Dans notre pays marqué par la logique de l’honneur, la première condition à un bon dialogue social est le respect de ses interlocuteurs, condition qui n’est malheureusement pas toujours réunie. Le respect ne signifie pas qu’on s’interdise de dire des choses dérangeantes, au contraire.
J’ai peut être déjà rapporté cette anecdote arrivée à un de mes collègues, intervenant pendant quelques mois comme DRH de transition dans une multinationale en plein plan social. Il avait rencontré les membres du comité d’entreprise européen, et il avait répondu par la négative à toutes leurs demandes, en expliquant les raisons de ces réponses. A la fin de la réunion, les syndicalistes se sont adressé au responsable qui accompagnait mon collègue pour lui demander de l’embaucher. Pourquoi ? Parce qu’il les avait respectés en leur fournissant des explications et que par ailleurs, il avait montré qu’il connaissait son sujet, savoir faire qui à leurs yeux était indispensable pour l’entreprise.
Je suis intervenu récemment comme médiateur dans une grande entreprise industrielle, pour aider à renouer le dialogue entre la direction et les organisations syndicales. J’ai écouté les uns et les autres et je suis intervenu à une réunion commune, qui s’est bien passée, ce qui ne préjuge pas de la suite des travaux.
Je me suis demandé pourquoi cette entreprise avait besoin de moi pour renouer le dialogue. Et j’ai fait l’hypothèse (ce n’est pas une certitude), que les dirigeants de cette entreprise, hautement qualifiés, avaient avec les représentants ouvriers une attitude ressentie par ces derniers comme méprisante. Un peu comme Juppé a été ressenti comme méprisant, quand Chirac semblait réellement ressentir du plaisir à se retrouver avec d’autres personnes, quelque soit leur niveau social.
Dans notre pays où on explique à des gamins de 20 ans qu’ils sont l’élite de la France, sous prétexte qu’ils ont réussi à résoudre des problèmes de mathématiques ou de physique plus vite que les autres, il n’est pas surprenant d’arriver à des difficultés dans le dialogue social.
Quand j'emmène un de mes jeunes collègues à une réunion avec les représentants du personnel, je lui explique qu'il doit serrer la main de tous. En le faisant, il exprimera qu'il les estime dignes d'être des interlocuteurs à qui on adresse un signe de paix (montrer sa main ouverte pour un salut, c'est montrer que l'on n'a pas d'arme dedans). L'expérience m'a aussi montré que les représentants du personnel répugnaient à agresser gratuitement une personne à qui ils avaient serré la main.
L’actuel président de la République a sans doute lui aussi beaucoup trop donné le sentiment de mépriser une partie de ses concitoyens, en particulier ceux qui ne pensent pas comme lui. Il n’est pas douteux que cela soit l’une des explications à son manque de popularité actuel !
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