J’avais promis de revenir sur la question posée par Emmeline lors de notre entretien avec Christian Blanc : quel impact du projet du Grand Paris sur la vie des franciliens. On pourrait aborder de nombreux sujets, liés par exemple à la culture ou à l’environnement. Je me contenterais ici d’aborder les questions du logement et des transports, parce qu’elles sont importantes et à mon avis liées.
. La première étape de la réflexion est évidemment un examen de la situation actuelle.
Elle se
caractérise d’abord par une saturation des transports, saturation qui a été
aggravée par la politique municipale parisienne.
Delanoë a voulu réduire la place de la voiture en utilisant la seule politique reconnue comme efficace : diminuer la place de circulation. Comme prévu, cela a réduit la vitesse moyenne des autos, entraînant une augmentation du nombre de deux roues motorisés et un rempli sur les transports en commun.
Malheureusement
pour les utilisateurs, de nombreuses lignes de métro étaient déjà proches de la saturation, et la
création d’un tramway n’était pas à la hauteur du besoin. Qu’importe, puisque
cela gênait essentiellement les banlieusards qui ne votent pas aux municipales
parisiennes !
Aujourd’hui des lignes comme la 1, la 4 ou la 5 sont fortement chargées et la situation de la 13 est proprement calamiteuse (le développement du coté de Saint Denis ne facilite pas les choses).
La seule respiration vient de la ligne E (Eole) du RER et la 14, toutes deux décidées par M Rocard quand il était premier ministre (à l’époque on lui a reproché ce choix trop ambitieux) et au moment ou le PDG de la RATP était Christian Blanc !
Autre
caractéristique du réseau francilien, sa construction radiale qui fait passer
toutes les lignes par Paris.Les projets de la région se sont jusqu’à présent
contenté de prolonger telle ou telle ligne de métro ou de créer un tramway ici
ou là, conduisant souvent à une saturation supplémentaire du système.
Le logement se caractérise lui
aussi par la pénurie, en général dans la région, et en particulier dans les
lieux attrayants. La demande de logement social à Paris est très largement
supérieure à l’offre par exemple.
Cette situation est directement en lien avec
la situation des transports.
Avec la montée du taux d’activité
féminin, ce sont les deux membres du couple qui travaillent, par définition pas
forcément au même endroit. Il y en a donc au moins un qui doit se déplacer,
souvent longuement, pour aller travailler, quand ce n’est pas les deux. Il
n’est pas rare d’avoir plus d’une heure de trajet pour se rendre à son travail,
et autant au retour.
Avec de telles durées de trajets,
les emplacements ne sont pas équivalents entre eux : être à proximité
d’une gare de RER ou à un quart d’heure en voiture, ce n’est évidemment pas la
même chose !
Pour ceux qui en ont les moyens,
il y a le cœur de Paris, avec les prix élevés dans les arrondissements de 1 à
8, proches du cœur de la capitale mais aussi des centres de communication par
RER et métro. Il y a la banlieue Sud
Ouest, depuis les 15ème et 16ème arrondissements de Paris, jusque Versailles ou St Germain en Laye, en passant par
Neuilly, avec ces belles résidences et ses déplacements par automobile.
Ceux qui ne peuvent se payer de tels emplacements choisissent les autres arrondissements de Paris ou certains coins de la proche banlieue encore bien desservis par métro.
Après, il faut accepter de longs
déplacements, compensés pour certains par un environnement plus vert.
Pour d’autres c’est carrément l’isolement dans de grands HLM loin de tout, comme l’était l’ensemble des 4000 à la Courneuve.
La logique de transport fait
apparaître
Ceux qui sont près d’un métro
dans Paris ou en bout de ligne
Ceux qui viennent de loin et arrivent tous les matins dans les grandes gares parisiennes, notamment St Lazare et la gare du Nord, après avoir rejoint en voiture, à pied ou en autobus une gare de banlieue
Ceux qui sont plus ou moins près d’un RER, (qu’ils rejoignent de la même manière que les précédents
Ceux qui se déplacent en voiture,
soit parce qu’ils ont la chance d’être assez proche de leur lieu de travail, ou
parce qu’ils n’ont pas vraiment le choix
Ceux qui vont d’une banlieue à
une autre, avec toutes les difficultés que cela représente
Aujourd’hui, l’espace disponible pour construire devient très limité. En Petite Couronne, le foncier disponible se réduit à quelques petites zones. Au-delà, le choix du pavillon individuel consomme un espace très important et consacre la solution de l’automobile aux dépens des transports en commun
La ville de Paris compte plus de
2 millions d’habitants sur une superficie de 105 km2 , dont les bois de
Vincennes et de Boulogne (18 km2 à eux deux)
L’agglomération urbaine recouvre
une superficie de 2 723 km2 rassemblant
9 644 507 habitants répartis, en 1999, dans 396 communes
d'Île-de-France[9]. (Wikipédia)
L’Ile de France compte plus de 11
millions d’habitants répartis sur 12 000 km2, soit 120 fois la surface de
Paris.
