Une centaine de vieux sages (du moins on le suppose) vont donc s’enfermer pour choisir l’un d’entre eux et en faire le pape de plus d’un milliard de catholiques. Le scrutin est parait-il ouvert, mais au-delà du choix de l’homme, ce qu’il fera de sa mission est sans doute moins écrit qu’on peut le penser à vouloir plaquer nos étiquettes classiques sur cette élection hors norme.
Le pape Benoit XVI qui vient de démissionner était d’abord un théologien. Sa principale contribution aura été, comme responsable de la Congrégation pour la doctrine de la foi puis comme pape, d’avoir parachevé le travail ouvert par Vatican II, pour lequel il avait tenu un rôle remarqué, malgré sa jeunesse. On est passé d’une théologie qui avait presque oublié l’Evangile pour se lancer dans des spéculations prétendument thomistes mais surtout marquées par le pessimisme, à une théologie qui revient à l’Evangile et aux autres textes du Nouveau Testament et qui fait son miel des recherches de l’exégèse.
A lire les journaux, il semble qu’une bonne partie de cardinaux veuille aussi poursuivre une autre œuvre de Vatican II, celle d’une certaine décentralisation. Pendant le concile, grâce à Jean XXIII, les évêques réunis avaient pris le pas sur une Curie qui imaginait continuer à tout régenter au nom du pape. Aujourd’hui, il semble que la question de la gouvernance de l’Eglise soit sur la table, avec des demandes de transparence et de transversalité dans le fonctionnement de la Curie, et aussi de plus grande collégialité des décisions.
Le nouveau pape, quel qu’il soit, ne fera pas basculer l’Eglise vers les évolutions que certains imaginent, comme la fin du célibat des prêtres, l’acceptation du divorce et encore moins de l’avortement. Mais il peut donner plus de place aux diacres (qui peuvent être mariés) et trouver les moyens d’accueillir les divorcés remariés, comme le souhaitait le cardinal Martini. On peut aussi rêver qu’il donne moins d’importance à la sexualité (même si cette importance est sans doute plus faible que ce qu’en renvoient les médias.
Je me méfie aussi de l’image que donnent ces médias qui avaient fait un vrai méchant de Ratzinger le « panzer cardinal » : tout le monde fut étonné de trouver un pape humble et douxl.
De tous les articles que j’ai pu lire, celui qui m’a paru le plus intéressant est paru dans Ouest France : un entretien avec Marco Politi, un éditorialiste italien présenté comme un vaticaniste de renom. Celui-ci explique que le mécanisme d’obéissance dans l’Eglise fait qu’on ne peut préjuger à l’avance de ce que fera le futur pape : il peut y avoir une double surprise, sur le nom du pape et sur ce qu’il fera.
J’ai aussi été surpris de trouver sur Slate une description détaillée des « papabile ». Il est vrai que l’auteur en est Henri Tincq, qui fut spécialiste des questions religieuses au Monde pendant des décennies.
Si je pouvais faire un vœu, c’est que le nouveau pape freine les tentations vers une liturgie plus adoratrice qui créerait de la distance, alors que tout l’Evangile nous montre que Jésus est au contraire briser la distance entre Dieu et son peuple, ce que Vatican II avait traduit dans le tutoiement du Notre Père et dans le rapprochement de l’autel.
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