La dirigeante du Front National a voulu faire croire qu’il y avait une chance que l’élection de son adversaire aux législatives soit invalidée, en dépit d’une jurisprudence constante du Conseil Constitutionnel en sens inverse. Cela lui permet de se poser une fois de plus en victime du système.
Je m’étais fait l’écho sur ce blog du risque d’invalidation de l’’élection dans la 11ème circonscription du Pas de Calais, et du risque du renversement du résultat en cas de réélection, du fait de la baisse de popularité de l’exécutif et des affaires judiciaires à la tête de la fédération départementale du PS . J’avais en effet lu qu’une cinquantaine de suffrages étaient contestés, les signatures sur les feuilles d’émargement paraissant différentes ente les deux tours.
Vendredi matin, jour de la décision du Conseil Constitutionnel, en lisant mon gratuit, je découvre que la demande vise « une cinquantaine de cas » (ce qui signifie probablement moins de 50) mais que l’écart est de 118 voix. Ayant lu plus d’une fois des décisions du conseil, je m’étonne : le nombre de suffrages incriminé étant inférieur à l’écart entre les candidats, on ne voit pas comment l’élection pourrait être annulée.
Mais je suis loin d’être un spécialiste : l’élection pourrait être annulée selon un argument que j’ignore, comme celle de Devedjian a été annulée parce que son suppléant l’était déjà d’un sénateur, indépendamment du nombre de voix d’écart.
La décision qui tombe l’après-midi est cependant conforme à ce que j’imaginais. Le conseil a accepté d’annuler 12 suffrages (37 des électeurs concernés ont reconnu formellement avoir voté en personne lors des deux tours de scrutin écrit le Conseil, on peut même imaginer que les douze autres, qui ont refusé une telle déclaration sont des électeurs frontistes, mais on n’en sait évidemment rien), mais cela ne peut que diminuer l’écart à 106 voix donc l’élection n’est pas invalidée
Une petite explication du raisonnement logique au passage. S’il y a 10 voix d’écart et qu’on en annule 20, on ne peut savoir pour qui étaient les 20 voix annulés, donc on ne peut pas savoir qui déclarer vainqueur : on refait donc le vote. Si l’écart initial est de 50 voix et qu’il y en a 20 litigieuses, quelques soient leur destination, cela ne peut pas remettre en cause le résultat.
J’imagine que les spécialistes du droit constitutionnel qui ont aidé Marine Le Pen à faire son recours savaient très bien qu’il n’avait aucune chance d’aboutir. Le but était donc uniquement de faire parler d’elle et de se poser en victime « du système » une nouvelle fois. Cela marche probablement auprès des militants et des sympathisants.
Le discours était déjà prêt et la riposte rodée, les deux députés frontistes ayant dès l’annonce de la décision déposé un projet de loi pour modifier la composition du Conseil Constitutionnel. Il est d’ailleurs frappant que Marine le Pen ne réagit absolument pas sur le fond pour expliquer pourquoi juridiquement la décision n’est pas logique, elle proclame simplement que la décision est politique.
Jean Marie le Pen nous avait habitué à déclarer régulièrement qu’il faisait un procès contre tel ou tel ou sur tel ou tel sujet, comme si le fait de faire le procès prouvait qu’il avait raison, ou que le fait qu’il ait raison sur la forme prouvait qu’il l’avait sur le fond.
Marine le Pen était donc à bonne école, mais on n’est pas obligés d’être dupes !
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