Les partenaires sociaux ont fini par trouver un accord sur le régime des retraites complémentaires. Alors que la presse a surtout retenu le passage de 62 à 63 ans en 2019 pour une pension à taux plein, l’accord consacre en fait la baisse du montant des pensions et ouvre la voie à une individualisation plus forte des décisions de départ
Le patronat a obtenu la définition d’un bonus-malus, dont l’objectif affiché est d’inciter les salariés à repousser l’âge de départ en retraite. A partir de 2019 et de l’effectivité de la fusion des caisses ARRCO et AGIRC, un salarié partant en retraite quand il peut bénéficier du taux plein sur sa retraite de base verra sa pension complémentaire amputée de 10% pendant 3 ans (cette mesure n’est applicable au maximum que jusqu’à 3 ans, les retraités dispensés de CSG en sont exonérés et la baisse n’est que de 5% pour ceux qui sont soumis au taux réduit de CSG)
Cette minoration n’est pas applicable pour les salariés qui ont travaillé 4 trimestres de plus que le nombre nécessaire pour partir à taux plein (nombre qui dépend de l’année de naissance)
Elle est remplacée par une majoration pour ceux qui ont fait 8, 12 ou 16 trimestres de plus que ce qui est nécessaire à taux plein (de 10, 20 ou 30 %, toujours pendant 3 ans).
Avant d’analyser les conséquences pour les salariés, il faut analyser les raisons de ce bonus-malus.
Imaginons un salarié de 62 ans ayant le nombre de trimestres cotisés nécessaire pour son année de naissance. S’il décide de prolonger d’un an son activité, il va continuer à cotiser pendant 4 trimestres, ce qui de fait va augmenter le montant de sa retraite complémentaire d’environ 2.4% (mais cela ne change pas sa retraite de base). Ces 2.4% sont financés par les cotisations versées pendant l’année de prolongement. Mais les caisses Agirc Arrco ont aussi économisé le montant de la pension pendant 1 an, ce dont elles ne font pas bénéficier le retraité. Le bonus-malus mis en place ne restitue en réalité au salarié qu’une partie du gain pour les caisses, de la même manière qu’elle ne fait payer à ceux qui partent sans prolonger qu’une partie de la perte des caisses par rapport à un départ avec prolongement.
On aurait pu imaginer, au lieu d’un bonus-malus sur 3 ans, un bonus-malus s’étalant sur toute la durée de la retraite et évidemment d’une valeur nettement moins élevée.
Le système choisi a plusieurs avantages :
D’abord il impacte rapidement les recettes ou les dépenses des caisses,(n’oublions pas que la réforme est motivée par le fait que les réserves fondent à grand vitesse)
Ensuite il peut pousser le futur retraité à prolonger, plus facilement qu’une baisse beaucoup plus faible étalée dans le temps
Enfin, elle est de fait compensée pour beaucoup de salariés par l’indemnité de fin de carrière. Celle-ci est égale à un mois de salaire par période de 5 ans d’ancienneté. Un salarié ayant 17 ans d’ancienneté touchera ainsi 3 mois de salaire, un montant très supérieur au malus de 10% pendant 3 ans sur les seules complémentaires.
Mais ce bonus-malus n’est qu’une des nombreuses mesures de l’accord. Celui-ci acte une évolution de la valeur du point (donc le montant des pensions) inférieure de 1% par an à l’inflation pendant 3 ans ainsi qu’une augmentation du prix du point (les droits acquis). Cette décision succède à une baisse du rendement des cotisations : le rendement net est passé de 7.05 % en 2000 à 6.56% en 2014 pour l’ARCCO et de 7.15 % à 6.56%pour l’AGIRC : c’est bien le montant des pensions qui va baisser, du fait du refus des français de prolonger la durée d’activité.
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