L’appartenance religieuse est un facteur explicatif du vote plus important que l’âge, le niveau de formation ou la profession. C’est encore vrai aujourd’hui comme le montre l’enquête post électorale du CEVIPOF citée dans le Monde du 8 juin.
On a beaucoup insisté sur le fait que les villes centre, les jeunes, les bacheliers ou les salariés du public ont voté pour Ségolène Royal quand les retraités, les habitants du péri urbain ou les sans diplômes ont voté pour Nicolas Sarkozy. Pourtant, sur la plupart de ces critères les différences sont faibles : sur la taille de la commune, la différence ne fait que 6 points, les moins de 65 ans ont voté à 51% pour la candidate socialiste.
Pour trouver de vrais différentiels, des scores au dessus de 60% ou en dessous de 40% pour l’un des candidats, il faut aller plus dans le détail ou ailleurs.
Plus dans le détail : effectivement, les plus de 65 ans ont voté pour les 2/3 d’entre eux pour le président élu. Si vous faites partie de cette catégorie, vous avez deux fois plus de probabilités d’avoir voté à droite qu’à gauche. La catégorie des agriculteurs est sur les mêmes chiffres et celle des commerçants et artisans se distingue nettement avec un score supérieur à 80% pour l’ancien ministre de l’intérieur.
Mais la religion donne des résultats encore plus tranchés : selon l’enquête, 23% seulement des catholiques pratiquants réguliers ont voté Royal, contre 94% des musulmans !
Cette très forte influence de la religion n’est pas une nouveauté mais on en parle peu, comme le faisait remarquer Claude Dargent du CEVIPOF, dans une analyse publiée avant l’élection : « le débat public en France occulte fréquemment un des facteurs explicatifs majeurs du comportement électoral : l’appartenance religieuse. ».
On lira avec intérêt cette étude qui rappelle en quoi l’appartenance religieuse a toujours orienté le vote. Depuis quelques décennies, certains ont cru que le phénomène régresserait, avec la baisse continue de la pratique. On voit qu’il n’en est rien.
Pour ce qui est des catholiques, le phénomène date du milieu du 19ème siècle, comme je le notais dans un article récent.
Pour ce qui est des musulmans, le phénomène est au contraire assez récent, cette religion étant très peu représentée jusqu’il y a peu. Le niveau du clivage est assez étonnant. Il s’explique sans doute par l’attitude vis-à-vis de l’immigration du président élu. Le fait que l’un de ses grands parents soit juif a certainement également joué. On verra si la présence de Rachida Dati (dont je ne connais pas l’appartenance religieuse mais qui a évidemment une proximité d’origine avec une part importante des musulmans français) au gouvernement change quelque chose à l’avenir. En tous les cas, on ne voit pas de manière évidente la proximité entre les valeurs portées par le Coran et celles portées par la gauche.
Les commentaires récents