L’UNEDIC vient de publier son enquête annuelle sur les projets de recrutement pour 2007, qui augmentent pour la première fois depuis 2002. Les tensions sur le marché sont également à la hausse, ce qui confirme le fait que le marché de l’emploi est mieux orienté.
La comparaison entre le taux de
chômage en novembre de l’année n (période pendant laquelle les entreprises sont
interrogées) et le taux de difficultés
de recrutement attendu pour l’année n+1 (courbe de Beveridge) donne le résultat
suivant
Année n |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
Taux de chômage |
8.9 |
9.3 |
10.0 |
10.0 |
9.6 |
8.6 |
Taux de recrutements difficiles |
58.5 |
55.5 |
45.9 |
45.1 |
44.1 |
46.0 |
On peut lire ce tableau de deux manières
Soit on s’étonne du faible impact de la baisse du chômage affichée en 2006 sur les difficultés de recrutement et on en déduit que les chiffres de l’INSEE sont faux : le taux de chômage serait plus près de 9.6 que de 8.6%
Soit on admet malgré tout que le taux de chômage réel est au moins en dessous des 9.3% de 2002 et on se réjouit de la baisse des tensions sur le marché du travail par rapport à cette période
Je tendrais dans ce domaine à suivre Eurostat et à réévaluer le taux de chômage affiché par l’INSEE d’environ 0.4%, ce qui le mettrait à 9% pour la période considérée. Il y aurait bien une baisse du chômage nous rapprochant du plus bas taux depuis 1983 atteint en mars 2001, à savoir 8.6% . Les résultats de l’enquête BVA sur les priorités des salariés, qui classent la question du chômage légèrement derrière celle du pouvoir d’achat vont dans ce sens.
Il y aurait donc une tendance à la baisse du chômage structurel, c'est-à-dire de celui qui persiste quand la conjoncture est bonne. On rappellera que ce chômage structurel n’avait cessé d’augmenter depuis 20 ans (voir le rapport sur le plein emploi de Pisani Ferry au CAE page 42 ) faisant apparaître de fortes tensions sur le marché du travail lors des reprises de la fin des années 80 puis 90 malgré un taux de chômage élevé. La décrue de ce chômage structurel est une condition indispensable à la baisse du chômage. Elle suppose d’améliorer la mobilité au sein et entre entreprises, le système de formation initiale et permanente et le système d’orientation : l’existence de l’enquête annuelle de l’UNEDIC est au service de cette dernière condition.
L’amélioration constatée sur le front du chômage structurel peut s’expliquer par la permanence des tensions sur certains métiers. Quand la conjoncture s’améliore brutalement, les tensions apparaissent. Au bout d’un certain temps, des mécanismes de hausse des salaires, d’information sur le besoin de main d’œuvre, de développement de l’offre de formation permettent progressivement de répondre aux besoins et de diminuer les tensions. Si la conjoncture se retourne brutalement, comme cela a été le cas au début des années 90, ces mécanismes de régulation (spontanés ou non) n’ont pas le temps de se mettre en place. Depuis 2000, le taux de chômage n’est pas remonté aux niveaux antérieurs à la période précédent 1997. Les tensions se sont maintenus sur certains métiers, permettant d’améliorer progressivement la situation
On le voit bien pour ce qui est des infirmières et sages femmes, métiers qui enregistrait les plus fortes difficultés (plus de 80%) il y a 4 ans, et pour lequel le taux de difficulté est maintenant de 67.1%, au dessus de la moyenne certes, mais assez loin des métiers de la construction.
C’est en effet sur les métiers
qualifiés de la construction (en premier lieu les maçons qualifiés) que se
concentrent les plus fortes difficultés. Il y a à cela une raison fort
simple : après une baisse régulière qui a asséché les filières de
formation, la construction n’a cessé d’augmenter depuis 2002 comme le montre le
tableau suivant du nombre de logements déclarés commencés (en milliers
Année |
1998 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
Logements |
282 |
302 |
313 |
362 |
408 |
454 |
Une augmentation de 50% sur 5 ans ne pouvait évidemment se faire sans tensions, on peut même s’étonner d’avoir réussi à la faire !
Il semble d’après les données de fin 2006 et début 2007 que la hausse se soit arrêtée, voire qu’il y ait une légère baisse. On pourrait dans ce cas voir dans les prochaines années un apaisement progressif des tensions sur les métiers de la construction.
En attendant, les tensions sur le marché du travail se sont traduites par une augmentation plus importante des salaires dans le secteur de la construction qu’ailleurs, comme le montre le tableau suivant. Le différentiel d’augmentation est d’environ 0.7% par an. En cumulé, l’écart est de 5%. Il recouvre des métiers en tension (maçons qualifiés par exemple) et d’autres qui le sont nettement moins (manœuvre du bâtiment)
|
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
construction |
107.3 |
112.6 |
118.0 |
121.8 |
126.9 |
131.6 |
136.0 |
ouvriers |
108.6 |
113.0 |
116.9 |
120.1 |
123.7 |
127.6 |
131.2 |
Pour finir ce billet, une comparaison entre les résultats de cette enquête et les projections à l’horizon 2015 de la DARES permet de souligner que les périmètres concernés ne sont pas les même. Le métier d’enseignant, qui est le deuxième en perspective de recrutement pour la DARES n’apparaît pas pour l’UNEDIC qui ne s’intéresse qu’aux entreprises. Le métier d’assistantes maternelles qui vient en premier pour la DARES comprend des postes dans le public et est regroupé avec celui d’employés de maison dans l’enquête UNEDIC. Ces deux études sont donc plutôt complémentaires que comparables.
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