Je lisais hier dans mon gratuit les résultats d’une enquête du Secours
Catholique dans les Hauts de Seine, qui attirait l’attention, parmi les
facteurs de pauvreté, sur la solitude. « Un logement sur 3 est occupé
par une personne vivant seule et les familles monoparentales
représentent 10% des habitants ».
L’auteur de l’article faisait une comparaison dont je n’ai toujours pas compris le sens, en opposant ces éléments de solitude avec la présence sur le territoire de ce très riche département de nombreux sièges de télévision ou agences de communication. Je constate pour ma part que ma belle mère, qui vit seule, est bien contente d’avoir une télévision pour distraire ses soirées et un téléphone pour discuter avec ses enfants et petits enfants. Mais bon…
Mais que représentent les faits bruts ainsi exposés sur la réalité des personnes concernées ? Il est probable que les responsables de l’association caritative savent ce que ces chiffres cachent comme détresse pour une partie de la population concernée. On sait qu’il y a un lien entre la pauvreté et l’exclusion sociale mesurée par la taille du réseau de relation. Et que certaines vieilles personnes voient progressivement leur réseau diminuer avec les décès de leurs proches de la même génération.
Cette question de la solitude dans le logement me ramenait à une discussion récente avec un membre de l’administration pénitentiaire. Ile me citait d’abord le cas d’un établissement ouvert récemment, qui avait pu limiter la première année à une personne par cellule la population de détenus. L’année suivante le nombre de détenus a augmenté, obligeant à partager certaines cellules. Et les tentatives de suicide ont été divisées par 3 !
Des établissements pour mineurs ont été créés récemment, et on commence à avoir un peu de recul sur les résultats. Il avait été prévu de beaucoup occuper les jeunes détenus (sport, formation notamment) et de s’appuyer sur le collectif avec des groupes d’une dizaine de jeunes encadrés par un surveillant et un éducateur. Les horaires avaient été revus, renvoyant la fermeture des cellules le soir une heure et demi plus tard que dans les maisons d’arrêt. A l’usage, il a fallu constater que le collectif représentait une pression importante pour les jeunes, et que ceux-ci avaient aussi besoin de décompresser seuls dans leur cellule. On a donc revu quelques pratiques, et en particulier l’heure de fermeture le soir.
Comme quoi, beaucoup de solitude nuit, mais un peu est nécessaire.
Je discutais aussi hier avec une collègue qui s’est fait faire il y a quelques années un enfant par l’homme qu’elle avait décidé de quitter. Elle me montrait la photo de sa fille de 3 ans en me faisant remarquer à quel point elle était « lumineuse ». Et nous avons aussi discuté d’une autre collègue que nous aimons bien tous les deux, en dépression il y a quelques années, et qui revit depuis qu’elle a eu un enfant avec l’homme de sa vie.
L’homme est un être social. Cela en fait un être compliqué, qu’on ne peut pas réduire en chiffres et statistiques. Avec ses souffrances et ses joies, des actes horribles parfois mais aussi des moments merveilleux.
J’écoutais samedi quelqu’un expliquer que notre société réclamait tous les droits, y compris le droit à l’autre ( !) et refusait la souffrance, y compris psychologique, alors que celle-ci est indissociable des relations humaines(avec le deuil par exemple). Et je pensais au Petit Prince quittant le renard après l’avoir apprivoisé. Celui-ci disait qu’il allait être triste mais qu’il n’était pas perdant, parce que la couleur des blés lui rappellerait celle des cheveux du Petit Prince.
Bon, ce n’est pas tout çà, ma femme vient de partir à son travail, il est temps que je parte à mon tour rejoindre mes collègues et mes clients. En laissant cet article tisser une subtile relation avec des lecteurs inconnus, au hasard d’un « clic ».
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