Les alertes sur la baisse du nombre d’enseignants sont tellement excessives qu’on ne sait plus en ces jours de rentrée s’il faut s’alarmer de la restriction des moyens ou s’inquiéter de la difficulté à trouver comment améliorer des résultats relativement médiocres depuis longtemps. Les propositions des politiques montrent que la solution miracle n’a pas été trouvée.
Jeudi 1er septembre, le Monde donnait la parole à Martine Aubry et titrait "le statut des enseignants au cœur des débats". En effet, la maire de Lille envisage la négociation d’un nouveau contrat avec les ensignants, leur donnant les moyens « de travailler collectivement ». En contrepartie, elle parle clairement de revalorisation du métier, en observant que les comparaisons internationales montrent que les professeurs sont mieux payés ailleurs. Martine Aubry semble ainsi vouloir éviter l’erreur de Lionel Jospin qui avait revalorisé les salaires sans contrepartie.
Encore faut-il être sûr de savoir qu’elles sont les évolutions des pratiques des enseignants qui seraient le plus favorable à la qualité de l’enseignement ! Dans un des tous premiers articles que j’ai publié(en 2005, autant dire pendant la préhistoire), je notais les propositions d’une amie : donner au chef d'établissement la réelle responsabilité, avec notamment le choix de son équipe et la responsabilité pédagogique et demander aux enseignants de faire l'ensemble de leur service au sein de l'établissement pour être à la disposition des élèves (idée reprise ensuite par Mme Royal, soit parce qu’elle lit mon blog, soit parce qu’elle connait mon amie, soit parce que c’est loin d’être une idée neuve). Mon amie s’appuyait sur le fait que, aux questions posées aux enfants « aimez-vous venir à l'école » et « aimez-vous votre (ou vos) professeur(s) », les réponses positives sont deux fois plus nombreuses en Angleterre qu'en France.
Comme presque toujours en France, le travail de réflexion a déjà été fait, la difficulté étant de mettre en place des solutions qui représentent souvent la remise en cause d’habitudes solidement installées. Reprenons donc les principales conclusions du rapport de la commission présidée par Marcel Pochard en janvier 2008 :
Mieux reconnaître le rôle, le travail et l’engagement des enseignants
Stimuler le travail en équipe
Rénover la gestion des ressources humaines
La deuxième proposition comprenait une sous proposition pour revoir les obligations de service des agents « aujourd’hui exclusivement définies en temps de service devant les élèves". C’est cette idée que Martine Aubry reprend, en faisant de la première proposition une contrepartie à cette idée.
La troisième proposition notait que la formation initiale ne répondait pas bien au besoin : on savait déjà que la formation en IUFM n’était guère adaptée, mais la commission n’imaginait pas de la remplacer par une année de formation généraliste théorique supplémentaire !
Cette troisième proposition comprenait aussi un paragraphe sur le système d’affectation des postes, qui conduit à envoyer les débutants dans les zones les plus difficiles et à un turn-over important dans ces mêmes établissements. Il me semble que ce problème est sans doute à la fois le plus grave et le plus difficile à résoudre. Il faudra du temps pour comprendre si les nouvelles règles adoptées l’an dernier pour les débutants ont un impact positif mais on sait déjà que les perdants sont les générations qui les ont précédé de peu.
Au début de son entretien, Martine Aubry dresse un état des lieux sans concession des évolutions menées depuis 10 ans, en restant modérée au regard de ce qu’on peut lire d’habitude, et qui pourrait faire croire à un lecteur n’ayant que cette source d’information qu’il n’y a plus que des ruines dans l’Education nationale, avec une augmentation considérable du nombre d’élèves par classe.
Une discussion sur le blog de Hughes m’a amené à aller regarder les chiffres de plus près : en trente ans, le nombre d’instituteurs a augmenté de 10% environ, le nombre d’enfants étant en baisse de 10% également. Dans le même temps, le nombre de professeurs a beaucoup augmenté dans le secondaire, mais le nombre d’élèves également. Si on raisonne en taille des classes, le nombre d’élèves a baissé de 15% entre 1981 et 2005, et augmenté d’environ 5% depuis. Le nombre d’élèves moyen par classe étant de 21, l’augmentation est donc de 1 élève par classe. Le gouvernement prend ainsi le risque de dégrader l’efficacité du système, mais on est très loin des évolutions catastrophiques que les discours de certains annoncent. J’ai aussi pu observer que le nombre d’élèves par classe est le plus élevé …à Paris !
Je ne trouve pas dans le discours de la gauche d’allusion à ce qui reste peut être le résultat le plus grave : le trop grand nombre de sorties sans qualification du système scolaire. On sait que les jeunes concernés ont un taux de chômage entre 40 et 50% pendant des années.
La droite s’en est officiellement inquiétée tout en supprimant les RASED, en organisant un soutien particulier de deux heures par semaine pour les enseignants du primaire, mesure qui a soulevé une résistance de principe (que personnellement je ne trouve pas à l’honneur des intéressés). La dernière évaluation nationale donne un progrès avec une baisse du nombre d’élèves faibles mais peu d’impact sur le nombre d’élèves très faibles. Il faudra cependant plus d’une évaluation pour être sûr de l’effet positif.
Pour conclure, je ne peux que souhaiter la réussite cette année aux élèves et à leurs enseignants !
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