La gauche radicale au pouvoir depuis le début de l’année en Grèce a beaucoup parlé de démocratie et de respect du vote du peuple pour justifier ses revendications auprès de ses partenaires européens, avant de céder sur toute la ligne. Et si la démocratie était du côté des Allemands ?
Avant d’être un système qui permet à la majorité de décider, il me semble que la démocratie est un système qui protège les minorités : en ce sens elle émane du traité sur la Tolérance de Voltaire et non du peuple-un de Rousseau ! Les choix faits par la majorité ne peuvent l’être qu’après que des précautions aient été prises pour que les divers points de vue aient pu s’exprimer. D’où par exemple en France l’aide à la presse d’opinion dont profitent aussi bien la Croix que l’Humanité. Mais aussi le fait que la loi s’impose aux puissants comme aux faibles !
Ceci dit ce que montrent les relations du gouvernement Tsipras avec ses créanciers, ce sont plutôt la difficulté pour traduire dans les faits la volonté exprimé par les électeurs
La première limite du vote populaire est tout simplement factuelle. Un vote populaire pourrait interdire la mort ou décider que dorénavant les oiseaux feront leurs petits comme les mammifères, ces décisions ne seraient pas mises en œuvre pour autant. Qu’un pays qui a épuisé la patience de ses créanciers ne puisse plus se permettre de dépenser plus qu’il ne gagne fait partie des mêmes réalités incontournables.
Bien sur, les responsables européens qui négociaient avec Tsipras ont rappelé qu’eux aussi étaient l’émanation d’un vote populaire et que les Grecs ne pouvaient pas décider pour les Allemands ou les Espagnols !
Reste qu’après avoir voué la Troïka aux gémonies et refusé l’ingérence des créanciers dans les décisions de l’État grec, avoir appelé avec succès les Grecs à voter « non » aux demandes de ses partenaires européens, le premier ministre grec a accepté des conditions beaucoup plus dures que celles qu’il venait de refuser, des conditions qui mettent sérieusement à mal la souveraineté grecque : obligation de revenir sur certaines décisions prises depuis 6 mois et de soumettre tout projet aux conséquences budgétaires à l’approbation des créanciers etc.
Et pourtant, on peut aussi trouver que c’est une leçon de démocratie que les plus durs des créanciers européens (néerlandais, finlandais, allemands, baltes, slovènes ou slovaques) ont donné aux Grecs ; Et que les Français feraient mieux d’en prendre de la graine, eux qui sont toujours prêts à donner des leçons aux autres mais ne sont pas souvent exemplaires.
Que voulaient ces « durs » ? Oh, rien de très compliqué ! Simplement le respect des règles communes ! Celles qui limitent les déficits et la dette des pays qui appartiennent à la zone euro, règles qui faisaient tout à fait explicitement partie des conditions d’adhésion, mais que la France a la fâcheuse habitude d’oublier. Celles aussi qui veulent que quand on demande un prêt et que l’on s’engage à le rembourser, on s’organise ensuite pour y arriver !
Si on accepte de penser que la démocratie est un système qui essaie d’organiser le « vivre ensemble » dans le respect de tous, on comprendra que le respect des règles communes est indispensable à ce vivre ensemble. L’existence d’un droit écrit, s’imposant à tous, et d’une Justice pour le faire appliquer est une base incontournable de la démocratie
Ce n’est pas un hasard si ces pays qui exigent que les grecs respectent leurs engagements sont aussi ceux où un élu peut être obligé de démissionner parce qu’il a dépensé 15 euros pour ses dépenses personnelles avec sa carte bleue professionnelle. Évidemment, dans le pays des Cahuzac et Balkany, où l’on considère qu’un ancien président de la République qui a dépassé les limites de dépenses électorales peut se représenter malgré tout, on a du peine à comprendre les exigences de nos voisins du Nord. Mais n’est ce pas la preuve que nous avons encore des progrès à faire pour être de vrais démocrates ?
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