Dans un article précédent, je reprenais un commentaire du Monde qui soulignait la force du sentiment d’insécurité chez les habitants des quartiers classés en ZUS, les quartiers dit sensibles. La publication du rapport intégral de l’ONZUS amène à corriger fortement l’impression donnée par la lecture du Monde
J’ai publié le 16 décembre un article sur les quartiers sensibles, qui s’appuyait sur la publication par l’INSEE du résumé d’une étude de Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS) mais aussi sur les données publiées par le Monde, qui avait eu accès à l’ensemble du rapport. La manière dont il en avait rendu compte ne m’avait guère satisfait mais j’avais repris en fin d’article ce qu’il disait sur la délinquance : Le Monde publie un graphique qui montre que pour les habitants des ZUS la question de la délinquance est nettement plus importante que chez les habitants des quartiers voisins (53% contre 26%). Ce sont les pauvres qui sont les premières victimes de la délinquance des pauvres. Je reprenais ainsi une des idées mises en avant par Laurent Mucchielli.
L’INSEE a fini par publier l’ensemble du rapport, en renvoyant sur le site de l’ONZUS. Ce rapport complet est très détaillé puisqu’il fait 321 pages On y trouve des chapitres sur l’emploi, l’activité économique, les revenus des habitants, la santé, les établissements et la réussite scolaire, la sécurité et la tranquillité publique ainsi que toute une partie sur l(‘impact de la politique de la ville.
On trouve page 248 le graphique publié par le Monde, qui montre le sentiment d’insécurité, dans le chapitre consacré à cette question. Ce que ne souligne pas le Monde, et que l’on trouve dans cette même page, c’est la comparaison des résultats de l’enquête faite en janvier 2010 avec celle réalisée cinq ans plus tôt, qui montre une décrue de ce sentiment d’insécurité. A la question, « votre quartier est il concerné par la délinquance ? », on trouve en 2010 53% de réponses positives, contre 63% en 2005. Il est vrai que le recul est également visible pour les quartiers de l’unité urbaine hors ZUS, où la réponse positive à cette question passe de 32 à 26%.
Si on veut avoir une idée, non pas du sentiment d’insécurité, mais de l’insécurité réelle, il faut remonter au chapitre précédent, sur les faits constatés. Un encart bienvenu rappelle que l’outil statistique repose sur les faits déclarés, et que donc leur variation peut couvrir soit une variation des faits eux-mêmes, soit une variation dans leur déclaration. Sous le titre du chapitre, un résumé donne l’essentiel de ce qui s’y trouve :
En 2009, le taux de délinquance globale en Zus reste inférieur à celui de leurs circonscriptions de sécurité publique (CSP). Mais si le taux d’atteintes aux biens y est inférieur de 8 %, par contre celui des atteintes aux personnes y est supérieur de 11 %.
En un an, la délinquance a augmenté dans ces quartiers de 3,2 % alors qu’elle diminue de plus de 2 % dans leurs CSP. En Zus, les atteintes aux biens augmentent ainsi de 2,8 % et les atteintes aux personnes de plus de 7 %. Cependant, entre 2005 et 2009, le taux de délinquance a diminué de 11 % dans les Zus : en quatre ans, les atteintes aux biens ont baissé de près de 15 % alors que les atteintes aux personnes ont progressé de 7,1 %.
Sans entrer dans le corps du texte, on notera que les niveaux de délinquance peuvent être très différents d’un quartier à l’autre, comme le montre le tableau de la page 233 et le titre qui affirme qu’elle varie du simple au triple selon les régions.
S’il donne une comparaison avec les quartiers environnants, le rapport ne dit rien de la comparaison avec l’ensemble du pays. Cela tombe bien, le portrait social publié par l’INSEE en novembre 2010 donne des éléments dont une partie se révèlent comparables. Le tableau 1 page 253 donne 3.9 vols sans violence pour 100 habitants dans les ZUS sur 2 ans quand le tableau 1 page 15 du portrait social affiche un taux de 34 ou 33 selon qu’il s’agit d’hommes ou de femmes. Les données sont donc assez proches, Si l’on regarde les agressions ou violences physiques, on trouve 2.9 % dans les deux cas.
Il faut donc conclure que malgré leur très mauvaise réputation, les Zones urbaines sensibles ne connaissent pas une délinquance très différente que le reste de la France, ce résultat recouvrant, on l’a vu, une grande variété des situations.
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