Les médias me semblent avoir un regard plus distancié sur la visite du pape Benoît XVI qu’ils ne l’avaient eu vis-à-vis de Jean Paul II. En particulier, ils relaient plus vigoureusement les critiques du camp laïque qu’ils ne l’avaient fait précédemment. Est-ce un reflet de la déchristianisation avancée du pays, de la position prise par Nicolas Sarkozy sur la « laïcité positive » ou de l’opinion qui s’est forgé au fil du temps sur le cardinal Ratzinger ?
Jean Paul II avait pour les médias, au moment de son élection et ensuite, l’avantage d’être jeune et sportif, de sortir de l’image habituelle des vieux papes italiens. Et le combat de la Pologne et de Solidarnosc contre le communisme le rendait sympathique. Il y eut bien des alertes quand il vint à Reims en 1996 célébrer les 1500 ans de Clovis. Mais globalement, les médias en ont toujours renvoyé une bonne image.
Dans le même temps, le cardinal Ratzinger, pourtant sans doute l’homme le plus proche de lui, était présenté majoritairement (je ne parle pas ici évidemment de La Croix ou du Figaro) comme le représentant du courant conservateur, refusant les idées modernes et passant son temps à excommunier ou interdire de parler les hommes d’Eglise ou théologiens qui osaient comprendre les questions que l’homme moderne se pose, un digne représentant de cette inquisition haïssable dont la Congrégation pour la doctrine de la foi qu’il dirigeait est le successeur.
Devenu pape sous le nom de Benoît XVI, l’ancien cardinal donne une image plus proche des hommes d’église traditionnels que son prédécesseur. On a découvert qu’il était plus souriant qu’on ne l’imaginait, mais l’image générale repoussoir subsiste.
Mais tout cela ne fait que montrer l’incompréhension grandissante entre une société majoritairement athée ou catholique non pratiquante et l’Eglise catholique.
La manifestation d’Act up vendredi à Montmartre, illustre en la caricaturant cette incompréhension. L’association anti-sida reproche au pape d’être la cause de dizaine de milliers de morts par son opposition au préservatif. C’est évidemment d’une bêtise infinie : le péché au sens chrétien d’une personne infidèle qui utilise un préservatif, c’est essentiellement son infidélité. Penser qu’un chrétien pratiquant trouverait normal le vagabondage sexuel mais ne voudrait pas mettre de préservatif pour respecter les instructions de l’Eglise serait risible si le sujet n’était pas aussi sérieux.
Les publicités pour le préservatif admettent implicitement que la variété des partenaires sexuels est non seulement admise mais normale et naturelle, voire indispensable. Je pense qu’en réalité, ce que les militants d’Act up ne supportent pas , c’est que les autorités ecclésiales catholiques refusent cette norme. Pour le pape en particulier, le comportement « je croise sur mon chemin, je consomme, je jette » n’est justement pas un comportement qui élève l’homme. Mais peut on s’intéresser à ce qui élève l’homme dans une société du zapping et de l’audimat ?
Au sein de l’église catholique, Benoît XVI est il favorable aux traditionalistes, voire aux intégristes ? Sil a ouvert la porte aux anciens partisans de Monseigneur Lefebvre (qui l’ont d’ailleurs repoussée) et s’il a un goût très marqué pour les liturgies majestueuses à l’ancienne, la lecture de ses textes (c’est avant tous un théologien) montre un homme dans le droit fil de Vatican 2. Son Jésus de Nazareth (que je n’ais pas fini) m’a paru très juste. Bien sur, il reste sur le positions conservatrices de son prédécesseur sur la communion pour les divorcés remariés et sur l’ordination de femmes ou d’hommes mariés.
Pour illustrer les tendances en présence au sein de l’église française, une discussion récente avec le curé de ma paroisse. Il faut savoir qu’il y a un peu partout quelques pratiquants qui croient utile d’adopter des comportements ostentatoires de dévotion pendant la messe, en particulier au moment de l’offertoire et de la communion. Je faisais remarquer donc au curé mon étonnement de voir les mêmes ignorer superbement leurs voisins au moment de ce qu’on appelle le geste de paix (les présents « donnent la paix » à leur voisins). Il m’expliqua alors que ces gens là considèrent que la messe est un temps de rencontre entre eux et Dieu, et pas du tout un temps communautaire. Comme il disait, avec eux, il faut tout revoir à la base ! Mais tout cela n’intéresse guère que les médias religieux.
Le pape est maintenant à Lourdes, illustrant une des dérives qui m’exaspère le plus dans l’Eglise : l’idolâtrie mariale ! Mais cela aurait plutôt tendance à plaire au bon peuple et aux médias.
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