L’Union Européenneet le FMIO ont décidé de venir en aide à la République de Chypre, dont les banques sont menacées de faillite, avec un montant de dix milliards d’euros, soit plus de dix milles euros par chypriote. Les conditions du plan, qui prévoit une taxe de 6,75 % à 9.9 % sur tous les dépôts bancaires font grincer des dents les épargnants
La République de Chypre (qui couvre aujourd’hui la partie sur de l’Ile, le Nord étant occupé par la Turquie) est entrée en 2004 dans l’Union Européenne et a rejoint la zone euro au premier janvier 2008.
Si le tourisme représente une part importante du PIB (15%), la croissance a été tirée jusqu’en 2008 par le développement du secteur bancaire, qualifié d’hypertrophié par le Monde qui note que c’est l’activité principale de l’Ile et que les actifs détenus par les banques représentent 8 fois son PIB (je serais curieux de savoir ce que représentent ce même secteur en France, mais on est très probablement loin des 16 000 milliards que représenteraient 8 ans de PIB).
Ce développement bancaire s’appuie semble-t-il sur s’appuie sur des dispositions fiscales très favorables et sur un accès privilégié à une nombreuse clientèle russe, par ailleurs fortement suspectée de blanchiment.
D’après Wikipédia, Chypre a mené une politique de réduction de ses déficits pour entrer dans l’euro.
« Le gouvernement chypriote a lancé un « programme de convergence 2004-2008 ». Le triple objectif était de ramener le déficit budgétaire sous la barre des 3 %, de faire repasser la dette publique en dessous du ratio de 60 % du PIB et d’assurer la soutenabilité des finances publiques, est sur le point d'être respecté. En 2007, Chypre affichait un solde budgétaire de 3,3 % en excédent, la dette publique n'était plus que de 59,8 %. »
Ces efforts ont été mis à mal par la crise financière de 2008 (qui a dû réduire fortement l’activité bancaire) puis par la crise grecque avec laquelle l’ile a des liens très importants (les chypriotes parlent grec ou turc). De 2008 à 2012, le chômage explose, passant de 4,2 à plus de 12 % ; le PIB par habitant diminue et le pays entre en récession en 2009 et de nouveau depuis 2010, atteignant -2,4 % au deuxième trimestre 2012.
L’annulation d’une partie de la dette grecque coûte cher au secteur financier chypriote : d’après le Monde, Chypre, gros détenteur d'obligations grecques, a perdu pas loin de 4,5 milliards dans l'opération (soit environ un quart de son PIB annuel, comme si les banques française perdaient deux fois le budget annuel des retraites)
Devant la gravité de la situation fin 2012, et toujours d’après le Monde, un budget d'austérité a d'ores et déjà été voté pour 2013, afin de réduire le déficit de 1,3 milliard d'euros : il prévoit notamment un recul de l'âge de la retraite à 65 ans, un re calcul des pensions des fonctionnaires et des coupes dans les effectifs du secteur public. Des privatisations ont été décidées et un alourdissement de la fiscalité pourrait être imposé, notamment aux entreprises et aux banques
Mais Chypre doit également demander une aide de 17 milliards d'euro à l'union européenne pour soutenir son économie. Et dans ce cas, il y a forcément une négociation, dans laquelle sont impliqués la BCE, les allemands et le FMI.
Or les européens, qui n’ont pas plus envie d’ouvrir leur bourse sans conditions, ont de bonnes raisons de ne pas se précipiter pour aider Chypre ; d’une part, beaucoup d’entre eux n’apprécient guère les pays qui jouent au moins disant fiscal (et leurs enlèvent donc des recettes) et d’autre part, ils soupçonnent l’argent russe présent à Chypre (estimés à 15 ou 20 milliards d’euro) d’être souvent là pour être blanchi. Le pays a fait des efforts pour lutter contre l’argent sale, d’abord en adaptant sa législation, mais « en novembre 2012, l'hebdomadaire allemand Der Spiegel a mis le feu aux poudres, en révélant un rapport des services secrets germaniques, indiquant que si les lois étaient en place, elles étaient peu appliquées. »
Il est vrai aussi que le montant demandé était énorme puisqu’il correspond à un an de PIB chypriote. La manière dont la somme doit être versée et à qui n’apparait pas encore clairement, mais on imagine qu’à ce niveau, il y aura des problèmes de remboursement !
Toujours est-il que le FMI et l’Allemagne ont signifié qu’il n’était pas question d’aller au-delà de 10 milliards d’euros et ils ont exigé une mesure qui suscite aujourd’hui la colère des épargnants chypriote : rien moins qu’une taxe exceptionnelle sur les dépôts, de 6,75 % pour la part en dessous de 100 000 euros, et de 9.9 % pour les éventuelles part au-dessus de cette somme. La mesure est censée rapportée 5.8 milliards d’euros, ce qui signifie qu’elle représente une ponction d’un tiers du PIB annuel. Comme si la France décidait d’une taxe spéciale de 650 milliards d’euros (dans notre cas, 15 ans d’impôt sur le revenu !).
Si seuls les résidents étaient taxés, cela représenterait environ 7 000 euros par personne (enfants compris). Le développement hypertrophié du secteur bancaire peut laisser penser qu’une bonne partie de ces taxes seront payées par des non-résidents. En contrepartie, les déposants recevront des parts du capital des établissements concernés.
Il est difficile de savoir quelles seront les conséquences d’une telle décision. Celle-ci doit aussi être votée par l’Assemblée chypriote. Il y a un risque évident que les non-résidents liquident leur compte (la taxe sera prélevée au préalable, mais ce sera une difficulté de plus pour les banques). Il y a aussi un risque pour l’ensemble des économies de la zone, une telle décision constituant un précédent.
A suivre donc !
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