La menace de sanctions financières comme les retraits massifs de capitaux n’empêchent apparemment pas Vladimir Poutine de manœuvrer pour annexer la partie orientale de l’Ukraine, en envoyant ses militaires jouer les provocateurs. Il n’est pas le seul à faire passer la politique avant l’économie
Au moment où le gouvernement de Kiev alerte l’ONU sur les actes de « guerre » commis par des groupes pro-russes probablement emmenés par des militaires russes en civil, je lisais dans un numéro ancien seulement de quelques jours (daté du 8 mars) un « éclairage » doctement donné par un chroniqueur économiste pour le Monde et expliquant que « le Kremlin n’a pas les moyens » de se permettre une nouvelle détérioration de la situation internationale et que donc « il est probable que Moscou s’en tiennent aux positions acquises ».
L’erreur du chroniqueur, Jean-Pierre Petit, ne tient pas dans son analyse de la situation économique et financière de la Russie, laquelle n’a connu une forte croissance dans les années 2000 qu’en raison de l’explosion des cours du pétrole, mais dans la croyance que cette raison pouvait être prioritaire pour le pouvoir russe. Comme si l’intérêt économique objectif pouvait passer avant les considérations politiques.
Non seulement ce n’est probablement pas le cas dans l’esprit d’un Poutine, mais il est tout à fait probable qu’au contraire, dans une situation économique difficile, il puisse voir dans des actions de conquête un moyen de susciter une adhésion nationaliste chez ses concitoyens et de les détourner des critiques que devrait susciter chez eux la croissance très molle que connait aujourd’hui le pays.
On peut d’ailleurs lire les gesticulations de la Chine dans son voisinage maritime de la même manière. Alors que les citoyens chinois ont de plus en plus de raisons d’être inquiet de la situation de leur pays et de s’en plaindre (pêle-mêle en raison des menaces des problèmes de dette de nombreuses institutions, de la situation des droits de l’homme ou de celle de l’environnement, les dirigeants chinois entretiennent un esprit nationaliste puissant.
La France n’a guère de leçons à leur donner en la matière. On pourrait lire les actions menées récemment en Libye au Mali et en Centre Afrique n observant que les pouvoirs y ont obtenu un soutien important de la population française. Mais la réalité oblige à dire que ce soutien ne va pas loin et ne compte pas au moment de choisir son bulletin dans l’isoloir.
Ce n’est pas dans le contexte extérieur que la politique joue à fond contre les choix économiques les plus raisonnables, c’est au moment où il faut faire des réformes ressenties comme douloureuses par une partie de la population. Alain Juppé en 1995, et Dominique de Villepin en 2005 en ont fait suffisamment l’expérience pour que les autres dirigeants soient à cet égard du prudence de sioux !
Il est vrai que le niveau de connaissances économiques de la population n’est guère élevé en France. Encore que les théories dites critiques ou hétérodoxes sont abondamment diffusées : il n’y a qu’à faire l’expérience dans une librairie : on trouve pléthore de livres expliquant à quel point le capitalisme le libéralisme (forcément qualifié d’ultra) ou les thèses classiques sont néfastes pour le pays. Il est plus difficile de trouver un livre d’économie « orthodoxe », et on a du mal à comprendre comment cette orthodoxie peut être dominante ! Et comme les théories hétérodoxes n’expliquent pas vraiment comment faire en pratique (à part il suffit de dépenser, éventuellement prendre aux riches), il ne faut pas s’étonner que notre pays soit en déficit permanent depuis 40 ans !
J’écoutais sur ARTE une émission sur les réactions de nos voisins à la déclaration de politique générale de Manuel Valls : le point de vue du représentant allemand n’était pas vraiment positif, soulignant que la France va être le seul pays de la zone euro à ne pas respecter la limite de 3% de déficit, quand tous es autres sont maintenant en excédent primaire !
Les commentaires récents