En pleine négociation sur le financement des retraites complémentaires, la publication du rapport annuel du COR vient rappeler les données démographiques, économiques et sociales du sujet de retraites. La France consacre une part de plus en plus grande de ses ressources au versement des retraites, mais les régimes ont basculé dans les déficits.
Page 44, la figure 2.5 montre que la part du PIB consacrée aux retraites est passée de 12 à 14 % entre 2000 et 2013, ce qui représente une augmentation considérable (40 milliards d’euros…). Mais comme les dépenses sont passées de leur coté de moins de 12 à plus de 14 %, l’ensemble des régimes confondus est passé d’un excédent de 0.4% du PIB (environ 8 milliards par an) en 2003 à près de 0.8% de déficit (environ 16 milliards par an) en 2010 et environ 0.4% de déficit en 2013.
Page 39, le tableau 2.1 montre les déterminants de ce qui s’est passé
D’abord le rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités est passé en 15 ans de 2.2 à 1.7 : s’il ya moins de monde pour payer la pension d’un actif, il faut que chaque actif paye plus ou que chaque pensionné touche moins. Pour faire simple, depuis 2000, les actifs ont payé plus mais dans les années qui viennent, ce sont les pensionnés qui vont toucher moins.
Comme on le voit sur le tableau, le taux de prélèvement, en pourcentage de la masse des revenus d’activité brut est passé d’environ 27 à 31% du total. Dit autrement, quand l’Etat ou les entreprises consacrent 100 euros aux salaires bruts, il y a aujourd’hui 31 euros qui vont aux caisses de retraite. Comme il y a aussi un montant important qui va dans les caisses de l’assurance maladie, on comprend qu’aujourd’hui le salaire net ne représente plus guère plus que la moitié du salaire brut chargé…
Les pensions moyennes ont légèrement augmenté sur la période, quand on les compare au revenu d’activité moyen. C’est une conséquence d’après le COR de l’effet noria, c’est-à-dire du fait que les nouveaux retraités ont des pensions plus importantes que les anciens. Le rapport n’expliqua pas plus avant cette évolution mais elle est très probablement la conséquence de l’évolution de la situation des femmes : celles-ci sont de plus en plus nombreuses à arriver à l’âge de la retraite avec une carrière complète. Le tableau 1.17 page 29 montre que de 1990 à 2014, le taux d’activité masculin des 50/ 64 ans est passé de 55 à 61 % (plus 6 points). Dans la même période, il est passé pour les femmes de 35 à 56 % (plus 21 points !). On peut donc penser que la pension de ceux qui ont eu une carrière complète a baissé par rapport au niveau d’activité moyen.
L’augmentation du taux de prélèvement depuis 15 ans est lié à une augmentation des taux de cotisation dans le privé, à des financements fiscaux de certains déficits des caisses, et de la hausse du taux de cotisation calculé pour les fonctionnaires.
La figure 2.3 page 41 montre que le taux de cotisation pour un cas type en dessous du plafond de la sécu (donc hors AGIRC) sera passé de 23 à 27.5 % entre 1990 et 2020 mais a été stable de 2000 à 2013.
Le cas des fonctionnaires est différent, puisqu’il n’y a pas de taux de cotisations négociés, mais une couverture du régime par l’Etat, comme le note le rapport page 42 :
« pour mémoire, jusqu’en 2014, les taux de cotisation des employeurs de fonctionnaires d’État – définis par décret et indiqués dans le compte d’affection spéciale (CAS) « pensions » – ont été, selon la réglementation en vigueur, ajustés au fil du temps de manière à assurer l’équilibre financier du régime ; le taux de cotisation des employeurs de fonctionnaires d’État est ainsi passé, entre 2006 et 2014, de 49,9 % à 74,28 % pour les fonctionnaires civils, et de 100 % à 126,07% pour les fonctionnaires militaires »
Rappelons que si la situation des fonctionnaires pensionnés s’améliore progressivement par rapport aux retraités du privé (et le mouvement risque de s’accentuer à l’avenir), la rémunération des fonctionnaires a connu une évolution nettement moins favorable que celle des salariés du privé depuis 15 ans.
Et demain ? Le rapport fait des projections à législation inchangée mais avec des plusieurs scénarios, selon le taux de croissance et le taux de chômage. Comme d’habitude, tout l’art des experts du COR est d’accepter de faire des scénarios avec les hypothèses optimistes avancées par tous ceux qui ne veulent pas bouger (par exemple ceux qui ne veulent pas entendre parler de reporter l’âge de la retraite, pour pouvoir en faire aussi avec des hypothèses plus réalistes, mais moins favorable ! il faut avoir à l’esprit que les scénarios les plus favorables sont probablement les moins probables
Selon les scénarios, le rapport entre la pension moyenne de l’ensemble des retraités et le revenu
d’activité moyen passerait d’un peu plus de 50% aujourd’hui à au mieux 45 % en 2060, à au pis 35% , la plus grande partie de la baisse se faisant dans les premières années
On notera page 40 avec la figure 2.2, que l’âge moyen de départ en retraite, actuellement de 61 ans, passerait à 63 ans en 2025 et à 64 ans en 2040. On a ici l’impact conjugué des mesures pour augmenter le nombre de trimestres exigés et de l’allongement de la durée des études initiales, qui fait que les plus jeunes démarrent plus tard que leurs ainés dans la vie active
Je compte revenir sur les aspects démographiques du rapport
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