile est le retour à l'emploi. Un délai maximal de 14 mois est même cité,au delà duquel le retour est très difficile. Bien sûr, les plus aptes à retrouver un travail l'ayant déjà fait, ceux qui restent sur le carreau sont forcément moins adaptés au marché du travail. Mais il y a plus. Au delà d'une telle durée, l'image donnée par le chercheur d'emploi vis à vis des recruteurs est très négative (on retrouvera ce problème pour les femmes après les congés maternité et surtout parentaux) et d'autre part, le chômeur s'est lui même à force éloigné de l'emploi, dans ses comportements comme dans sa connaissance de l'emploi.
La deuxième raison, qui mérite d'être explicitée, est qu'un retour rapide des chômeurs à l'emploi est favorable au volume de celui-ci. Le fait qu'un employeur ait du mal à trouver une personne dont il a besoin est un frein à l'activité et à la croissance. En aidant à la rencontre d'une demande et d'une offre d'emploi, un service public de l'emploi favorise donc l'emploi et la baisse du chômage. a contrario, en laissant des personnes s'enfermer dans le chômage de longue durée et dans une situation éloignée de l'emploi, on diminue le nombre de personnes susceptibles de répondre positivement à une offre et donc on diminue au final l'emploi;
On peut développer cette idée en s'appuyant sur les notions de chômage structurel, conjoncturel et frictionnel.
En l'absence de chômage conjoncturel, les employeurs ne trouvent personne de valable pour répondre à leurs besoins: aider un chômeur à développer ses aptitudes à tenir cet emploi va donc diminuer le chômage structurel donc dans ce cas le chômage tout court.
Si on défini le chômage frictionnel comme le délai d'ajustement pour passer d'un emploi à un autre, ou le délai pour qu'un employeur trouve la personne dont il a besoin, on conçoit que la réduction de ce délai diminue le nombre de chômeurs.
Toutes ces notions participent de l'idée que le "gâteau " de l'emploi n'est pas fixe mais au contraire élastique par nature.
A suivre!
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