Dans les années 60, l’Allemagne de l'Est connaissait comme l’Allemagne de l’Ouest, un boom économique. Dans les années 70 et au début des années 80, sous la direction d’Honecker, l'économie stagnait. La situation s’aggrava dans certains secteurs à la fin des années 80 du fait des accords économiques avec le bloc soviétique et des réparations de la seconde guerre mondiale envers l’Union soviétique.
De nombreuses marchandises n’étaient produites que pour l'exportation vers les pays occidentaux pour l'achat de devises et n'étaient pas disponibles pour le marché intérieur de l’Allemagne de l'Est. En 1988/89, la crise économique et politique atteignit son paroxysme. Le mécontentement dans la population augmentait de façon constante.
L’approvisionnement alimentaire de base était cependant
assuré à tout moment, même s'il fallait un certain effort pour se procurer les
produits que vous vouliez acheter. On plaisantait ainsi à propos de
l’alimentation : «Nous allons retourner à la recherche de
nourriture ». Tout n’était pas disponible à tout moment. S’il y avait du
lait frais le matin, il était épuisé l’après-midi. Mais entre temps, des pommes de terre, introuvables le
matin, étaient arrivées.
On ne pouvait s’approvisionner presque exclusivement qu’en fruits et légumes de saison, … ce qui est recherché aujourd’hui pour des raisons écologiques. On n’avait des bananes, des oranges ou autres fruits tropicaux qu’à Noël.. Les conserves d’ananas, pêches, mandarines etc …étaient considérées comme des produits de luxe et vendues à prix forts dans des magasins spécialisés.
.
Il était beaucoup plus difficile d’acheter des biens de
consommation comme les téléviseurs, les radios, les meubles, etc. Dans ce
domaine, tout était question de relations. Tu me procures ceci, je te procure
cela…. Beaucoup d’articles étaient disponibles, mais en quantités beaucoup trop
limitées. De nombreux ménages économisaient mais il n’y avait rien à acheter.
Pour les voitures, la situation était particulièrement
difficile. Elles étaient classées par le gouvernement comme produit de luxe. Il
fallait passer commande puis attendre plusieurs années. A la fin des années 80,
il fallait compter 12 à 13 ans pour une Trabant, 15 ans pour une Lada ou une
Wartburg.
Les voitures d’occasion âgées de 10 ans étaient aussi chères qu'un
véhicule neuf. La revente immédiate d’une voiture neuve rapportait parfois jusqu'à deux fois le prix d'usine.
Pour espérer avoir une voiture neuve dans plusieurs années, il fallait se faire
enregistrer à 18 ans, âge de la majorité, pour l’avoir vers 30 ans. Ainsi, tous
les membres adultes de la famille se faisaient enregistrer pour avoir une
voiture, même la grand-mère aveugle de 80 ans !
Une autre
raison essentielle de la situation économique déclinante était la planification
par le gouvernement de la RDA de la production de matériaux de construction,
machines et autres produits. Beaucoup de biens
n‘étaient pas produits en quantités suffisantes pour le marché domestique et
ceux-ci étaient déjà pour ainsi dire attribués, d’où la planification de la
distribution. Cela
signifiait que les commandes devaient être enregistrées plusieurs années à
l’avance.
Il était donc très difficile de construire une maison. Les matériaux de construction étaient extrêmement rares et étaient obtenus très souvent par relations. Pour le carrelage, le matériel de chauffage, les appareils sanitaires et bien d’autres choses, on devait se faire enregistrer 2 ans avant les travaux auprès d’un fournisseur de matériaux et attendre. Au bout de deux ans, on obtenait l’attribution d’une certaine quantité, par exemple 18 m2 de carrelage ou 40 m2 de bois en ayant le choix entre 2 ou 3 modèles. Si l’un des articles ainsi obtenu ne convenait pas, on s’efforçait de l’échanger avec un autre bricoleur.
Nous avons reconstruit et modernisé entre 1986 et 1990, une
maison construite en 1907. En fait, cette maison devait être démolie. Pendant
les travaux, nous avons constaté que presque tout était en piteux état. Il
fallait remplacer les fenêtres, ainsi que les planchers, les murs, le toit et
bien d'autres choses. Il n’y avait ni système de plomberie ni chauffage et
ceux-ci durent être installés.
Nous avons fait fabriquer les fenêtres en Thuringe, à 350
km de chez nous, et nous avons du
ensuite les transporter. La construction du toit fut encore plus compliquée.
Comme les voliges et les poutres étaient extrêmement rares, nous avons du les
réserver un an avant le début de la construction chez un fournisseur de
matériaux. Au moment de la livraison de cette commande, nous avons stationné toute la nuit précédente devant le fournisseur pour
obtenir le bois. D’autres personnes construisant leur maison étaient aussi là, en
attente de leur bois
Le matin, chacun obtint 40m2 de bois ; notre toit faisait environ 80 m2.
Que faire ? Nous n’avons pas obtenu le reste du bois, de
sorte que nous avons écrit une requête au Conseil
d'Etat de la RDA, adressée
personnellement à Erich Honecker. Nous avons expliqué notre situation et le
croiriez vous, nous avons reçu une réponse avec une attribution de 40 m²de bois brut pour le toit et de
40 m² supplémentaires de voliges.
Avec un camion de mon ancienne entreprise, nous sommes allés les chercher dans un entrepôt à environ 80 km. L’affaire était lancée. Mais il n’y avait aucune volige à acheter et aucun artisan pour en fabriquer. Même les entreprises artisanales étaient soumises à la planification et ne pouvaient fabriquer que des articles prévus.
Je me procurais chez un fabricant,
à environ 75 km, le plan de cloutage. Je suis donc allé avec 2 paquets de café,
j'ai dessiné des plans sur du papier sulfurisé, et j’obtins le plan de cloutage
des voliges.
Ensuite, j’ai du travailler pendant plusieurs
semaines : traiter les voliges par imprégnation dans un réservoir que
j’avais bricolé, les faire sécher, les couper et les clouer. Tous ceux qui
construisaient leur maison rencontraient ce genre de difficulté. Il en était
ainsi dans bien d’autres domaines. On avait appris à improviser et à s’entre
aider. Pour cela, des compétences en matière de bricolage étaient
indispensables.
Il a fallu 4 ans avant que nous puissions vivre dans notre maison. Une conséquence positive de l'économie de pénurie était que l’on jetait très peu. Les objets étaient réparés de nombreuses fois avant qu’ils ne soient vraiment hors d’usage.
Afin de masquer la situation économique difficile de la
RDA, le SED et le gouvernement contrôlaient la presse. Cela signifiait la
censure totale dans tous les domaines, y compris économiques. Dans l'espoir
d'atténuer le mécontentement de la population sur la dégradation constante de
la situation économique et sur l'absence quasi totale de liberté de voyage, de
nombreux articles confiants en l’avenir de la RDA et de ses citoyens furent
publiés dans la presse et d’abord à la radio et à la télévision.
Notre vie quotidienne, cependant, était très différente. Les gens étaient mécontents. La résistance fit son chemin et commença à apparaître pour la première fois en public après les célébrations pour le 40e anniversaire de la RDA le 7 octobre 1989. Elle se poursuivit par des actions connues (manifestations du lundi) et moins connues. Le 9 novembre 1989 en fut l’aboutissement avec la chute du Mur de Berlin Christof
A lire
aussi :
Les commentaires récents