La dette au sens de Maastricht est une dette brute, qui ne prend pas en compte les avoirs des administrions cotées. Certains avoirs (immobiliers par exemple) sont peu liquides, mais l’INSEE suit la valeur des actions cotées et des OPCVM pour calculer une dette nette. Celle ci est d’un montant non négligeable et a varié dans des proportions importantes depuis 15 ans.
Le numéro 239 de la revue de l’INSEE « informations rapides » paru le 28 septembre 2012 fait le point de la dette publique à la fin du deuxième trimestre, en comparaison de la situation à la fin du trimestre précédent.
La dette brute de la France se monte à 1832,6 milliards d’euros, soit 91% du PIB. Cela représente environ 28 K€ par Français. Sur ce total, la dette de l’Etat lui-même est de 1433,2 milliards, celle des administrations publiques locales de 161,3milliards et celle des administrations de sécurité sociales de 228,4 milliards d’euros.
Au cours du deuxième trimestre, la dette brute a encore augmenté de 43,2 milliards d’euros, mais la dette nette n’a augmenté « que » de 25,7 milliards.
En effet, l’Etat et les diverses autres administrations qui contribuent à la dette publique ont aussi des avoirs cotés en Bourse, que ce soit des actions ou des OPCVM. L’INSEE ne nous donne pas dans ce document la répartition entre actions et OPCVM : on apprend seulement que du fait de la baisse de la Bourse, la valeur des actions a baissé de 1,5 milliards sur le trimestre.
Au total, l’ensemble des administrations publiques détenaient pour 173,4 milliards d’euros de valeurs cotées. Certaines sont très liquides et peuvent donc être vendues du jour au lendemain, sur simple décisions des trésoriers des institutions correspondantes. D’autres, bien que théoriquement vendables, ne le sont pas réellement sans conséquences politiques : il s’agit des actions des sociétés cotées. On n’imagine pas la direction du trésor vendre tout ou partie des actions EDF détenues par l’Etat (qui font logiquement partie de ce total) sans une décision politique.
Toujours est-il que la somme de 173,4 milliards n’est pas négligeable puisqu’elle représente environ 8 ,5 % du PIB. La dette nette des administrations publiques (APU) est de 1616,2, soit 216,4 milliards d’euros de moins que la dette brute. Pour obtenir ce dernier total, il faut en effet ajouter aux valeurs cotées d’autres actifs (pour 43 milliards donc !), notamment des prêts consentis par les APU : par exemple 9.8 milliards prétés à d’autres pays de la zone euro (dont on peut se demander sérieusement si on les retrouvera un jour…).
Le document comprend un graphique représentant l’évolution de la valeur des actifs cotés : celle ci, qui se situait autour de 30 milliards en 1995/1997, est montée à plus de 150 milliards en 2000, redescendue à 50 milliards en 2002, a atteint un sommet de plus de 300 milliards en 2007, avant de redescendre (sans continuité) aux valeurs actuelles
On peut imaginer que ces valeurs sont le résultat des décisions de gestion de la trésorerie prises par les différents services concernés, pour profiter au mieux des fluctuations des taux d’intérêt.
Avec de tels écarts, il est possible de faire varier la dette au sens de Maastricht (c’est à dire la dette brute) de plusieurs points, simplement par des décisions de gestion de la trésorerie. Le montant des valeurs cotées détenues par les APU est du même ordre de grandeur que la somme des déficits attendus si François Hollande tient ses promesses de campagne, c’est à dire un déficit de 3% en 2013 et un équilibre en 2017.
On comprend donc que la promesse de stabiliser la dette à un euro près sans préciser s’il s’agit de la dette brute ou nette, s’il s’agit de la dette de l’ensemble des APU ou seulement celle de l’Etat ne participe que du discours politicien : dans les deux cas, le choix de l'une ou l'autre solution peut faire varier l'évolution de la dette sur cinq ans de plusieurs milliards d'euros. Ce n’est d’ailleurs pas à la gloire des journalistes de s’en contenter. On se demande finalement qui nous prend pour des idiots !
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