Les journaux ont retenu de la dernière note de l’INSEE sur l’état de l’économie que la sortie de récession était pour le 4ème trimestre. La note contient beaucoup plus que cela et sur ce point elle manifeste une grande prudence, projetant l’évolution du PIB au 4ème trimestre dans une fourchette comprise entre +0.8% et – 0.8% !
Des 10 pages de la note de synthèse, intitulée « vers une sortie de récession ? » (on notera le point d’interrogation !), je retiendrais les points suivants
1) La récession est extrêmement forte, avec deux trimestres successifs où la chute du PIB est largement supérieure à 1% : 1.5% au quatrième trimestre 2008 et 1.2% au premier trimestre 2009. Et encore la France n’est pas le pays le plus touché. Des pays grands exportateurs industriels comme le Japon ou l’Allemagne souffrent beaucoup plus
2) La chute est en train de ralentir, en France comme ailleurs. J’en avais noté un signe à propos d’Air France il y a un mois. L’INSEE en note d’autres, en France comme au niveau mondial. Les enquêtes de juin sur le moral des industriels puis des ménages, parues quelques jours plus tard, vont dans le même sens
3) Les inquiétudes sur le système bancaire se sont nettement apaisées, comme le montre la baisse de la prime de risque (l’écart entre les taux à 3 mois sur le marché interbancaire et les taux des bons du trésor) : cette prime était inférieure à 0.5% au premier semestre 2007, puis elle a évolué entre 1 et 2% pendant les 2 semestres suivants, pour monter à 4.5% au plus fort de la crise en septembre octobre 2008. Redescendue aux alentours de 1% début 2009, elle est revenue récemment aux environ de 0.5% (voir schéma page 9)
4) La variation des stocks représente un montant important de la variation du PIB : 0.7 % sur 1.5% au quatrième trimestre 2008 et 0.8% sur 1.2% au premier trimestre 2009. Par définition, ce déstockage ne peut durer très longtemps. L’INSEE prévoit encore une contribution de -0.3% à l’évolution du PIB au second trimestre, et rien ensuite. Elle note que les industriels de l’automobile jugent maintenant que leurs stocks sont à peu près au bon niveau.
5) La récession n’a pas encore donné tous ses effets sur l’emploi. L’INSEE prévoit une perte de 700 000 emplois en 2009 dans le secteur marchand non agricole, dont 370 000 au premier semestre et 330 000 au second. Cela signifie que les effets de la récession sur l’emploi ne sont pas immédiats, avec le risque que le dégradation continue de l’emploi ne finisse pas peser sur la consommation et donc repousse la reprise attendue. On notera que l’emploi marchand non agricole représentait fin 2007 environ 16 000 000 d’emplois, et que donc la chute prévue pour 2009 représente 4.4% des effectifs, après un recul de 1% en 2008. Ce chiffre illustre le fait que la récession touche le secteur marchand (le reste ne bouge pas et crée même de l’emploi). Il illustre aussi que les entreprises s’adaptent assez rapidement malgré tout.
6) Le partage de la valeur ajoutée change peu, ce qui s’explique entre autres par le point précédent. On rappellera que c’est la forte baisse de la part des entreprises après les deux chocs pétroliers (73 et 79) qui explique la durée de la crise de l’époque et le fait que les 1.5 millions de chômeurs supplémentaires générés par cette crise n’ont pas été résorbés., la création nette d’emploi ne reprenant que fin 1985. Le fait que le partage de la valeur ajoutée ne change pas fait que les entreprises seront capables de profiter de la reprise annoncée par l’INSEE pour la fin de l’année
7) L’inflation « sous-jacente » est en baisse. Les mouvements importants des prix des matières premières ont conduit à une inflation de 3.5% à la mi 2008. A la mi 2009, on aurait au contraire un recul des prix d’environ 0.5%. Mais hors énergie, produits alimentaires et tarifs publics, la France sera passé d’une inflation annuelle de 2.0 à 1.5%. La crise pousse les prix à la baisse, mais en dehors du Japon, on ne constate pas de phénomène de déflation.
La prévision est plus aléatoire que d’habitude. L’INSEE a augmenté l’échelle de risque dans ses prévisions des prochains semestres. Ainsi, pour l’évolution du PIB au 4ème trimestre 2009, si la prévision se situe à 0.0%, il y a 90% de chances qu’elle se situe entre +0.8% et –0.8%, c'est-à-dire entre une croissance assez forte et une récession sévère !
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