L’examen de l’évolution des rejets responsables de ce qu’on a appelé « les pluies acides » montre que la réduction a commencé bien avant que le thème envahisse les médias. L’émission de polluants peut être d’origine très diverse, selon la nature du polluant et l’industrie a souvent été aux avants postes de la réduction des émissions.
Dans ma mémoire, c’est au début des années 80 qu’on se met à parler dans la presse du problème des pluies acides qui menacent les forêts européennes, en particulier en Allemagne. Toujours de mémoire, il me semble que le thème n’apparait pas lors des présidentielles de 1981, malgré la présence du candidat Brice Lalonde qui recueillera 3.88% (Wikipédia cite comme thèmes le nucléaire et l’affaire de l’Amoco Cadiz).
En février 1986 a lieu à Paris une conférence internationale sur l’arbre et la forêt, autour de François Mitterrand et Helmut Kohl. En 1988 un traité international est signé sur le sujet. L’Union européenne fixe des normes successives pour diminuer les pollutions responsables du phénomène.
Le principal polluant est le dioxyde de soufre (SO2). Or son pic d’émission ne se situe pas dans les années 80 mais en 1973 !En 1985, les émissions ne sont plus que de 41% de celles observées en 1973, le plus gros de la baisse ayant eu lieu à partir de 1980.
Donc des mesures énergiques ont été prises avant que le thème devienne médiatique. Par contre, on peut penser que la mobilisation de tous a contribué à justifier le durcissement progressif des normes, mais ce n’est même pas sûr.
Depuis 1973, les émissions ont baissé de 94% (une division par 16 !), mais la baisse continue, avec des objectifs européens de division par deux entre 2005 et 2020 (objectif déjà atteint en France).
On notera que les deux principaux polluants étaient l’industrie manufacturière et la production d’énergie, mais d’importants progrès ont été observés partout, y compris dans le transport routier et dans le tertiaire/ résidentiel, grâce à la commercialisation de fuel moins soufré
Le CITEPA publie sur son site les émissions de 28 produits ou groupes de produits : 7 qui participent à l’effet de serre, 5 pour leurs effets acidifiants, eutrophisation et pollution photochimique, 9 métaux lourds, 4 Polluants organiques persistants et enfin les poussières en suspension à travers 3 mesures.
Parmi ces 28 produits ou groupes de produits, quand on prend les résultats des dernières mesures (de 2013) et qu’on les compare avec le niveau maximum historique ou à défaut celui de 1990, on en trouve
- 1 dont les émissions ont augmenté fortement (multiplié par 9 depuis 1995)
- 6 dont les émissions ont baissé faiblement, de 0 à 50 % (dont 2 n’ont baissé que de quelques %)
- 13 dont les émissions ont baissé fortement, de 50 à 90 %
- 8 dont les émissions ont baissé très fortement, de 90 à 100%, soit une division par au moins 10
Le produit dont l’émission a augmenté est le HFC-134a, qui est utilisé à partir de 1995 en remplacement des CFC, qui avaient un impact fort sur la couche d’ozone. Les HFC n’ont pas d’impact sur la couche d’ozone mais participent à l’effet de serre. L’industrie représente 23% des émissions, contre 100% en 1990.
Les émissions de NH3 ont baissé de 5% depuis 1983. Elles sont dues à 97.5 % à l’agriculture. Les émissions de l’industrie sont en hausse de 40% depuis un point bas en 1995 et représentent 1.5% du total.
Les émissions de cuivre n’ont baissé que de 0.5% depuis 1990. Les émissions de l’industrie ont baissé de 72% et ne représentent que 5% du total en 2013 ;
Si on observe uniquement les émissions de l’industrie manufacturière (hors production d’énergie) par produits, selon le même critère que plus haut, on trouve :
- 1 dont les émissions ont augmenté (de 40%)
- 8 dont les émissions ont baissé faiblement, de 0 à 50 %
- 13 dont les émissions ont baissé fortement, de 50 à 90 %
- 6 dont les émissions ont baissé très fortement, de 90 à 100%, soit une division par au moins 10
Contrairement à ce qu’on imagine parfois, l’industrie n’est qu’un des émetteurs de polluants parmi d’autres, même si son rôle est important. Sur nos 28 produits ou groupes de produits, sa part dans les émissions est comprise entre
- 80 et 100% dans 3 cas (quasiment 100% dans 2 cas)
- 60 et 80 % dans 2 cas
- 40 et 60 % dans 5 cas
- 20 et 40 % dans 10 cas
- Moins de 20% dans 4 cas
En créant le CITEPA dès 1963, les industriels ont montré qu’ils avaient compris que le sujet de la pollution était important. Les services du ministère de l’industrie ont également fait pression pour que les entreprises respectent des normes de plus en plus contraignantes. Entretemps, par la rigueur de ses méthodes, le CITEPA s’est forgé une légitimité internationale, contrairement à ce que pense Stéphane Foucart, et il est une référence incontournable.
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