J’ai découvert jeudi ce grand titre en Une de Libération en prenant le métro, un des passagers tenant le journal grand ouvert en face de moi. Au-delà de la polémique illustrée par ce titre, je me suis fait la remarque que la presse ne contribuait pas vraiment à faire comprendre l’économie à ses lecteurs !
Le MEDEF s’est choisi un patron de combat et on peut estimer qu’il en demande toujours plus. Mais dans ce domaine, il ne se comporte guère différemment que d’autres groupes de pression : la CGT au hasard, ou ces adversaires des gaz de schistes qui proclament leur méfiance au moment même où le Conseil Constitutionnel vient de rendre un arrêt qui va dans leur sens. C’est sans doute la logique de fonctionnement des organisations qui représentent un seul groupe d’intérêt, en particulier dans notre monde médiatique.
Mais on pourrait attendre d’un journal qui, bien que se positionnant clairement à gauche, ne se veut pas (ou plus) uniquement militant, qu’il donne des clés de lecture à ses lecteurs plutôt que de les renforcer dans des convictions qui ne leur font pas comprendre les enjeux actuels.
La réalité conjoncturelle est que depuis plus de 3 ans, la part des entreprises dans la valeur ajoutée se situe à un niveau dangereux pour l’économie de notre pays. Rappelons qu’une situation du même type (mais avec un niveau encore plus dangereux, c’est-à-dire un écart avec la moyenne historique deux fois plus important) s’est prolongée au tournant des années 80, ce qui a augmenté de 1.5 millions le nombre de chômeurs, avant que le plan Delors Mauroy ne rétablisse le niveau de marge des entreprises, et que le pays se mette de nouveau à créer des emplois en 1985.
Mais on sait que les journaux se focalisent sur les enjeux politiques en occultant les enjeux économiques, comme si les deux n’étaient pas connectés. En faisant une lecture uniquement politique de l’attitude du MEDEF, Libération n’informe pas correctement ses lecteurs.
A noter que parmi les revendications patronales, il en est une autre de pur bon sens mais qui ne sera malheureusement sans doute pas écoutée, celle d’une stabilité des règles. Quand on sait que l’incertitude est une des raisons majeures du non investissement…
Il y a presque une dizaine d’années, le regretté Bernard Brunhes me racontait qu’un ministre du travail en exercice lui avait demandé ce qu’il lui conseillait de faire. Il lui avait répondu : rien pendant deux ans ! D’une part parce que les décideurs ont effectivement besoin de ne pas changer les régles en permanence. D’autre part, parce qu’il faut du temps pour qu’une mesure soit communiquée, expliquée, diffusée, comprise et puisse donner des effets.
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