Les Hauts de Seine, avec plus de
1.5 millions d’habitants,sur 176 km2, ont une densité de population (8
726h/km2) déjà deux fois plus faible que Paris (20 696h/km2), mais encore
importante.
La densité baisse encore en Seine
St Denis (6 322), dans le Val de Marne( 5 299), et dégringole en grande
couronne avec l’Essonne (684), la Val d’Oise (929), les Yvelines (611) et la
Seine et Marne (215).
La grande couronne, ce sont donc des départements où la
densité est en moyenne inférieure à 1 000 h/km2, mais qui regroupent
aujourd’hui plus de 5 millions d’habitants au total. C’est dans ces
départements que se fait aujourd’hui la croissance démographique, dans une logique
de mitage du paysage.
Il y a évidemment un lien très
fort entre la densité de population et les moyens de transport
Au-delà, d’une certaine densité,
on ne peut se passer du métro, et celui-ci est une bonne réponse : 50% des
parisiens n’ont pas de voiture.
Le tramway est adapté à des densités plus faibles. C’est le bon outil pour les villes ou agglomérations entre disons 150 000 et 500 000 habitants
En dessous, il y a les bus et
encore en dessous , il ne reste plus guère que la voiture.
On peut choisir comme la mairie
de Paris de construire des tours de 50 m de haut et d’y mettre massivement des
logements sociaux (projet de la ZAC des Batignolles dans le 17ème),
avec le risque d’en faire un quartier sensible et de rajouter des passagers à
une ligne 13 déjà sur saturée.
Le bon sens, c’est de trouver le
moyen de réduire les temps de déplacement et d’accès au travail pour de
nouvelles zones. C’est de faire passer certaines zones d’une logique de bus ou
tramway à une logique de métro ou RER, de
faire passer d’autres zones d’une logique de voiture à une logique de
bus et de tramway.
La logique, ce n’est pas
d’étendre la ville pavillonnaire à perte de vue, c’est de concentrer la
population en lui offrant de véritables moyens de communication et en préservant
d’autres zones pour la nature.
On sait depuis longtemps qu’il est indispensable de créer un métro périphérique au-delà de Paris, pour sortir de la logique uniquement radiale. Il y a des projets en ce sens depuis plus de 20 ans, la question est de passer à l’acte !
Le projet de Christian Blanc, en
prévoyant des gares relativement éloignée l’une de l’autre (par rapport au
métro mais aussi par rapport au RER) se traduit par une vitesse moyenne
importante, et donc par des temps de trajet radicalement diminués.
Sa deuxième caractéristique est
de se situer assez loin de Paris et de son périphérique : le choix ne
consiste pas à élargir Paris à sa proche banlieue, dans une zone supplémentaire
de 3 à 5 kilomètres de large : les métros le font déjà en partie, la plupart
des lignes sortant de Paris.
Ce sont bien de nouvelles zones situées dans la partie la plus proche de la grande couronne, celle qui est déjà urbanisée, ou des zones en cours de transformation, dans les Hauts de Seine ou la Seine St Denis qu’il s’agit de relier fortement entre elles, au cœur de Paris, aux aéroports et aux gares de TGV.
Car la
troisième caractéristique, c’est de relier tous les pôles de développement, les
aéroports, les zones de TGV et une trentaine de zones de logements.
La logique évoquée plus haut
consiste à faire des zones autour des futures gares des zones à fortes
densités, donc des constructions à hauteur haussmanniennes (7 étages) voire
plus, plutôt que des zones à 2 ou 3 niveaux comme on le voit souvent en proche
banlieue.
Cela permettra à la fois d’augmenter l’offre de logements en Ile de France et de baisser la pression sur les prix, le nombre de places dans des zones bien placées étant augmentées, d’autant plus que beaucoup de zones deviendront mieux placées, au sens de profitant de distances (mesurées en temps d’accès) vers les zones de travail, de loisirs ou de commerce plus courtes
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