L’entretien accordé par Olivier Blanchard au Monde ce soir contient des remarques beaucoup plus intéressantes que les titres choisis par le journal pourraient le faire croire. L’économiste en chef du FMI pourfend quelques idées à la mode, pointe du doigt les risques de la crise actuelle et indique les orientations qu’il faudrait suivre.
On ne sait si les questions d’Alain Faujas reflètent son adhésion à des idées reçues ou sa volonté de donner l’occasion à l’économiste français d’y répondre : faisons l’hypothèse de la seconde solution et notons le contenu sur trois points.
Le FMI change de discours : alors qu’il avait coutume de demander une réduction des déficits publics, le voilà qui appelle au contraire à la dépense publique. Certains y ont vu ce qu’Alain Faujas appelle à un revirement et la reconnaissance qu’ils avaient raison depuis longtemps, en s’opposant à la politique du FMI (et des recommandations de beaucoup d’économistes.
Olivier Blanchard remet les pendules à l’heure en rappelant ce que devrait comprendre toute personne alliant à la fois bonne foi et un minimum de bon sens : une solution économique n’est pas bonne en soi, « à circonstances différentes, remèdes différents ». Comme le corps humains, l’économie fonctionne dans une logique système. En temps normal, il doit suivre un régime normal. En cas de crise d’anorexie, le régime doit changer, comme en cas d’obésité d’ailleurs…
Sur les formes de la relance budgétaire, l’économiste note qu’il faut trouver une formule qui se traduit réellement par une augmentation des dépenses : il vaut mieux augmenter la dépense publique que baisser les impôts, faire une prime à l’automobile comme en France que baisser la TVA comme en Grande Bretagne
Alain Faujas l’interpellant sur le caractère éphémère de la prime à l’automobile, celui qui avait soutenu N Sarkozy note que ce sont les tout prochains mois qui seront cruciaux. La rapidité des effets d’une action de relance est essentielle aujourd’hui.
Je retiens aussi deux alertes d’Olivier Blanchard.
D’abord concernant les banques qui doivent faire le plus vite possible la transparence sur leurs pertes puis être recapitalisées, au besoin par les Etats. Il est probable que les pertes des uns et des autres sont variées. Mais on ne peut croire qu’il y aurait ceux qui ont fait des pertes et ceux qui n’en ont pas fait. La réalité doit être une dispersion autour d’une valeur moyenne, avec aussi des différences entre les pays.
Ensuite concernant les pays émergents. Dans leur volonté d’éviter de se trouver en crise de liquidités, les banques rapatrient les fonds investis dans les pays étrangers. Le résultat serait qu’elles auraient rapatrié ces derniers mois 1000 des 4000 milliards de dollars de créances qu’elles avaient dans ces pays. La conséquence pour ces pays peut être gravissime, et le FMI n’a pas aujourd’hui les moyens de les soutenir à ce niveau.
Dernière remarque : le chef économiste du FMI note la nécessité de relances budgétaires, comme noté plus haut ; Je relève deux précisions : d’abord l’appel direct à l’Allemagne, en raison de l’influence de ses choix sur celui de ses voisins européens. Ensuite, le besoin de réfléchir dès maintenant à une augmentation du volume des plans. Non pas que le FMI les juge forcément trop faibles, mais qu’il faudra s’adapter si besoin. Le FMI recommande une relance à la hauteur de 2% du PIB mondial mais juge qu’il faudra si besoin être prêt à aller jusqu’à 3%.
Finalement, ce qui me frappe dans cet entretien c’est à la fois la clarté du discours et son caractère très pragmatique. Cela nous change…
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