Une bagarre
entre bandes qui envoie un jeune juif salement amoché à l’hôpital et la
question de l’antisémitisme rejaillit. La réaction rapide de certains, avant
même qu’on connaisse tous les faits,
donne prise à ceux qui trouvent que les juifs en fon trop dans la
posture victimaire.
La relation entre les deux bandes concernées, l’une composée de jeunes se revendiquant juifs, l’autre de jeunes africains d’origine (du nord ou pas), semble marquée des deux cotés par le racisme. Mais celui envers les juifs doit il être distingué comme étant plus spécifiquement un antisémitisme ? Hughes, avec qui j’en ai discuté à la République des blogs en est persuadé. Ma discussion avec un autre blogueur sur le même sujet m’a donné des éléments de réflexion.
Pour lui, alors que le racisme ordinaire conduit à considérer l’autre comme un inférieur (le racisme anti-noir est à cet égard très révélateur), le discours sur les juifs met au contraire en avant l’idée que ce sont des riches, qui se tiennent les coudes et à qui on reproche cette situation. Il citait l’expression classique « tu fais le juif » comme exemple du passage dans la langue française du préjugé sur la supposée avarice des juifs. La manière dont il en parlait m’a fait penser qu’il était juif lui même, et que le fait de bloguer sous un pseudo permettait que le lecteur ne lise pas ses écrits avec la grille déformante de celui qui se dit « c’est un juif qui s’exprime »
Cette réaction comme celle d’une toute autre forme de Hughes montre que pour les juifs Français d’aujourd’hui, le souvenir de la Shoah structure encore profondément la pensée sur cette question, ce qui n’est guère surprenant, on en conviendra.
On pourrait pourtant voir dans l’antisémitisme une autre réaction, celle du nationaliste qui reproche au juif de ne pas l’être, Ce sentiment se traduit dans le reproche porté contre le juif « apatride ». Le racisme est alors exacerbé contre un peuple qui est vécu comme non seulement autre mais refusant ce jeu de la structuration en nations ou peuples antagonistes.
A cet aune, les juifs ne sont pas les seuls à subir un racisme spécifique : les tziganes aussi, les gens du voyage, qui par nature ne sont pas liés à un lieu, sont réputés apatrides. Et voleurs de poules, ce qui est une autre façon de dire qu’ils s’enrichissent sur notre dos, même si c’est à plus petite échelle. On notera que les Roms ont subi de la part des nazis le même sort que les juifs.
Faisons un petit détour. Beaucoup d’antillais descendants d’esclaves ont un complexe à cause de cette situation. Ils analysent les situations relationnelles avec les blancs en fonction de ce passé. Je pense qu’ils ne pourront se réaliser complètement, être eux même que le jour où ils abandonneront cette grille de lecture. Cela n’a rien à voir avec le fait que la grille qu’ils utilisent soit juste ou pas, c’est simplement qu’elle les empêche d’avancer. C’est la même chose pour la victime d’un licenciement abusif : se focaliser sur cette situation ne l’aide pas à retrouver du travail. Comme la victime d’une rupture amoureuse qui ne passerait pas à autre chose.
Il me semble donc que les juifs
devraient abandonner la volonté de
distinguer l’antisémitisme et le racisme. Qu’ils crient au racisme.
Crier à l’antisémitisme ne sert qu’à conforter ceux qui considèrent que les
juifs ne sont pas comme les autres, qu’à conforter l’antisémitisme.
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