Symbole de la peur et de l’ignorance du nucléaire, hier à la radio : un syndicaliste de l’usine valenciennoise de Toyota disait qu’il arrêterait les chaînes s’il n’était pas sûr que les piéces détachées venues du Japon ne sont pas irradiées. Un petit article sur la radio activité s’impose donc.
Un petit tour sur Internet permet de découvrir le site la radioactivité.com « né de l’organisation au Palais de la Découverte, à la fin 2000, d’une exposition - La radioactivité, une facette de la nature - qui permit de réaliser une maquette en interne. L’ouverture sur Internet s’est faite un an plus tard en octobre 2001 . grâce au soutien de l’IN2P3, du CNRS/Images-Media et de l'éditeur scientifique EDP-Sciences. » Il s’agit clairement d’un site scientifique, et il est clairement favorable à l’utilisation civile du nucléaire.
Chaque élément a plusieurs variantes qu’on appelle isotopes : si ceux-ci ont tous le même nombre de proton (ce qui caractérise l’élément), leurs nombre de neutrons sont différents. Ainsi l’hydrogène qui a un proton et zéro neutron, a deux isotopes, le deutérium et le tritium, qui ont respectivement un et deux neutrons. Les isotopes d’un même élément ont les mêmes propriétés chimiques mais des propriétés nucléaires différentes. Certains isotopes ( un ou plus comme dans le cas de l’hydrogène qui en a deux), compris dans la vallée de stabilité, sont stables. Les autres, pour des raisons de déséquilibre entre le nombre de protons et de noyaux sont instables, c'est-à-dire qu’ils se désintègrent en émettant de l’énergie et de la radio activité.
L’énergie produite par une désintégration, très faible évidemment pour un seul atome, est cependant considérable. Il faut dire qu’une particule alpha qui va devenir un noyau d’hélium est éjectée à une vitesse de 15 000 km par seconde, ce qui lui donne une énergie cinétique considérable. L'énergie libérée par la fission d'un noyau d'uranium est de 200 millions d’électronvolts, 33 millions de fois celle libérée par la combustion d'un atome de carbone.
Les éléments instables le sont plus ou moins : on appelle période ou demi vie le temps nécessaire à la désintégration de la moitié d’entre eux et ces demi vies peuvent se compter en micro secondes ou en centaines de millions d’années !
Les éléments dont la demi vie est courte disparaissent très vite : ils ont donc normalement disparus de la surface de la terre….sauf s’il y a un mécanisme qui les produit en permanence ! Il existe trois sources de radio activité dans la nature (on va donc parler de radio activité naturelle.
D’abord les éléments instables mais de vie très longue : ce sont l’uranium 235 et l’uranium 238 (aux demi vie respectives de 700 et 4500 millions d’années) et le thorium 232 (14 milliards d’années)
Ensuite les « descendants » des éléments précédents, c'est-à-dire les produits de leur désintégration. L’uranium 238 donne ainsi par désintégration successive du thorium 234, du protactinium 234, de l’uranium 234, du thorium 230, du radium 226, du radon 222, du polonium 218, du plomb 214, du bismuth 214, du polonium 214, du plomb 210, du bismuth 210, du polonium 210 et enfin du plomb 206 qui est stable. La demi vie de ces éléments varie entre 164 micro secondes et 245 500 ans !
Enfin les produits des rayons cosmiques dont l’exemple le plus connu est le carbone 14 dont la demi vie est de 5700 ans.
La radio activité naturelle correspond en moyenne à 2 milli sievert(mSV) par an. Elle augmente avec l’altitude (doublement tous les 1500 m) en raison de l’influence des rayons cosmiques (ce qui fait qu’un voyage en avion à haute altitude vous soumet à des radiations assez importantes) ; Elle dépend aussi des ragions, les zones granitiques comme la Bretagne ou le Massif Central ayant une radio activité plus élevé. Les zones possédant des gisements de minerai avec du thorium 232 ont des radio activités qui peuvent être jusqu’à 10 fois supérieurs à la moyenne. Les études n’ont pas pour l’instant montré d’impact de ces différences.
Assez curieusement, si une partie de la radio activité vient de l’air, du ciel ou du sol, une partie (environ 025 mSV) vient du corps humain ! Toutes les secondes, un corps de 80 kg subit 8 000 désintégrations, émanant à peu prés à égalité du carbone 14 et du potassium 40 (en fait un peu plus pour ce dernier). Le potassium 40 est un isotope naturel de période de 1,277 milliards d’année
Pour comprendre ce chiffre de 8000, il faut se rappeler qu’une masse de 12 grammes de carbone contient 600 000 000 000 000 000 000 000 atomes de carbone, et que donc les 4000 atomes de carbone 14 qui se désintègrent chaque seconde n’en représentent qu’une partie réellement infime
En plus du rayonnement naturel, les hommes subissent également un rayonnement artificiel, estimé au total à 1.5 mSV par an, soit presque autant que la radio activité naturelle. L’essentiel en est d’origine médicale pour les examens et les soins.
