Le groupe chimique Kem One a annoncé hier une demande de cessation de paiement, ouvrant la voie au redressement judiciaire. 1500 salariés sont concernés dans ce qui était il y a encore 8 mois une filiale de Total, avant la reprise par un groupe dirigé par l’américain Gary Klesch, le même qui était candidat à la reprise de Pétroplus.
Wikipédia décrit la société Klesch & Compagnie Limited comme « spécialisée dans la reprise d’entreprises européennes en difficulté » et précise que « le cas de l’entreprise Myrys a amorcé la polémique autour du personnage sur sa capacité à tenir ses promesses et en a fait une figure du "capitalisme vautour", expression utilisée par les journaux financiers anglo-saxons ».
Arkema avait vendu à l’été 2012 ses activités dans le PVC en effaçant pour 470 millions de dettes et en laissant 100 millions d’euros de trésorerie nous disait le Monde ce week-end. Le même journal précisait que d’après le président de l’union des industries chimiques l’entreprise est confrontée à deux changements importants : les prix du gaz (la matière première du PVC) aux USA sont 3 ou 4 fois moins chers qu’en France grâce au gaz de schiste et Berlin subventionne l’électricité (consommée en abondance pour la transformation). L’explication parait assez curieuse, mais ce qui est sûr, c’est que cette filière est dans une situation structurellement difficile, que la crise n’arrange pas
Gary Klesch chante une autre chanson et accuse Arkema d’avoir présenté de fausses informations au moment de la reprise. Quand on sait comment les comptes sont épluchés par des armées d’auditeurs dans ces opérations, on peut douter de la parole de l’américain, qui a commencé sa carrière dans la banque d’investissement.
Il y a une autre hypothèse, celle que susurrent les syndicats en observant que le groupe Kem One opère des mouvements financiers suspects vers Malte et Jersey, et que renforce Arkema en observant que Klesch « n’a pas mis un euro dans l’entreprise » : le groupe repreneur ne cherchait pas vraiment à redresser l’entreprise, il voulait seulement siphonner la trésorerie.
Pour réussir à redresser des entreprises en difficulté, il faut réduire les dépenses et / ou augmenter les recettes, et donc procéder à des restructurations souvent douloureuses pour faire évoluer le modèle économique. Mais cela suppose souvent d’investir et d’assurer la trésorerie le temps que l’exploitation sorte du rouge : il faut donc apporter une expérience du redressement et des fonds propres. C’est la logique d’un fonds comme Butler, qui n’aboutit pour autant pas toujours.
Il y a d’autres sociétés, qui n’apportent pas ou très peu de fonds propres mais cherchent au contraire à récupérer le plus vite possible l’argent liquide disponible, soit apporté par le vendeur, comme c’est le cas ici, soit en ne payant pas les fournisseurs (cela semble aussi le cas ici), soit en profitant d’aides de la collectivité. L’un des moyens de récupérer la trésorerie consiste à faire facturer par la holding des « prestations » qui conduisent surtout à affaiblir encore plus la société reprise. La société dirigée par Gary Klesch ressemble furieusement à ce type de société.
Ce sont ces fonds qu’attirera inévitablement le gouvernement, s’il persiste à vouloir obliger les entreprises voulant fermer un site à dérouler le tapis rouge (y compris en cédant la marque) à ceux qui promettront tout ce qu’on leur demandera de promettre. Les salariés qui se verront licenciés dans des conditions bien pires que celles qu’ils auraient obtenus avec leur entreprise d’origine, seront les dindons de la farce
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