Tous les professeurs n’ont pas la même rémunération. Sur quoi reposent les différences constatées, est ce légitime, comment pourrait on faire autrement, c’est ce que je vais essayer d’examiner dans ce deuxième article sur la valeur des professeurs.
D’abord, le terme de professeur s’applique aussi bien à l’enseignement en primaire, dans le secondaire et dans le supérieur. Depuis quelques années, les professeurs des écoles, qui enseignent dans les écoles primaires et qu’on appelait autrefois instituteurs, ont le même parcours de carrières que les professeurs certifiés, qui enseignent dans le secondaire. Le temps de présence devant les élèves n’est pas le même mais la préparation est supposée différente aussi. Les enseignants du supérieur (universités ou classes de supérieur dans les lycées) ont un parcours et des obligations différents, mais ce n’est pas, sauf indication contraire, d’eux dont je parle dans ces articles.
Le secondaire voit co-exister des enseignants certifiés et des enseignants agrégés, qui n’ont pas réussi le même concours et n’ont pas les mêmes parcours et obligations. Certains agrégés s’adressent à des étudiants, mais il y en a aussi dans le secondaire, avec donc les mêmes classes que des certifiés.
Cette pratique montre une différence forte entre les systèmes de rémunération du public et ceux du privé que je résumerais ainsi : le privé rémunère l’emploi alors que le public rémunère le grade.
Les conventions collectives de branches prévoient en effet un classement des emplois( voir ici) et un minimum correspondant, souvent au travers d’un indice, les entreprises étant libres de rémunérer au dessus de ce minimum. Le diplôme (il ne peut évidemment être question de concours) ne donne généralement pas d’équivalence en indice. Le niveau de diplôme peut être un critère classant mais il est toujours précisé « ou expérience professionnelle équivalent ». Une exception : dans la chimie et je crois aussi dans la métallurgie, le BTS donne un indice minimal et la garantie d’une augmentation de niveau dans les deux ans.
Cela n’empêche pas bien entendu les recruteurs de tenir compte du diplôme à l’embauche, en particulier pour les débutants. Le marché du travail le leur impose, en particulier pour certains emplois de cadres. Mais il ne s’agit que d’un salaire d’embauche. Si je recrute un jeune polytechnicien comme informaticien, je vais le payer plus cher que le jeune diplômé d’une »quelconque » université. Mais si dans le temps, il n’y a pas de différence de contribution, la différence initiale de rémunération va disparaître.
Il n’en est pas de même dans le public où le grade obtenu par le concours va compter toute la carrière. Qu’on ne me demande pas d’expliquer comment cela marche, j’en serais bien incapable. Pour le sujet qui nous occupe, on constate simplement que les agrégés sont mieux payés que les certifiés, y compris pour des classes identiques, ce qui est toujours un sujet d’étonnement (voire d’indignation) pour un salarié du privé. A noter que la différence de salaire n’est pas anecdotique : un agrégé gagne 24% d plus qu’un certifié au bout de deux ans et 25% en fin de carrière.
Comme l’étude de Goux et Marion le fait remarquer, les primes et indemnités sont assez peu importantes pour les enseignants, surtout en comparaison de celles attribuées aux autres cadres du public. Parmi elles, on note celle pour enseigner en ZEP, légèrement inférieure à 100 euros par mois, qui n’arrive pas à contrebalancer les méthodes de gestion de la mobilité qui aboutissent à envoyer en ZEP en priorité les enseignants débutants.
Un supplément familial de traitement est attribué, en plus des allocations familiales, ce qui provoque également un étonnement (voire une indignation !) pour le salarié du privé. Le montant varie en fonction du salaire, dans des limites étroites.
Il existe aussi, comme dans le reste de la fonction publique, une indemnité de résidence par zone, qui bénéficie aux habitants des grandes villes (1%) et de la région parisienne (3%). Quand on connaît les prix des loyers de la région parisienne, on comprend que cette indemnité de résidence ne suffise pas à empêcher une fuite massive des fonctionnaires vers la province et donc l’arrivée de débutants dans le 93 ou le 94! A titre de comparaison, dans mon entreprise, les salaires pratiqués sont supérieurs de 15% sur Paris et je pense que nous sommes dans les normes du marché du travail.
L’ancienneté représente une part très importante dans le parcours de carrière d’un enseignant, beaucoup plus que le mérite : nul au début de carrière, l’écart entre le mieux et le plus mal noté au bout de 10 ans est de 6%, l’écart entre l’enseignant de 10 ans et de 30ans de carrière est de 41% J’ai déjà dit et redit que ce système n’est pas légitime à mes yeux : la valorisation de l’ancienneté est trop importante (60% sur la carrière) ,et surtout beaucoup trop tardive. Les meilleurs professeurs sont ceux qui ont une dizaine d’année d’ancienneté. La rémunération ne reflète pas cet état de fait.
SM me fait remarquer en commentaires qu’il faut tenir compte de l’aspect motivation. Cette remarque ne peut être balayée d’un revers de main. Elle oblige à examiner ce que sont les ressorts de la motivation pour un salarié en général et pour un professeur en particulier.
A suivre donc !
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