Les retombées nucléaires représenteraient 0.02 mSV, la recherche moins que ce montant, l’industrie nucléaire encore moitié moins et le reste de l’industrie aussi.
Ces chiffres ont varié dans le temps (voir ici) : au milieu des années 60, l’impact des essais nucléaires atmosphériques ont représenté jusqu’à 0,1mSV. Les essais ayant été arrêtés et les matières fissiles diminuant du fait même de leur activité, l’impact est passé en dessous de 0.01 mSV au début des années 80
L’accident de Tchernobyl a provoqué un rayonnement moyen à l’échelle de la planète de environ 0.05mSV sur le moment, l’impact diminuant rapidement avec le temps puisque le total Tchernobyl + essais était en 1995 égal à ce qu’il était en 1986 avant l’accident. Les retombées de Tchernobyl qui sont devenues faibles (toujours à l’échelle de la planète) sont encore supérieures aux effets de toutes les centrales nucléaires réunies
Le paragraphe précédent ne peut être compris que si on rappelle que la production radio active d’une arme ou d’une centrale nucléaire comprend des éléments de durée et de radio activité variable, mais que les éléments sont à forte radio activité ou à longue vie, mais pas les deux ensemble.
Par exemple, Tchernobyl a notamment laissé échapper de l’iode 131 et du césium 137. Le premier a une durée de vie de 8 jours. Il représentait une radio activité 5 à 10 fois supérieure à celle du second juste après l’accident. Mais celle-là a été divisée par 2 en 8 jours, par 1000 en 80 jours, par un milliard en 240 jours, par 10 puissance 13.5 en un an et au bout de 25 ans, elle a été théoriquement divisée par 10 à la puissance 112, ce qui signifie en réalité qu’il y a belle lurette qu’elle a totalement disparue !
La durée de vie du césium 137 est de 30 ans. Cela le rend 1400 fois moins radio actif que l’iode 131, c'est-à-dire que pour un poids très proche (137 contre 131), il émet au départ 1400 fois moins de radio activité que l’iode. Par contre, 25 ans après, son activité n’a pas encore été tout à fait divisée par 2.Aujourd’hui, avec le strontium 90 qui a une durée de vie de 29 ans mais qui était au départ en quantité moindre, il est responsable de l’essentiel de la radio activité post Tchernobyl.
Une radio activité qui a donc été divisée par 10 ou 20, selon que l’iode représentait au départ 5 ou 10 fois plus d’activité que le césium, ce qui suppose qu’il représentait un poids 140 à 300 fois plus faible que le césium (si vous comprenez cette phrase, c’est que vous avez vraiment suivi, sinon, il faut peut être relire une fois ou deux les paragraphes qui précédent)
Dans 300 ans, la radio activité de ces deux éléments aura été divisée par mille, dans 600 ans par un million. D’ici là d’autres radio éléments présents au départ dans le nuage prendront le relais pour constituer l’essentiel de la radio activité résiduelle.
Parmi eux, il y aura probablement trois éléments de la chaîne de filiation de l’uranium 238, certainement présents dans les rejets : l’uranium 234 dont la période est de 245 500 ans, le thorium 230 dont la période est de 75 380 ans et le radium 226 dont la périodicité est de 1600 ans. C’est logiquement ce dernier qui représente probablement aujourd’hui parmi eux la plus forte radio activité, mais celle-ci est, à nombre de noyaux égal, 50 fois plus faible que celle du césium 137, et 70 000 fois plus faible que celle de l’iode 131. Celle du thorium 230 est encore 50 fois plus faible, c'est-à-dire 3 500 000 plus faible que celle de l’iode 131, toujours à nombre d’atomes égal. On n’est évidemment même pas capable de le détecter avec nos instruments.
Le nuage radio actif issu de l’accident de Fukushima arriverait parait il en France au milieu de la semaine. L’autorité de sûreté nucléaire estime que les doses ne seront pas assez fortes pour être détectées, le volume des fuites n’ayant rien à voir avec ce qu’il avait été à Tchernobyl (de plus il a été envoyé moins haut en altitude et donc va moins loin).
L’impact d’un voyage Paris New York en avion est estimé à 0.03mSV, à cause de l’effet des rayons cosmiques. Les français résidants au Japon qui ont préféré rentrer chez eux après l’accident ont probablement reçu ainsi un plus fort rayonnement que s’ils étaient restés à Tokyo…
Autre question : quelles sont les doses dangereuses? Pendant un temps, on a pensé que le danger augmentait avec la dose, mais qu'elle existait dès le début de celle ci; ce n'est plus si sûr, et l'ancienne version du site avançait qu'il était même possible que des faibles dioses soient bénéfiques! La version actuelle note que la dose à partir de laquelle des risques apparaissent (c'est à dire qu'il n'y en aurait pas en desous) pourrait être selon des biologistes d'environ une centaine de mSV soit 50 fois le niveau de la radio activité naturelle
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